Dans cet article seront discutés deux diagnostics importants de la hanche douloureuse de l’enfant et de l’adolescent. Les deux diagnostics ont des limites d’âge claires. Deux diagnostics différentiels de la maladie de Perthes à exclure sont l’arthrite septique du petit enfant (refus de charge, malade, fébrile avec les signes inflammatoires classiques) et la synovite aiguë transitoire, nettement plus fréquente (infection virale anamnestique, courte durée).
23
Critères cliniques et radiologiquesPertinence
État du pilier latéral
1 +++
Calcification latérale
2 ++
Subluxation («containment»)
2 ++
Âge (> 6 ans) +++
Mobilité ++
Sexe (féminin) ++
Étendue de la nécrose
3 +
Atteinte métaphysaire
2 +
Horizontalisation de la zone de croissance
2 –
1 = facteurs de risque selon la classification de Herring; 2 = Facteurs de risque d’après Caterall («head at risk
sign»); 3 = Classification de Caterall, Salter et Thompson; +++ = grande pertinence
Introduction
Dans cet article seront discutés deux diagnos –
tics importants de la hanche douloureuse de
l’enfant et de l’adolescent. Les deux diagnos –
tics ont des limites d’âge claires. Deux dia-
gnostics différentiels de la maladie de Perthes
à exclure sont l’arthrite septique du petit en-
fant ( r ef us de charge, malade, fébr ile avec les
signes inflammatoires classiques) et la syno –
vite aiguë transitoire, nettement plus fré-
quente (infection virale anamnestique, courte
durée).
Chez l’adolescent il faut penser en outre à
l’épiphysiolyse fémorale supérieure et aux
bles sur es de sp or t dans la r égion de la hanche
et du bassin (arrachements apophysaires),
également à l’arthrite septique et plus rare-
ment à une tumeur du fémur proximal ou du
bassin.
Maladie de Perthes
La maladie de Perthes a été décrite pour la
première fois il y a plus de 100 ans; elle est la
conséquence d’une ischémie de la tête du
fémur. Il n’a pas été trouvé à ce jour de
consensus autour du traitement optimal de
cette maladie, la cause de l’ischémie étant
toujours inconnue. Il s’agit d’une des rares
affections de la hanche dont l’évolution iné-
luctable des différents stades ne se laisse
jusqu’à ce jour que peu influencer
1).
Incidence
L’incidence de la maladie de Perthes est de
8.8/10 0 ’0 0 0 enf ant s et adolescent s de 0 à 15
ans, les garçons étant touchés 4x plus fré-
quemment que les filles
2 ) , 3 ) .
Clinique, diagnostic
Les enfants présentent souvent une boiterie,
typiquement unilatérale. Les douleurs dans la
hanche sont légères à modérées, parfois la
douleur se situant plutôt dans la cuisse ou le
genou du côté atteint. A l’examen clinique on
const ate une b oiter ie d ’es qui ve ou de r aideur,
le pied est tenu en légère rotation externe.
L a mobilité du côté at teint est en génér al limi –
Maladie de Perthes et épiphysiolyse de la
hanche
Andreas H. Krieg, Simone Schreiner, Carol C. Hasler, Bâle
Traduction: Rudolf Schlaepfer, La Chaux- de – Fonds
té e et doulour euse en fin de cour se – t y pique-
ment lors de l’abduction et rotation interne.
Contrairement au diagnostic différentiel le
plus important – l’arthrite septique – les en-
fants avec une maladie de Perthes sont afé-
briles et en parfait état général. On peut déjà
constater des modifications à la scintigraphie
ou à l’IRM dans les stades précoces, mais ce
diagnostic forcé n’a aucune conséquence
thérapeutique. De toute manière aucun trai –
tement ne serait entrepris au stade initial
d’une maladie de Perthes, si ce n’est de la
physiothérapie lorsque la mobilité de la
hanche reste limitée plus longtemps que deux
semaines, indépendamment du fait qu’il
s’agisse d’une maladie de Perthes ou d’une
synovite aiguë transitoire. L’échographie de la
hanche peut mettre en évidence, au stade
précoce de la maladie de Perthes, un discret
épanchement; des contrôles échographiques
de l’évolution d’une maladie de Perthes ne se
sont pas avérés utiles.
La maladie de Perthes sera diagnostiquée
sans difficulté six semaines plus tard par les
radiographies conventionnelles (bassin de
face et incidence de Lauenstein): initialement ne sont visibles que de discrètes modifica
–
tions, un léger aplatissement de la tête du
fémur et une condensation (noyau hyperdense
sous-chondral) ainsi qu’un élargissement de
la fente articulaire ( fig. 1+3 ). On peut ainsi
éviter à l’enfant l’IRM chère et invasive (né-
ces sit ant au p etit âge sou vent une nar cose )
4).
Actuellement plusieurs centres testent le
moyen de diagnostiquer par IRM l’extension
de la nécrose de la tête fémorale plus préco-
cement (classification IRM) que par radiogra –
phie, ce qui devrait permettre un traitement
opératoire précoce et un meilleur résultat
5).
Selon notre plan de traitement, les contrôles
radiologiques (bassin de face et fémur axial)
sont effectués tous le (4) -6 mois pendant 2
ans, ensuite 1x/année.
Les contrôles cliniques devraient être effec –
tués tous les 3 mois afin de vér i fier la mobilité
de la hanche et ne pas manquer les évolutions
compliquées avec subluxation latérale. La li-
mitation progressive de l’abduction est dans
ce cas typique.
Classification/stades de la maladie
Les classifications utilisées se basent actuel –
lement sur la radiologie conventionnelle. La
classification selon Catterall
6) décrit le pour –
centage de l’étendue de la nécrose et acces –
soirement les «head at risk-signs» ( f acteur s de
risque). La classification la plus utilisée est
celle de Herring
7), fondée sur l’intégrité du
pilier latéral de la tête fémorale («lateral pillar
classification») dans la radiographie de face.
On distingue 3 groupes (fig. 1) :
Tableau 1: Facteurs pronostiques et pertinence pour le pronostic du stade final: du point de
vue clinique l’âge (> 6 ans) lors du diagnostic de la maladie, une mobilité très réduite et le sexe
féminin, du point de vue radiologique l’effondrement latéral de la tête du fémur >50 % (Herring
C) ainsi que la subluxation et la calcification latérale indiquent un mauvais pronostic
1Prof. ffRTofaff.bai
1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
24
A: pilier latéral non atteint
B: > 50 % de la hauteur du pilier latéral conservée
C: < 50 % de la hauteur du pilier latéral conservée
Le type C de Herring a un mauvais pronostic,
avec excentration latérale de la tête du fémur,
p ou vant occasionner, lor s du st ade de r econs -
truction, la formation d’une bosse («bump»)
latérale, qui limite la mobilité et sera à l’ori-
gine d’une arthrose précoce (fig. 2) .
Le tableau 1 résume les facteurs de risque
radiologiques et cliniques
8 ) -11 ) .
L’évolution radiologique est divisée en 4
phases. La durée des différentes phases est
variable. La maladie évolue en moyenne pen-
dant env iron 3 ans : 1. phase de condensation
( env. 7 mois ) , 2. phase de f r ag ment ation ( env.
8.5. mois), 3. phase de réparation (env. 18
mois) et 4. phase finale
12 ).
Plus tard la maladie débute, plus sévère est
en général l’évolution et longue la durée.
Phase de condensation (fig. 3): la tête du fé-
mur est aplatie et hy p er dense, la fente ar ticu -
laire apparaît plus large.
Phase de fragmentation (fig. 4): on constate
une désintégration plus ou moins importante
de la tête, avec des zones ostéolytiques et de
sclérose de l’épiphyse (et métaphyse).
Phase de reconstruction: apparition d’os
néoformé; l’image s' harmonise.
Phase finale: image terminale d’une hanche
soit normale soit d’une coxa magna (fig. 5)
jusqu’à l’incongruence et l’aplatissement de
la tête du fémur.
La phase finale peut être subdivisée selon
Stulberg
13 ) en 5 degrés: plus élevé le degré,
plus important le risque de développer une
arthrose:
I.
Ha
nche normale – tête fémorale
sp
hérique
II.
Co
xa magna – tête fémorale
sp
hérique (congruence sphérique)
III.
Co
xa magna – tête fémorale ovale ou
en
champignon (fig. 5)
IV.
Tê
te fémorale aplatie, la congruence
av
ec l’acétabulum est conservée
(c
ongruence asphérique)
V.
Tê
te fémorale aplatie, pas de congruence
(i
ncongruence asphérique) Figure 1:
Fracture sous-chondrale avec élar -
gissement de la fente articulaire
Figure 2: Patient avec une maladie de Perthes
(stade de fragmentation avancé), type C de
Herring et signes de risque importants de la
tête fémorale: calcification latérale et su -
bluxation (flèches bleues courtes) et début de
formation d’une bosse («bump»)
Figure 3:
Maladie de Perthes à gauche au
stade de condensation
Figure 4: Hanche de face et incidence axiale au stade de fragmentation initial
1Prof. ffRTofaff.bai
1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
25
Traitement de la maladie de Perthes
Selon l’évolution, le traitement de la maladie
de Perthes est conservateur ou chirurgical.
Lorsque la maladie débute à un jeune âge, le
pronostic est en général plutôt bon, l’âge du
patient ayant la plus grande valeur pronos-
tique. La perte de la mobilité de la hanche est
un des facteurs de risque les plus importants
responsables d’une évolution et d’un résultat
final défavorables. La physiothérapie et les
exercices à domicile permettent de limiter la
perte de mobilité
14 ).
Les mouvements de la tête du fémur dans
l’acétabulum non atteint par la maladie visent
à maintenir la forme sphérique de la tête, en
prévenant son aplatissement et la formation
d’une articulation en charnière au pronostic
défavorable. Lorsque les adducteurs sont
raccourcis, dans de rares cas peuvent être
indiqués l’allongement chirurgical ou l’injec -
tion de toxine botulinique dans les adduc-
teurs.
Ces dernières années le concept de «dé-
charge» a été progressivement abandonné. La
décharge à l’aide d’une canne ou la prescrip -
tion temporaire d’un antalgique peuvent être
indiqués pendant une phase douloureuse ou
en présence d’un épanchement, mais de -
vraient être abandonnés après peu de temps.
Une activité sportive adaptée paraît plus rai -
sonnable qu’une interdiction générale. On
évitera pourtant des charges conséquentes
de la hanche. En font partie le trampoline, les
sports comme le saut en longueur, les agrès,
les sports de contact et du type stop &go.
S’il n’est pas possible de maintenir l’articula -
tion centrée dans l’acétabulum, d’autres me -sures sont nécessaires pour rétablir la
congruence articulaire (containment)
.
Lors de l’abduction la tête du fémur se tourne
normalement avec sa partie latérale sous le
toit de l’acétabulum, raison pour laquelle le
maintien de la mobilité est tr ès imp or t ant lor s
d’une maladie de Perthes. Le positionnement
correcte de la tête fémorale peut être empê -
ché par une calcification latérale qui forme
une protubérance («bump») et heurte le toit
acétabulaire, occasionnant ainsi un mouve -
ment en charnière («hinge abduction»). Cela
doit absolument être évité (fig. 6) .
Traitement chirurgical
Le tr aitement par at telle p our centr er l ’ar ticu -
lation n’est pas indiqué, car cela restreint
l’enfant pendant des années. Nous privilé -
gions une intervention sur le bassin et/ou le
fémur afin d’améliorer la congruence articu -
laire, de préférence entre 5 et 10 ans, de
manière optimale au début de la phase de
fragmentation
4).
Lorsque l’indication est donnée, le traitement
chirurgical semble nettement améliorer le
pronostic, comparé à l’évolution sans traite -
ment. De bonnes indications sont un pilier
latéral du type B/C ou B, une nécrose de
> 50 % et une couverture acétabulaire de
moins de 80 %
8). Malheureusement il n’y a
toujours pas de consensus au niveau interna –
tional concernant l’indication opératoire et le
type d’intervention
24 ).
Pour inter venir sur le bas sin on p eut env isager
la triple-ostéotomie (fig. 7): cette opération
consiste à sectionner la branche de l’ischion/
os pubis et l’ilion et à faire pivoter l’acétabu- lum par des sus la tête du fémur. C ela ne mo di
–
fie ni la longueur ni l’axe de l’extrémité infé-
rieure, contrairement à la l’ostéotomie par
varisation (raccourcissement)
15 ). Comme
l’abduction de la jambe, elle a pour effet un
centrage de la tête du fémur
16 ).
Pour le traitement des séquelles avec «hinge
abduction» et formation d’une bosse osseuse
latérale («bump») entrent en ligne de compte
l’ostéotomie de valgisation qui amène la par-
tie médiale de la tête fémorale dans la zone
de charge, ou alors la résection arthrosco –
pique de la bosse osseuse.
Résumé
La maladie de Perthes est une nécrose idio –
patique de la tête du fémur. Le diag nostic doit
être évoqué chez un enfant de 4-8 ans avec
une boiterie unilatérale et des douleurs de la
hanche an absence de tr aumatisme, de fièv r e
et anamnèse d’infection préalable. Le traite –
ment initial est symptomatique et consiste en
physiothérapie et analgésie. Le diagnostic est
confirmé radiologiquement (bassin de face et
incidence de Lauenstein) généralement 6-8
semaines après l’apparition des premiers
symptômes.
Les parents doivent être informés de l’évolu –
tion inéluctable et durant des années. Objec –
tif primaire du traitement est la conservation
de la mobilité. Un appareillage et décharge
prolongée pendant toute la durée de la mala –
die ne sont pas conseillés.
Dans des cas choisis , en r aison du décentr age
de la tête du fémur et de l ’asp ect du pilier laté –
Figure 5: Stade final de maladie de Perthes
( deg r é III d ’apr ès Stulb er g ) avec coxa plana et
magna à droite Figure 6:
Hanche gauche 6 semaines après
triple-ostéotomie Figure 7:
Fillette de 7 ans avec luxation laté –
rale (petite flèche) et formation d’une bosse
(«bump») (flèche large) et d’une articulation
en charnière («hinge-abduction») ( flèche
double)
1Prof. ffRTofaff.bai
1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
26
ral, une intervention chirurgicale est raison-
nable.
Épiphysiolyse fémorale supérieure
L’épiphysiolyse fémorale supérieure consiste
en une modification non traumatique du car –
tilage de conjugaison entraînant un glisse –
ment de la métaphyse fémorale vers antéro –
latéral, alors que l’épiphyse reste dans
l’acétabulum. Le glissement a lieu pendant la
poussée de croissance pubertaire. Après la
fermeture de la zone de croissance cette
maladie n’est plus possible.
Incidence, facteurs de risque
L’incidence de la maladie est d’environ
9/100’000 adolescents, les garçons étant
touchés 1.5x plus que les filles. Dans environ
40 % des cas un glissement a lieu aussi de
l’autre côté, généralement pendant les 1.5
ans après le premier épisode
18 ). Une lyse
d’emblée bilatérale est possible, mais
rare
4 ) ,17 ) .
Bien qu’il s’agisse souvent de jeunes garçons
obèses, hypogonadiques, en pleine poussée
de croissance pubertaire, la plupart des épi-
physiolyses fémorales supérieures se mani –
festent sans cause endocrinienne, le risque
étant toutefois élevé chez les patients atteints
d’hypothyroïdie, d’ostéodystrophie rénale,
d’hyperparathyroïdie secondaire, d’hypogona –
disme, de trisomie 21 et après irradiation
19 ) -22 ) .
Les jeunes sportifs, surtout pratiquant des
sports du type stop &go comme p.ex. le foot
sont aussi à risque.
Clinique, classification
Il n’est pas rare ( jusqu’à 50 % ) que les adoles –
cents se présentent avec des douleurs à la
cuis se ou sur le côté intér ieur du genou. Ils ne
ressentent pas forcément des douleurs de la
hanche, ce qui peut retarder le diagnostic
23 ).
L’examen clinique montre en général une limi –
tation de la rotation interne, parfois aussi de
l’abduction de la hanche atteinte. Les patients
mar chent t y piquement ave c la jamb e en r ot a –
tion ex ter ne et la fl ex ion pas si ve de la hanche
est associée à une rotation externe (signe de
Drehmann).
La classification se fait selon la durée de
l ’anamnèse et la capacité de mar che. O n par le
d’épiphysiolyse aiguë lorsque les symptômes
durent depuis moins de 3 semaines (env.
15%), et donc de chronique pour une anam –
nèse de plus de 3 semaines (env. 85%)
18 ).
Parfois l’évolution est «aiguë-post-chronique»,
c’est à dire que des symptômes sont présents depuis plus de 3 semaines mais qu’il y a sou
–
dainement une aggravation (depuis moins de
3 semaines). La plupart de ces patients sont
nettement plus atteints, jusqu’à ne plus pou –
voir marcher
24 ). On peut ensuite classifier en
«stable» et «instable»; dans le premier cas le
patient marche, dans le deuxième il n’en est
plus capable
18 ). C et te clas si fication est imp or –
tante aussi du point de vue pronostic, une
situation instable évoluant dans 24-45% des
cas ver s une nécrose de la tête fémor ale
18 ) , 25 ) .
Imagerie
La suspicion clinique d’épiphysiolyse exige
une radiographie du bassin de face et axiale
de la hanche touchée. Dans la radiographie
de face, l’épiphysiolyse peut facilement
échapper: la zone de croissance est un peu
plus large et la tête du fémur dépasse un peu
moins le côté latéral du col du fémur (fig. 8).
Raison pour laquelle l’incidence axiale est
nécessaire lorsqu’on cherche une épiphysio –
lyse; le glissement dorsal de la tête du fémur
y est bien visible ( fig. 8 à droite )
26). L’incidence
axiale ou mieux l’incidence «cross-table» per-
mettent de mesurer l’angle de glissement
( voir aus si fig. 9) qui ser t d ’or ient ation p our le
traitement.
Sur les radiographies on cherche également
des signes de remaniement de la zone de
glissement (formation de cal) dans le contexte
d’une évolution chronique. L’échographie per –
met de v isualiser un épanchement et un déca –
lage méta-épiphysaire. Cet examen peut
s’effectuer au cabinet médical et est fiable pour l’examinateur expérimenté, la radiogra
–
phie en deux plans étant néanmoins le gold-
standard
27).
Lors de formes aiguës d’épiphysiolyse l’IRM
donne des informations importantes concer –
nant la vascularisation de l’épiphyse. Dans les
formes chroniques elle permet d’apprécier la
défor mation dans la r égion du col et de la tête
du fémur ( offset incomplet) . La tête du fémur
peut alors heurter le bord de l’acétabulum
(cam-impingment) et favoriser le développe –
ment précoce d’une arthrose (fig. 9) .
Traitement
La régénération de la partie entre col et tête
du fémur d’une épiphysiolyse fémorale supé –
rieure non traitée peut faire retrouver une
fonction acceptable de l’articulation. Mais
fréquemment l’évolution naturelle de la mala –
die mène à une coxarthrose
24 ). Le traitement
de l’épiphysiolyse sera donc toujours chirur –
gical.
L a for me aiguë ou ins t able r epr ésente une des
rares urgences en orthopédie pédiatrique.
Dans l’immédiat on décharge par des cannes
afin d’éviter tout mouvement abrupt et un
glissement ultérieur, puis l’enfant reste cou –
ché jusqu’à l’opération. Le repositionnement
avec stabilisation se fait en urgence.
Lors d’un angle de glissement jusqu’à 40°
nous posons l’indication au repositionnement
prudent, fermé (autant que possible) et fixa-
tion de l’épiphyse à travers le cartilage de
conjugaison (vis, broches ou pins) ( fi g .10 ). Les
implants restent en place jusqu’à la fermeture
de la zone de croissance
28) , 29) .
Figure 8: Radiographie de face d’une épiphysiolyse fémorale supérieure gauche (presque invi –
sible – observez la zone de croissance légèrement élargie !) et axiale avec glissement de la tête
du fémur
1Prof. ffRTofaff.bai
1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
27
Lorsque le glissement dépasse 40° nous ef-
fectuons une IRM pour déterminer la vascula –
risation du cartilage de conjugaison. Si elle
est perturbée, on n’effectue qu’une fixation
du cartilage, pour réaliser une éventuelle
correction chirurgicale par la suite.
Lorsque la vascularisation est conservée et
l’épiphysiolyse aiguë, nous tentons les repo –
sitionnement et fixation prudents fermés. Si
ce n’est pas possible, nous procédons à un
repositionnement de l’épiphyse afin de réta –
blir l ’of f set ( r app or t tête/col du fémur) : ostéo –
tomie trochantérienne, luxation de la hanche
après fixation de l’épiphyse in situ, ostéoto –
mie cunéiforme sous-capitale avec raccour –
cissement discret du col du fémur, résection
du cal de réparation (cas aigus-post- chro –
niques) et repositionnement prudent de l’épi –
physe et fixation définitive avec des pins afin
de rétablir les conditions anatomiques
3 0 ) , 31 ) .
Vu le risque d’un glissement aussi de l’autre
côté, en fonction de l’âge osseux l’épiphyse
contra-latérale devrait être fixée à son tour;
un âge osseux de 14 ans pour les garçons et
12 ans pour les filles est la limite supérieure
approximative pour cette intervention prophy –
lactique.
Complications de l’épiphysiolyse
fémorale supérieure/du traitement
chirurgical
La complication la plus redoutée, la nécrose
de la tête du fémur, peut survenir d’une part
suite au glissement mais être aussi iatrogène
suite au repositionnement chirurgical de la
tête fémorale. Une fermeture précoce de la
zone de cr ois s ance ave c r accour cis sement du
col du fémur est aussi possible.
Des études à long terme relatent un risque
augmenté d’arthrose, en fonction de l’angle
de glissement et de la perte de continuité qui
s’ensuit
32) (fig. 9) .
Les patient s à la clinique inappar ente ou avec
des symptômes sub-cliniques représentent
un défi particulier; il s’agit surtout de jeunes
sportifs qui subissent un glissement lent de
l’épiphyse sans troubles particuliers – la
conséquence est une déformation de la jonc –
tion tête – col du fémur ( offset réduit) (voir
aussi fig. 9, flèche large); la fréquence d’ar –
throse est augmentée par rapport à la popu-
lation moyenne
33). L’évaluation médico-spor –
tive des jeunes sportifs orientés sur la
performance, surtout pratiquant des sports
stop &go (foot, tennis, etc.) est très impor-
tante à titre préventif: la recherche ciblée de douleurs de l’aine ou de la cuisse et la com-
paraison de la rotation de la hanche (rotation
interne diminuée et externe augmentée) sont
utiles à cet égard. Un test précieux est le test
de conflit fémoro-acétabulaire
(impingment):
en position couchée, la hanche fléchie à 90°,
on effectue une rotation interne et adduction
pr udente – nor malement on sent l ’ar r êt du col
du fémur sur l’acétabulum, qui ne devrait pas
être douloureux (test d’impingment négatif).
La douleur peut indiquer un offset diminué
avec endommagement du labrum acétabu –
laire
34).
Résumé
L’épiphysiolyse fémorale supérieure est, à
côté de l’arthrite septique, une des rares ur-
gences orthopédiques de l’adolescent puber –
taire. Les douleurs typiques de la hanche ne
sont pas nécessairement présentes, souvent
elles se situent plutôt dans la cuisse ou le
genou. La rotation interne de la hanche dimi –
nuée ou le signe de Drehmann sont, en pré-
sence d’une anamnèse correspondante, très
suspects d’une épiphysiolyse fémorale supé –
rieure. L’examen clinique doit être complété
par la radiographie du bassin de face et axiale,
afin de déterminer l’angle de glissement. Il est impératif de décharger à l’aide de cannes et
d’adresser immédiatement le patient dans un
centr e d ’or thop é die p é diatr ique. Dans les cas
aigus on procède en principe à la stabilisation
de la zone de croissance après repositionne
–
ment prudent de l’épiphyse par un implant
adapté. Cet implant reste en place jusqu’à la
fermeture de la zone de croissance. Dans les
cas chroniques , avec une épiphyse fi xée dans
une mauvaise position, on devra procéder à
un repositionnement ouvert avec luxation
chirurgicale de la hanche. Le glissement du
côté opposé est possible et une fixation pro –
phylactique devrait être effectuée en fonction
de l’âge osseux. Les parents doivent être in-
formés dans ce sens. Le diagnostic de l’épi –
physiolyse chronique, notamment du jeune
sportif peu symptomatique, est difficile. Ces
jeunes devraient donc être suivis régulière –
ment et examinés de manière ciblée.
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Figure 9: Épiphysiolyse fémorale supérieure
avec un angle de glissement de 30° (flèche
étroite ) et p er te de la continuité (offset) tête/
col (flèche large); risque d’impaction fémoro-
acétabulaire lors de la flexion de la hanche
(flèche double). Figure 10:
Épiphysiolyse fémorale supérieure
du même patient tr aité avec un clou à crochet
(pin de Hansson).
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1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
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Correspondance
PD Dr. A. Krieg
Leitender Arzt Orthopädie, Universitätskin –
derspital Beider Basel (UKBB)
Postfach, Spitalstrasse 33
CH- 4056 Basel
andreas.krieg@ ukbb.ch
Les auteurs certifient qu’aucun soutien financier ou autre
conflit d’intérêt n’est lié à cet article.
1Prof. ffRTofaff.bai
1Prof. PRTaPR. RbiTnr.,PSe( iTSe( f.r ébi
Informations complémentaires
Correspondance:
Auteurs
Andreas H. Krieg Simone Schreiner Carol C. Hasler