L’ictère cholestatique affecte un nourrisson sur 2500. Il s’agit toujours d’un état pathologique du à une dysfonction hépatobiliaire potentiellement dangereuse pour l’enfant. Une identification précoce du problème par le pédiatre est essentiel et référer rapidement l’enfant au gastroentérologue / hépatologue pédiatre sont des facteurs déterminants pour l’identification, le traitement et le pronostic de la maladie de base. Les sociétés européenne (ESPGHAN) et nord américaine (NASPGHAN) de gastroentérologie, hépatologie et nutrition pédiatrique ont publié les nouvelles recommandations pour la prise en charge diagnostique de la cholestase néonatale. Nous avons résumé dans cet article les points essentiels.
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La cholestase néonatale: guide pratique
pour la prise en charge du nourrisson*
Luca Garzoni et Valérie Mc Lin, Genève
Introduction
L’ictère cholestatique affecte un nourrisson
sur 2500. Il s’agit toujours d’un état patholo-
gique du à une dysfonction hépatobiliaire
potentiellement dangereuse pour l’enfant.
Une identification précoce du problème par le
pédiatre est essentiel et référer rapidement
l’enfant au gastroentérologue/hépatologue
pédiatre sont des facteurs déterminants pour
l’identification, le traitement et le pronostic
de la maladie de base.
Les sociétés européenne (ESPGHAN) et nord
américaine (NASPGHAN) de gastroentérolo –
gie, hépatologie et nutrition pédiatrique ont
publié les nouvelles recommandations pour la
prise en charge diagnostique de la cholestase
néonatale. Nous avons résumé dans cet ar –
ticle les points essentiels.
Définition
L’ictère cholestatique ou hyperbilirubinémie
conjugué e est dé finie par une valeur de bilir u –
bine conjuguée supérieure à 17 µmol/l indé –
pendamment de la valeur de bilirubine totale.
Evaluation du nourrisson ictérique
L’ictère est détectable à l’examen physique à
partir d’un taux sanguin de bilirubine totale
supérieur à 40 µmol/l. Chez le nouveau-né
sain avec une hyperbilirubinémie non-conju –
guée, les causes les plus fréquentes sont
l ’ictère physiologique et l ’ictère du lait mater –
nel, chacune des situations autolimitées.
L’ictère cholestatique est beaucoup plus rare
et toujours anormal. Pour qu’il y ait choles –
tase il doit y avoir une dysfonction hépato –
biliaire dont le pronostic peut être menaçant.
La détection précoce d’une cholestase par le
pédiatre est donc d’importance capitale.
La première étape qui permet de faire la dif –
férence entre un ictère cholestatique et non-
cholestatique est la détermination de la bili –
rubine totale et conjuguée dans le sang. Cette
investigation est recommandée pour chaque
nouveau-né ictérique de plus de 2 semaines
de vie ( voir algorithme ). Anamnèse
Une anamnèse détaillée concernant la famille,
la grossesse, la période pré-/péri- et post-
natale est fondamentale. Elle doit comprendre
le début de la jaunisse ainsi que les change
–
ments de la couleur des selles et des urines.
L’utilisation d’une carte colorimétrique des
selles par les parents ou les soignants pri –
maires (sage femme, infirmière à domicile et
pédiatre) a été prouvée être efficace dans
plusieurs pays pour le screening précoce de
l’atrésie des voies biliaires. Le tableau 1 ré-
sume les points importants de l’anamnèse.
Examen physique
L’examen physique comprend l’évaluation de
l’état général de l’enfant, le status abdomi –
nal, l’état nutritionnel et la recherche de signes extra-hépatiques pouvant orienter
vers un diagnostic. Le tableau 2
résume les
points clés de l’évaluation clinique.
Laboratoire
La présence d’une cholestase est confirmée
si la bilirubine conjuguée sanguine est > 17
µmol/l. Une fois l’hyperbilirubinémie conju –
guée confirmée, le bilan et la fonction de
synthèse hépatiques seront évalués par les
dosages sanguins de l’alanine aminotransfe –
rase (ALT), la gamma glutamyl transpeptidase
(gamma-GT), le temps de prothrombine
(Quick), le glucose, l’albumine et l’ammonium
(NH4). Il est important de savoir que si bon
nombre de cholestases sont associées à des
valeurs élevées de gamma GT plasmatique,
certaines ne le sont pas (cholestase à
gGT
basse) et suggèrent un autre diagnostic. De
plus , chez le nou veau – né la valeur nor male es t
plus élevée que chez l’enfant plus âgé. La
valeur de la phosphatase alcaline (PA) ne
p er met pas d ’évaluer la choles t ase à cause de
la prédominance de l’isoforme osseuse pen –
L’ictère cholestatique est toujours patho
–
logique. Il faut doser la bilirubine totale et
conjuguée chez chaque nouveau-né icté –
rique de ≥ 2 semaines de vie afin de dé –
marrer précocement les investigations
étiologiques en cas d’hyperbilirubinémie
conjuguée.
L’anamnèse et l’examen physique sont des
points clé pour orienter le diagnostic. La
décoloration des selles (voir carte colori –
métrique) est un signe d’obstruction des
voies biliaires et est une indication à une
évaluation en urgence par un centre spé –
cialisé.
Question Implication
Autres membres de la famille affectés Transmission autosomique dominante
Consanguinité Transmission autosomique récessive
Infection maternelle TORCH
Prurit/cholestase gravidique PFIC, BRIC
Echographie foetale Kyste du cholédoque, duplication intestinale
Infection néonatale, infection urinaire Cholestase dans le cadre d’une infection
Vomissements/irritabilité Trouble métabolique, sepsis
Selles:
• Selles décolorées
• Expulsion du méconium > 48h
• Diarrhée • Obstruction au niveau des VB
• Mucoviscidose
• Infectieux, PFIC 1
Prématurité + Nutrition parentérale Parenteral Nutrition Associated Cholestasis
(PNAC)
Tableau 1: Anamnèse
PFIC: progressive familial intrahepatic cholestasis, BRIC: benign recurrent intrahepatic cho –
lestasis, VB voies biliaires
* Cet article a déjà été publié dans PÄDIATRIE Nr. 2/2016. Nous remercions von Rosenfluh Publikationen et les
auteurs pour leur aimable autorisation de le reprendre. Le texte allemand a été légèrement modifié pour l’adapter à la
version française la plus récente.
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C’est la cause la plus fréquente chez les
causes identifiables d’un ictère obstructif
dans les premiers 3 mois de vie. La préva-
lence var ie à dép endance de la r égion gé og r a –
phique: Taiwan 1:6000 nouveau-nés, Suisse
et Europe 1:18 000, USA 1:19 000. Il y a 3
catégories d’AVB: la non-syndromique (84%),
l’AVB avec au moins une malformation asso –
cié e mais s ans déf aut de latér alis ation ( 6 % ) et
la forme syndromique (10 %) associé à une
asplénie ou polysplénie. Les anomalies asso –
ciées peuvent être d’origine cardiovasculaire
(16%), gastro-intestinale (14%) ou génito-uri –
naire. L’étiologie n’est pas claire, différentes
théories ont été discutées dans la littérature
(viral, toxines, auto -immunité, …). Les «red
flags» qui doivent porter à une évaluation ra –
pide pour exclure une AVB sont la présence
de selles décolorées, un ictère conjugué avec
gamma- GT élevée sans autres étiologies et
une vésicule biliaire anormale ou absente à
l’échographie abdominale à jeun. Le diagnos –
tic et le traitement précoce avec une hépato –
porto -entérostomie selon Kasai avec le but de
rétablir le flux biliaire et la prise en charge
centralisée sont déterminants pour le pronos –
tic. Si le Kasai est effectué avant les 60 jours
de vie, 90 % des patients gardent leur foie
natif à 18 mois de vie. Si le Kasai est effectué
après les 90 premiers jours de vie, seuls 10 %
des patients gardent leur foie natif. Il y a
aussi des facteurs non-modifiables et de
mauvais pronostic comme les formes syndro –
miques, la présence d’une atteinte biliaire
majeure et la présence d’une fibrose au mo –
ment du diagnostic.
Kyste du cholédoque
Les patients avec un kyste du cholédoque se
présentent souvent avec une cholestase à
gamma GT et bilirubine conjuguée élevées et
ave c une dilat ation du cholé do que ( mais vési –
cule biliaire normale) à l’échographie abdomi –
nale. Il est important de considérer qu’une
AV B p eut aus si se manifes ter ave c une atr ésie
de la partie distale et une dilatation kystique
de la partie proximale du cholédoque.
néonatale: CPRE (cholangio-pancréatogra
–
phie rétrograde endoscopique), MRCP (réso –
nance magnétique cholangio-pancréatogra –
phie), et scintigraphie hépatobiliaire.
Histopathologie
La biopsie hépatique peut permettre d’orien –
ter vers l’étiologie d’une cholestase. Les
signes classiques d’une obstruction biliaire
sont l’œdème portal et la fibrose périportale
( F i g .1 ), la réaction ductulaire et la bilirubinos
–
tase, avec notamment présence de plugs»
biliaires dans les canaux biliaires interlobu
–
laires ( Fig. 2). L’atteinte lobulaire est de de –
gré variable, pouvant consister en une bilir u –
binostase canaliculaire et hépatocytaire,
avec ballonisation et transformation giganto
–
cellulaire des hépatocytes. Il n’y a pas, en
général, de fibrose péri-sinusoïdale notable.
Causes de la cholestase néonatale
La cause la plus commune de la cholestase
néonatale est l’atrésie des voies biliaires
( AV B , 25 – 4 0 % ) , sui v i par des maladies mono –
géniques (25%) et des causes inconnues ou
d’origine multifactorielle.
Anomalies structurelles
Atrésie des voies biliaires (AVB)
dant la croissance chez le nourrisson et l’en
–
fant en général. D’autres analyse de labora –
toire et le screening néonatal pourront
compléter le bilan étiologique ( voir chapitre
«Causes de la cholestase néonatale» )
Imagerie
L’échographie abdominale à jeun, au minimum
durant 6h, est un examen simple, sensible et
non-invasif qui permet d’évaluer les voies bi –
liaires , les vaisseau x , et le parenchy me hépa –
tique. Lors d’une suspicion d’atrésie des voies
biliaires (AVB) on recherche plusieurs signes
échographiques lesquels, même si non-spé –
cifiques, pourraient renforcer la suspicion
clinique. En particulier, on recherche des
anomalies morphologiques de la vésicule bi –
liaire (absence, petite taille, pas de contrac –
tion lors de la prise orale), le «triangular cord
sign», le ratio entre le diamètre de l’artère
hépatique et le diamètre de la veine porte, et
les possibles anomalies anatomiques dans le
cadre d’une AVB syndromique (hétérotaxie,
veine porte préduodénale, polysplénie). Ré –
cemment, l’utilisation de l’ARFI (Acoustic ra –
diation force impulse elastography) a fait ses
preuves dans l’algorithme diagnostic de l’AVB.
Cependant, la visualisation d’une VB ne per –
met pas d’exclure formellement une AVB.
En imagerie, le gold standard pour le diagnos –
tic d’une atrésie des voies biliaires reste la
cholangiographie à ciel ouvert qui permet
d’évaluer la perméabilité des voies biliaires en
intra- et extra-hépatiques. Si une AVB est
confirmée, une hépato-porto-entérostomie
selon Kasai p eut se f air e dans le même temps
opératoire. Les examens suivants sont peu
contributifs dans l’évaluation de la cholestase Les examens de laboratoire (sang, urine),
l’échographie abdominale, la cholangio
–
graphie à ciel ouvert, et l’histopathologie
sont souvent indispensables dans la re –
cherche étiologique de la cholestase.
L’AVB est la cause plus fréquente parmi
les causes identifiables d’une cholestase
néonatale, dont le pronostic dépend de la
précocité du diagnostic et du traitement.
La présence de selles décolorées est un
signe d’alarme d’une obstruction de la
voie biliaire et une évaluation rapide à la
recherche d’une AVB doit être entreprise
conjointement avec un centre hépatobi –
liaire pédiatrique.
Tableau 2: Examen physique
* Référence: http://www.basca.ch/wp-basca/screening/stool-color-card/
Signe clinique Implication
Etat général, signes vitaux Maladie aiguë, infection, sepsis
Poids/taille Etat nutritionnel
Inspection des couches:
• Selles décolorées
(5–7 sur la carte colorimétrique*)
• Urines foncées Obstruction des voies biliaires
Signes dysmorphiques, souffle cardiaque, fond
d’œil pathologique Syndrome d’Alagille
Examen abdominal: distension, ascite, hépato –
mégalie, consistance foie, rate, masses Hépatopathie décompensée, néoplasie,
kyste du cholédoque
Etat neurologique pathologique Maladie métabolique, hépatopathie
décompensée
Hypoplasie des organes génitaux externes
masculins Panhypopituitarisme
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raison les nouveau-nés atteints de cette pa-
thologie se présentent avec une élévation de
la bilirubine totale et conjuguée, associée à
d’autres symptômes comme l’hypoplasie des
organes génitaux masculins, l’hypoglycémie
et le choc. Le diagnostic se base sur la me –
sure de la TSH, T4 libre et totale, cortisol
matinal et résonance magnétique cérébrale.
La cholestase disparait avec la substitution
hormonale.
Maladies rares génétiques/métaboliques
Syndrome d’Alagille
Maladie multisystémique caractérisée par une
paucité des canaux biliaires intrahépatiques.
La suspicion clinique (faciès typique, embryo –
toxon postérieur, vertèbres en papillon, at –
teinte rénale, anomalie cardiaque) est confir –
mée par le laboratoire (cholestase à gamma
GT élevées), l’histologie (paucité des canaux
biliaires intrahépatiques). Le séquençage des
gènes JAG1 et NOTCH2 peut être contributif.
Mucoviscidose
La mucoviscidose peut se manifester avec
une cholestase néonatale. Le diagnostic est
à rechercher avec le screening néonatal, le
test à la sueur et le séquençage du gène
CFTR.
Progressive Familial Intrahepatic
Cholestasis (PFIC)
Les PFIC sont un groupe de maladies mono –
géniques qui affectent le transport canalicu –
laire de la bile amenant à une cholestase
progressive avec atteinte hépatique. La carac –
téristique des PFIC 1 et 2 est la présence
d’une gamma GT normale. Par contre le PFIC
3 présente une gamma GT élevée. Le PFIC 1
ou «maladie de Byler» est associé à des diar –
quents. Le diagnostic d’une infection congé
–
nitale à CMV est confirmé par culture ou PCR
urinaires.
Les infections urinaires peuvent se présen-
ter avec une cholestase néonatale raison pour
la quelle une analyse et culture d’urine fait
partie des premières investigations dans le
cadre d’un ictère cholestatique néonatale.
Hépatites virales A, B et C
En générale ces virus ne causent pas une
cholestase néonatale. Dans la littérature il y
a juste quelque cas décrits dans des situa –
tions très particulières.
Autre infections
Syphilis, rubéole, toxoplasmose et virus
herpes peuvent se manifester avec une cho –
lestase néonatale, qui apparaît typiquement
p endant les 24 pr emièr es heur es de v ie, et un
retard de croissance. L’anamnèse maternelle
et le screening sérologique pendant la gros –
sesse aideront à confirmer la suspicion cli –
nique.
Problèmes endocriniens
Thyroïde
L’hypothyroïdie fait partie des diagnostics
différentiels d’un ictère cholestatique néona –
t al. Le scr e ening né onat al p er met de déte cter
des valeurs élevées de TSH. Pour éliminer une
hypothyroïdie centrale les tests thyroïdiens
devraient être répétés avec mesure de TSH,
T3 et T4 libre.
Panhypopituitarisme
Les hormones hypophysaires sont impliquées
dans la régulation de la synthèse et excrétion
de la bile et dans le flux biliaire. Pour cette
Infections
Cytomégalovirus (CMV)
C’est la cause la plus commune d’infection
congénitale, concernant 1–2% des nouveau-
nés. La plus part des nouveau-nés restent
asymptomatiques mais, malheureusement,
5–10 % des patients peuvent présenter plu
–
sieurs symptômes comme petit poids néona –
tal, microcéphalie, calcifications périventricu –
laires, choriorétinite et surdité. L’hépa to-splé-
no
mégalie et l’hyperbilirubinémie conjuguée
sont les problèmes hépatiques les plus fré –
Figure 1: cholestase et cirrhose lors d’une atrésie des voies biliaires.
Fibrose et œdème périportaux avec réaction ductulaire
Obstructive
• Atrésie des voies biliaires (AVB)
• Kyste du cholédoque
• Lithiase/sludge biliaire
• Syndrome d’Alagille
• Syndrome de la bile épaisse
• Mucoviscidose
• Cholangite sclérosante néonatale
• Fibrose hépatique congénitale/
Maladie de Caroli
Hépatocellulaire
• Hépatite néonatale idiopathique
• Infection virale (CMV, VIH)
• Infection bactérienne (infection urinaire, sep –
sis, syphilis)
• Maladie génétique (déficit α1-antitrypsine,
cholestatase intrahépatique fibrogène (PFIC),
mucoviscidose)
• Maladie métabolique (tyrosinémie, galactosé –
mie, trouble de la glycosylation)
• Maladie de surcharge (Gaucher, Wolman,
Nieman-Pick type C)
• Maladie mitochondriale
• Maladie endocrinienne: (hypothyroïdie, pan –
hypopituitarisme)
• Toxique/secondaire (nutrition parentérale)
• Déficit de synthèse des acides biliaires
Tableau 3: Etiologie de la cholestase
néonatale Figure 2:
cholestase lors d’une atrésie des voies biliaires (200x)
Flèches: plugs biliaires. Triangles: prolifération ductulaire
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indice de suspicion élevé. Le bilan à effectuer
dans la suspicion d’une trouble métabolique
compr ends dans le s ang : ga zométr ie, éle ctr o-
lytes, glucose, ammonium, lactate, pyruvate
et corps cétoniques, acides organiques et
acides aminés.
La galactosémie fait partie du screening
néonatal dans la majorité des pays. La tyro-
sinémie , qui se présente souvent avec une
coagulopathie disproportionnée par rapport
au reste du bilan hépatique, est diagnostiquée
avec de dosage de la succinylacétone urinaire
ou de l ’acti v ité de l ’enz y me f umar y lacetoace –
tate hydrolase dans le sang.
Maladies rares et cholestase néonatale
idiopathique
La cause de la cholestase néonatale reste
très souvent inconnue. Le nombre de choles –
rhées néonatales et à une mauvaise prise
pondérale. Le PFIC 2 est associé à un risque
accru de développer un cholangiocarcinome
ou un carcinome hépatocellulaire chez le
jeune enfant.
Déficit en α
1-antitrypsine
Représente la cause la plus fréquente d’une
cholestase héréditaire, avec une transmission
autosomique dominante de la mutation au
niveau du gène SERPINA1. 10–15% des nou –
veau – nés ave c cet te pathologie se pr ésentent
avec une cholestase néonatale. Il s’agit sou –
vent d’une cholestase sévère avec à l’occa –
sion des selles acholiques, chose qui rend
difficile de le différentier d’une atrésie des
voies biliaires sur la base des symptômes.
Une cirrhose avec hypertension portale peut
s’établir rapidement, mais en général l’ictère
disparait dans les 4 premiers mois de vie. Le
diagnostic est confirmé par la détermination
du phénotype par électrophorèse (normal:
MM, hétérozygote MZ ou MS, anormal: ZZ ou
SZ) et fait partie du bilan initial d’une choles –
tase néonatale ( voir algorithme). La mesure
du taux sérique d’ α1-antitrypsine n’est pas
indiqué puisqu’il s’agit d’une protéine de la
phase aiguë, donc difficilement interprétable
dans le contexte d’une cholestase.
Déficit de synthèse des acides biliaires
Il s’agit de pathologies rares mais dans la
plupart des cas traitables, donc c’est très
important de considérer ce diagnostic diffé –
rentiel chez un nouveau-né présentant une
cholestase à gammaGT basse. La plupart des
variantes présentent une gamma GT normale
ou basse et un taux sérique d’acides biliaires
bas, chose qui est en contraste avec les
autres maladies cholestatiques. Le diagnostic
est confirmé par la spectrométrie de masse
des acides biliaires urinaires et l’analyse mo –
léculaire pour confirmer la mutation géné –
tique. Le traitement est l’administration
d’acides biliaires primaires per os.
Erreurs innées du métabolisme
Il s ’agit d ’un g r oup e de tr oubles mét ab oliques
qui p eu vent se manifes ter par une choles t ase
néonatale et pour lesquels il faut garder un La recherche de la cause de la cholestase
est faite par étapes et en collaboration
avec un centre spécialisé:
1)
Eliminer les causes
a) qui nécessitent un traitement rapi –
de (AVB, infection urinaire, sepsis,
hypothyroïdie/panhypopituitaris –
me, galactosémie)
ou
b) qui sont facilement détectables (Ala –
gille, kyste du cholédoque, mucovi –
scidose, déficit en α 1-antitrypsine)
2) Une fois éliminées les causes a), con –
tinuer les investigations pour chercher
l’étiologie (voir tableau «Etiologie de la
cholestase néonatale»)
PFIC 1 et 2
Déficit en TJP2 (tight junction protein 2)
Déficit de synthèse des acides biliaires
Tableau 4: Maladies avec Gamma GT nor –
male/basse (< 150 U/l chez le nouveau-né)
TJP2 tight junction protein 2 Figure 3: algorithme de prise en charge de la cholestase néonatale
*Laboratoire de base: formule sanguine complète, ALT, gamma GT, bilirubine tot/dir, albumine, glucose, NH4, Quick
≥
Nouveau
-né ictérique
≥ 2 semaines de vie
Hyperbilirubinémie conjuguée ?
(Bilirubine directe
> 17 mcmol/l) Continuer investigations
Cholangiographie +/- Kasai
+/ – biopsie hépatique
Non
Oui
Pas d’obstruction des voies biliaires
Figure 1. Algorithme de prise en charge de la cholestase néonatale *Laboratoire de base: formule sanguine complète, ALT, gamma GT, Bili tot/dir, albumine, glucose, NH4, Quick
Selles décolorées ?
Ictère non -cholestatique
Ictère cholestatique
Laboratoire de base*
US abdominal à jeun >4h Laboratoire de base *
US abdominal à jeun >6 h
Oui
Non
Rechercher . Atrésie des voies biliaires
. Kyste du cholédoque
. Sludge /lithiase biliaire
. Cholangite sclérosante néonatale
Rechercher . Infection (TORCH)
. Maladie endocrinienne
. Maladie métabolique
. Maladie de surcharge
. Maladies cholestatiques
hér éditaires
à Voir Tableau 3 .
. Infection urinaire? (analyse/culture urine) . Sepsis ?
. Hypothyroïdie ? (Guthrie)
. Galactosémie? (Guthrie)
. Mucoviscidose? (Guthrie)
. Déficit en α1-antitrypsine (phénotype )
. Alagille? (souffle cardiaque, dysmorphie,
embryotoxon postérieur, vertèbres en papillon)
≥
Prise en charge spécifique
Oui Non
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tases néonatales idiopathiques continue à
diminuer grâce à la meilleure accessibilité aux
nouvelles techniques d’analyse génétique et
moléculaires.
Conclusion
L’ictère cholestatique néonatal est beaucoup
moins f réquent que l ’ictère à hy per bilir ubiné-
mie non-conjuguée. La présence d’une cho –
lestase est toujours pathologique et repré –
sente un signe de dysfonction hépatobiliaire
dans le cadre d’une maladie hépatique néona –
tale sous-jacente et potentiellement mena –
çante. L’identification précoce du problème
par le pédiatre et la prise en charge diagnos –
tique et thérapeutique rapides par le spécia –
liste sont d’importance capitale pour le pro –
nostic final.
L a mesur e de la bilir ubine tot ale et conjuguée
sanguines est donc recommandée chez tous
les nouveau-nés qui présentent encore un
ictère à 2 semaines de vie pour permettre de
diagnostiquer ou infirmer le plus rapidement
Take home message
1) L’hyperbilirubinémie conjuguée est défi –
nie par une bilirubine conjuguée > 17
µmol/l
2) L’ictère cholestatique est toujours pa –
thologique et est un signe de dysfonc –
tion hépatobiliaire
3) Pour chaque nouveau-né ictérique ≥ 2
semaines de vie il faut déterminer la
bilirubine totale et conjuguée pour éli –
miner une cholestase
4) Demander aux parents un échantillon
de selles. Si les selles sont décolorées
il f aut r éfér er r apidement le patient ver s
un centre de chirurgie hépatobiliaire
pédiatrique pour exclure ou confirmer
une AVB
5) Si l’ictère conjugué est confirmé, il faut
effectuer une évaluation rapide par
étapes pour:
a) Eliminer les causes traitables (AVB,
infection/sepsis, galactosémie, hypo –
thyroïdie) ou les maladies spécifiques
(déficit en α1-antitrypsine, mucovis –
cidose, Alagille, kyste du cholédoque)
b) Une fois éliminées les causes 1. a) et
b), continuer les investigations pour
chercher l’étiologie (voir tableau
«Etiologie de la cholestase néona –
tale») possible les maladies pour les quelles l’inter –
vention précoce est d’importance vitale, en
premier l’atrésie des voies biliaire, les troubles
du métabolisme, endocrinien et les infections.
Références
1) Fawaz R., et al., Guideline for the Evaluation of
Cholestatic Jaundice in Infants: Joint Recommen –
dations of the North American Society for Pediatric
Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition (NAS –
PGHAN) and the European Society for Pediatric
Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition (ES –
PGHAN), JPGN 2016, In press.
2) Hanquinet, S., et al., Contribution of acoustic radia –
tion force impulse (ARFI) elastography to the ultra –
sound diagnosis of biliar y atresia. Pediatr Radiol,
2015. 45(10): p. 1489-95.]
Correspondance
Dr Luca Garzoni
C entr e Suis se des Maladies du Foie de l ’ Enf ant
Hôpitaux Universitaires de Genève
Rue Willy Donzé 6
1211 Genève 14
luca.garzoni @ hcuge.ch
Les auteurs certifient qu’aucun soutien financier ou
autre conflit d’intérêt n’est lié à cet ar ticle.
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Informations complémentaires
Auteurs
Dr. med. Luca Garzoni , Centre Suisse des Maladies du Foie de l’Enfant, Hôpitaux Universitaires de Genève Valérie McLin Andreas Nydegger