Le trouble déficitaire de l’attention/hyperactivité (TDAH) est probablement le trouble du comportement le plus fréquemment diagnostiqué pendant l’enfance et l’adolescence. D’après des études épidémiologiques, en Europe environ 5 % de tous les enfants sont confrontés à ce diagnostic1). Les pédiatres rencontrent donc au quotidien de leur pratique fréquemment des patients suspects de présenter ce trouble, avec un TDAH déjà diagnostiqué ou qui suivent un traitement médicamenteux. Il est donc très important de connaître la maladie, les moyens diagnostiques et de traitement, mais aussi les contradictions et désaccords autour de ce trouble complexe.
2 H
Intro\buction
Le trouble déficitaire de l’attention/hyperac-
tivité (TDAH\b est probablement le trouble du
comportement le plus fréquemment diagnos-
tiqué pendant l’enfance et l’adolescence.
D’après des études épidémiologiques, en
Europe environ 5
% d
e tous les enfants sont
confrontés à ce diagnostic
1\b. Les pédiatres
rencontrent donc au quotidien de leur pra –
tique fréquemment des patients suspects de
présenter ce trouble, avec un TDAH déjà dia-
gnostiqué ou qui suivent un traitement médi –
camenteux. Il est donc très important de
connaître la maladie, les moyens diagnos –
tiques et de tr aitement , mais aus si les contr a –
dictions et désaccords autour de ce trouble
complexe.
Définition et symptômes
Par TDAH selon DSM-5 ou par trouble hyper –
kinétique selon ICD-10, on entend un trouble
comprenant inattention, hyperactivité et im –
pulsivité, qui débute pendant l’enfance, dure
plus de 6 mois et se manifeste dans diffé-
rentes circonstances, dont l’ampleur ne cor –
respond pas à l’âge et au développement de
l’enfant ou de l’adolescent et, enfin, qui
compromet lourdement la participation et
l’intégration de l’individu concerné (pour une
description détaillée du trouble voir
2\b , 3 \b \b.
Les symptômes apparaissent dans la plupart
des cas déjà à l’âge préscolaire. Nourrissons
p.
ex.
, ils montrent des troubles de la régula-
tion
4\b ou petits enfants, un niveau d’activité
exceptionnellement élevé. Avec l’entrée à
l’école les symptômes s’accentuent chez de
nombreux enfants, les attentes en termes de concentration, persévérance et tranquillité
motrice devenant plus exigeantes.
Le contact quotidien avec les enfants TDAH
nous apprend que la présentation clinique du
trouble est très hétérogène, ce qui a pour
conséquence une appréciation très controver
–
sées tant par les professionnels que dans le
public.
Différen\bs autour \bu \biagnostic
TDAH: une réflexion
Des doutes apparaissent parce que 1\b il
n’existe pas de modèle généralement reconnu
du trouble, 2\b nous ne disposons d’aucun
test fiable, 3\b l’expression du trouble se su-
perpose avec d’autres maladies et d’autres
troubles du comportement réactifs, 4\b il est
parfois difficile dans la pratique de distin
–
gue
r entre un comportement immature et
un trouble du comportement, et finalement 5\b
les symptômes du TDAH se trouvent répartis
de manière constante dans toute la popula-
tion.
Pas \be mo\bèle généralement
reconnu \bu trouble
Le TDAH est un trouble qui naît d’une combi –
naison complexe et à ce jour mal comprise
de facteurs neurobiologiques, génétiques,
psychiques et sociaux. Bien que dans d’in-
nombrables travaux aient été reconnus des
facteurs de risque liés au développement,
génétiques, toxiques-métaboliques et psycho –
sociaux favorisant l’apparition d’un TDAH, il
n’existe encore et toujours aucun modèle
généralement reconnu de cette maladie. Cela
tient en partie au fait que le TDAH est défini,
dans les systèmes de classification DMS-5 et
ICD-10, sans modèle théorique sous-jacent
et n’est décrit qu’à un niveau phénoménolo –
gique.
Dans la pratique, les professionnels privilé –
gient, selon l’image de l’homme et l’orienta –
tion professionnelle, différentes explications
p our l ’appar ition du TDAH. A insi – pr ésenté de
manière simplifiée – la vision médicale avance
une théorie neurobiologique-génétique qui
postule outre la composante héréditaire une
dysrégulation catécholaminergique des struc –
tures fronto-striées, fronto-cérébelleuses et
méso-limbiques du cerveau
5\b. Le trouble se
manifeste, à partir de ce modèle, sous forme
de déficits neuropsychologiques des fonc –
tions exécutives (autorégulation, mémoire de
travail, planification d’actions, etc.
6\b\b et du
Trouble déficitaire de l’attention\b
hyperactivité
Pourquoi pas «Trouble du spectre déficit d’attention/hyperactivité»
(spectre TDAH) ?
Oskar Jenni, Zurich
Traduction: Rudolf Schlaepfer, La Chaux- de – Fonds
Figure 1: Proportion d’enfants canadiens de 6–12 ans sous traitement médicamenteux
pour TDAH, en fonction du mois de naissance (n=937’943). La date limite pour l’entrée à
l’école est au Canada le 1
er janvier 12).
Pourcentage d’enfants
avec un traitement médicamenteux de TDAH
Tous les enfants
Gar
çons
F
i l l e s
Jan. Fév. Mars Avril Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déz. Mois de naissance
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Prof. PRTaPR. Rbi
H I
manifestent en tant que troubles réactifs.
Es t- ce que le TDAH p eut êtr e considér é, au v u
de chevauchements aussi importants, comme
une entité à part entière? Des études d’asso-
ciation du génome tendent effectivement à
montrer d’importants chevauchements entre
caractéristiques génétiques et biochimiques
de différentes maladies psychiatriques
(comme le TDAH, l’autisme, la dépression, la
schizophrénie
10 \b\b.
TDAH – un comportement
immature
Depuis les années 1970, certains auteurs
(d’abord Kinsbourne 11 \b\b p ostulent que le TDAH
serait un retard du développement, les en –
fants concernés se comportant comme des
enfants plus jeunes, à l’activité et impulsivité
plus marquées et à la persévérance et con
–
ce
ntration moindres. Une étude de cohorte a
ef fecti vement montr é que les enf ant s les plus
jeunes d’une classe d’école sont diagnosti –
qués TDAH plus souvent que les plus âgés
(p.
ex. 12 \b, figure 1) .
Shaw et ses collaborateurs ont confirmé
l’hypothèse de l’immaturité du comportement
par des données neurobiologiques
13 \b. L a matu –
ration cérébrale observée par IRM d’enfants
avec un TDAH évolue, comparé à celui d’en-
fant s sans ce trouble, avec un r et ar d de 3 ans.
Nous avons confirmé ce résultat par l’EEG
haute résolution
14 \b (figure 2) .
C es r ésult at s se r e coup ent ave c l ’obser vation
qu’avec le temps les symptômes chez une
partie des enfants concernés s’atténuent
voire disparaissent et qu’aucune différence
n’est plus constatée par rapport aux enfants
ou adolescents du même âge. Des études
cliniques ont montré qu’entre 30
% e
t 60
% d
es
enf ant s ave c un T DA H ne m ontr ent p lus d ’ano –
malies cliniquement significatives à l’âge
adulte, alors que les autres souffrent d’une
atteinte durable (la proportion dépend de la
définition de persistance/rémission, fig. 3
16 \b\b.
Dans la pratique clinique, la question de sa –
voir s’il s’agit d’un retard du développement
ou d’un trouble est importante, notamment
en vue des mesures à prendre, de leur ur-
gence et intensité. Mais il n’existe à ce jour
pas d’éléments prédicteurs qui permettraient
de dire, de manière fiable, si dans le cas indi –
viduel un TDAH s’estompera ou si les troubles
persisteront jusqu’à l’âge adulte. Certains
indices laissent penser qu’une anamnèse fa –
miliale positive, une situation psychosociale
défavorable et le nombre et l’ampleur des
troubles associés représentent des facteurs
diagnostic du TDAH
8\b. Bien qu’on trouve dans
la littérature des résultats intéressants con
–
ce
rnant les possibles mécanismes neurobio –
logiques et génétiques (voir p.
ex. 5\b\b, il ne se
trouve encore et toujours pas d’examens
d’imagerie (p.
ex.
IRM ou EEG\b, de laboratoire
ou de biologie moléculaire permettant un
diagnostic au niveau individuel. En clair: le
TDAH est un diagnostic clinique.
Bien que le développement futur d’un examen
spécifique ne soit pas tout à fait impen
–
s
able, même un «marqueur biologique» ne
n’écarterait pas la problématique de la dé
–
fin
ition d’une limite franche entre normal
et pathologique.
Chevauchements
avec \b’autres mala\bies
Dans des échantillons cliniques, 70 % des
enfants avec TDAH présentent des troubles
associés (comorbidités\b (p.
ex. 9\b\b. On trouve
des tr oubles an x ieu x , af fe ctif s ou du sommeil,
des tics, des troubles du développement
moteur et du langage, des dyslexies et dys
–
cal
culies. Parfois ces troubles se trouvent
au premier plan et les symptômes TDAH se
système de récompense (comportement
d’évitement en absence d’une récompense
immédiate
7\b\b. L’approche psychologique op
–
pose à cette explication biologique, centrée
sur l’enfant, la description d’une réalité psy –
chique et sociale complexe de l’enfant con
–
ce
rné. Dans le quotidien clinique on adoptera,
selon la situation individuelle, l’une ou de
l’autre explication ou les deux avec une pon-
dération variable.
Pas \be test fiable
Le diag nos tic TDAH se base sur l ’appr é ciation
subjective du comportement et de la situation
de l’enfant par les proches et les profession-
nels. Des dissensions diagnostiques se mani –
festent surtout lorsque l’appréciation des
dif
fé
rents observateurs diverge de manière
significative, le critère exigé d’un trouble se
manifestant au delà de situations spécifiques
n’étant alors plus rempli. Dans ces cas en
particulier, un marqueur biologique (un «test
TDAH»\b serait d’un grand secours.
Or il n’existe pas de d’examen génétique, neu
–
ro
logique ou neuropsychologique qui serait
suffisamment sensible et spécifique pour le
Figure 2: Ligne du haut: topographie de l’activité EEG à ondes lentes (1–4 Hz, marqueurs
de la maturation cérébrale
15)) d’enfants avec TDAH et d’un groupe contrôle normal 14). La
distribution des ondes lentes chez les enfants de tout juste 12 ans correspond davantage à
celle d’enfants de 8–11 ans qu’à celle d’enfants de 11–14 ans (ligne du bas enfants nor –
maux)
15). Ces résultats ne signifient pas que dans le cas individuel on puisse poser le dia –
gnostic de TDAH par une analyse EEG quantitative.
TDAH
(11,8 ans +
_ 0,4\b Contrôle
(11,6 ans +
_ 0,5\b max
8–11 ans 11–14 ans 14–17 ans
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Prof. PRTaPR. Rbi
H J
Diagnostic \bans la pratique
quoti\bienne
Le diagnostic TDAH est posé sur la base des
indications des parents et de l’entourage et
après un examen clinique complet de l’enfant.
Cette façon de procéder peut apparaître évi-
dente au premier regard, pourtant le proces –
sus diagnostique est, dans la pratique quoti –
dienne, exigeant et laisse un vaste espace
d’appréciation. Kovsoff et coll. ont examiné,
Le fait que les symptômes du TDAH soient
répartis de manière continue dans la popula
–
tion et que le trouble n’est pas une maladie
catégor ielle, engendr e inév it ablement un g ros
dilemme dans la pratique clinique. Le danger
encouru est de rendre le diagnostic directe-
ment dépendant des attentes de l’entourage
et des normes sociétaires.
de risque importants pour la persistance du
trouble
17 \b.
Catégorie TDAH ou spectre TDAH?
Les systèmes de classification comme le
DMS-5 partent du principe que le TDAH se
compose d’une série de troubles du compor
–
tement, qui se distinguent du comportement
normal par leur ampleur, leur nature et leur
qualité. Effectivement le classement de mala –
dies en catégories est une pratique courante
en médecine. Ainsi la drépanocytose est une
maladie dont les érythrocytes se distinguent
des érythrocytes normaux en nombre (trop
peu\b, aspect (falciformes\b et qualité (hémo –
globine différente\b. De façon analogue la
psychiatrie a créé des catégories pour les
troubles psychiques. Cette façon de procé –
der apparaît à première vue raisonnable. La
catégorisation permet de réduire la com –
plexité du comportement humain, de créer
un vocabulaire commun pour une maladie
donnée et de définir à quel moment un trai –
tement doit être initié. De surcroît les assu –
reurs exigent des critères précis, définissant
quand une prestation doit être remboursée
ou pas.
Mais que faire lorsqu’une maladie ne se dis-
tingue pas de la norme par la nature et la
qualité des symptômes, mais seulement par
leur ampleur (comme p.
ex.
l’hypertension ou
l ’ostéop orose \b ? Il y a de plus en plus d ’indices
pour le fait que le TDAH, et d’autres maladies
psychiatriques aussi, constituent des dia –
gnostics dimensionnels (et non pas catégo –
riels\b
18 \b –20 \b . Ainsi plusieurs études on montré
que des caractéristiques typiques du TDAH se
trouvent réparties de manière continue dans
la population (figure 4) .
Par le DSM ont a essayé de tenir compte de
ce fait, le diagnostic de TDAH n’étant posé
que si les enfants sont sévèrement atteints
sur une période prolongée. Mais qu’est- ce
que signifie, dans le contexte clinique concret
«sévèrement atteint»? En réalité il n’existe
pour les enfants avec des symptômes TDAH
pas de limite nette entre sain et malade. C’est
la raison pour laquelle on devrait parler,
comme c’est le cas p our le trouble du sp ectr e
de l’autisme, de troubles du spectre déficit
d’attention/hyperactivité (spectre TDAH\b. Ce
terme tient compte non seulement du carac –
tère dimensionnel du TDAH, mais aussi de
l’hétérogénéité du tableau clinique. Ainsi chez
cer t ains enf ant s c’est le dé ficit d ’at tention qui
est au premier plan, alors que chez d’autres
ce sont l’impulsivité et l’hyperactivité.
Figure 3: Evolution du diagnostic de TDAH (rouge: tableau clinique complet, critères
diagnostiques encore remplis lors du suivi, 15
%; v
ert: présence de symptômes résiduels
uniquement, 65
%
)
16). Âge lors du contrôle (ans)
Taux de persistance (%)
10 15 20 25 30
80
60
40
20
0
Fréquence (%)
Score des facteurs TDAH
-2
0 2 4
60
50
40 30
2010 0
F
igure 4: Répartition des symptômes TDAH (Longitudinal Study of Early Child Care and
Youth Development NICHD, année de naissance 1991, n=1078, analysés par différents
instruments (Child Behavior Checklist, Disruptive Behavior Disorders Questionnaire,
Classroom Observation System, Continous Performance Tasks, Tower of Hanoi) .
Chères,ee hreseescol
Chères,h coh s, lg
H L
Diagnostics \bifférentiels
Le diagnostic TDAH se pose par exclusion. La
recherche d’autres pathologies ou conditions
associées avec des troubles de la concentra-
tion, l’hyperactivité ou l’impulsivité est donc
impérative (tableau 1).
Troubles \bu comportement réactifs
La recherche de diagnostics différentiels ré –
vèle un autr e dilemme du diag nos tic de TDAH.
Est-ce que les troubles mentionnées dans le
tableau 1 sont effectivement des comorbidi –
tés, le TDAH étant le trouble premier, ou bien
ces maladies ou conditions sont au premier
plan et la sy mptomatologie TDAH est r éacti ve
ou secondaire?
Des troubles du comportement réactifs se
manifestent suite à différents troubles du
développement et dans des situations très
variées. Ainsi les enfants avec un trouble du
langage présentent souvent des difficultés à
maintenir l’attention, à planifier des gestes et
de l’autorégulation, parceque dépassés par
les exigences de communication. D’autres
circonstances où les enfants manifestent
souvent des troubles du comportement réac –
tifs typiques du TDAH, sont des situations
psychosociales difficiles suite à une maladie
psychique des parents, à une éducation ina –
déquate ou des conflits entre partenaires
26\b.
Une saisie précise des compétences de l’en
–
fant avec des tests de per formance est pour –
tant importante pour l’identification de dia –
gnostics différentiels (et comorbidités\b et la
planification des mesures thérapeutiques
(voir ci- dessous\b. Dans certains cas l’examen
de l’attention et des fonctions exécutives peut
s ’avér er utile ( avec cr ayon et papier ou à l ’aide
d’un ordinateur\b. L’examen somatique et neu-
rologique (y compris des organes des sens\b
complète les investigations. En présence de
signes d’autres troubles pédopsychiatriques
l’avis d’un spécialiste psychiatrique est con
–
sei
llé. On ne procédera à des examens com-
plémentaires comme l’EEG, l’IRM, les ana-
lyses de laboratoire ou les tests de com
–
pé
tences scolaires (lire, écrire, calculer\b qu’en
présence d’indices cliniques spécifiques (voir
tableau 1) .
Pendant la consultation l’examinateur évalue
le comportement de l’enfant de manière
structurée (figure 5). Cela permet de vérifier
si d’éventuels dysfonctionnements partiels
seraient responsables du comportement
anormal de l’enfant. Si l’enfant se conduit
normalement, on procède à une observation
de son comp or tement à l ’é cole ( enf antine \b , ce
qui permet d’apprécier les symptômes aussi
au contact avec d’autres enfants et adultes.
dans une étude publié e en 2012, le pr o ces sus
diagnostique de 50 pédopsychiatres et pé
–
diatres expérimentés et spécialisés dans le
TDAH en Belgique et Grande Bretagne
21 \b. Les
professionnels décrivent le processus dia –
gnostique comme extrêmement complexe,
incluant de nombreuses sources et résultats
d’examens. Seulement 14
% re
spectaient les
directives de prise en charge publiées ou des
critères clairement définis. Les expériences
de cas précédents, l’intuition du médecin, la
souffrance de l’enfant et l’attitude des pa –
rents jouaient un rôle d’autant plus impor-
tant
21 \b. En d’autres termes: le diagnostic n’est,
dans la pratique quotidienne et malgré des
dir ecti ves , pas unifor me et r este donc un g ros
défi pour les professionnels.
Procé\bé pratique
Nous décr i vons ci – apr ès la f açon de procé der
appliquée à la Policlinique de pédiatrie du
développement de la Clinique pédiatrique
uni
ver
sitaire de Zurich, un grand service am-
bulatoire suisse spécialisé dans la prise en
charge d’enfants avec des troubles du déve-
loppement et du comportement.
La base du diagnostic est une anamnèse
détaillée, englobant la description des pro –
blèmes actuels que l’enfant rencontre, de ses
forces et faiblesses, des antécédents de ma –
ladies, des jalons du développement ainsi que
l’anamnèse familiale et sociale. Cette der-
nière comprend notamment l’exploration des
conditions psychosociales comme d’éven –
tuelles maladies des parents, les particulari –
tés familiales, les ressources et le style d’inte –
raction et d’éducation. Sont aussi répertoriés
systématiquement les points essentiels du
DSM – 5 ou I CD -10. C es données sont complé –
tées par les questionnaires spécifiques pour
parents et enseignants (échelles de Conners
pour l’attention et le comportement, systè
–
mes
diagnostiques pour les troubles psy –
chiques de l’enfant et adolescent, Child Beha-
vior Checklist etc., voir
24 \b\b. Néanmoins il n’est
pas possible de poser un diagnostic unique –
ment par ces questionnaires. Ils sont utiles
pour apprécier et comparer le comportement
de l’enfant dans différentes situations et sa
description par différents observateurs (par
ailleurs un critère diagnostique obligatoire du
DSM-5\b.
On établit ensuite un profil des compétences
intellectuelles, langagières, neuromotrices et
sociales (détail du profil développemental
dans
25\b\b . C e profil ne p er met pas le diag nostic
de TDAH.
Pathologies somatiques Épilepsie ou autres maladies neurologiques
Hyp
erthyroïdie
Effets indésirables de médicaments
Troubles du développement/
de l’apprentissage Trouble du développement moteur
Trouble du développement du langage
Dyslexie, dyscalculie
Trouble du développement cognitif, déficit intellectuel
Trouble du spectre autistique
Troubles psychiatriques Trouble anxieux
Trouble de l’attachement
Désordre affectif
Trouble de stress post-traumatique
Schizophrénie
Lié à l’entourage Manque de stimulation ou surcharge
Mauvais traitements, négligence, privation
Maladie psychique des parents
Tableau 1: Troubles avec symptômes typiques du TDAH (diagnostics différentiels, non
exhaustifs).
Chères,ee hreseescol
Chères,h coh s, lg
H L
dans 29\b, comparé au traitement médicamen-
teux, DMS 0.91 30\b\b. Malgré cela des interven-
tions centrées sur l’enfant peuvent être utiles,
notamment la psychothérapie.
Mé\bicaments
Le traitement médicamenteux n’est pas in –
diq
ué en présence de symptômes de TDAH
modérés et qui ne se manifestent que dans
des situations spécifiques. Lorsque les trou
–
bl
es du comportement sont marqués, les
me
s ur
es mentionnées ci-dessus inefficaces,
la souffrance de l’enfant importante et que
des mesures mesures drastiques sont néces –
saires à l’école (p.
ex.
établissement spécia-
lisé\b, l’indication au traitement médicamen –
teux d’un TDAH est donnée (psychostimu
–
lan
ts et atomoxétine, voir plus d’informations
dans les recommandations
22\b , 23 \b \b. L’efficacité
à court et moyen terme de ces médicaments
est bien docu
me
ntée. Néanmoins des études
à long terme méthodiquement fiables
manquent à ce jour
31 \b. Les conditions pour le
traitement médicamenteux sont une expé-
r ience su f fis ante du mé de cin, un sui v i r égulier
et le maintien des mesures non-médicamen –
teuses déjà mises en place.
Conclusion
Le diagnostic d’un TDAH représente, dans la
pratique quotidienne, un grand défi, le TDAH
dépendant, en tant que trouble de type
spectre, aussi des attentes de l’entourage et
l’entourage (p.ex. attentes et style éducatif
des par ent s , conditions et at tentes de l ’école \b
peut sensiblement améliorer les comporte
–
ments inadéquats de l’enfant. Dans la pra-
tique quotidienne les interventions centrées
sur l’entourage consistent en conseils éduca –
tifs, coaching ou psychothérapie des parents
et information des enseignants
28 \b. Une atten –
tion particulière doit être portée aux inter
–
actio
ns adultes-enfant souvent négatives
qui augmentent la souffrance de l’enfant et
compromettent son bien-être.
Interventions centrées sur l’enfant
Les interventions centrées sur l’enfant visent
à améliorer son estime de soi, le contrôle de
son affectivité et de son comportement, de
ses compétences sociales, de fonctions co –
gnitives et motrices spécifiques, de stratégies
et techniques d’apprentissage et finalement
le traitement de troubles associés. Une large
méta-analyse a soumis récemment à un
examen approfondi six groupes d’interven –
tions non-pharmacologiques pour le TDAH
(traitement comportemental, entrainement
neuropsychologique, neuro-feedback, com –
pléments en oméga-3, régimes de restriction
et élimination d’additifs alimentaires\b. Globa –
lement l’efficacité empirique de ces mesures
non-médicamenteuses a été, dans les études
ayant un st andar d scienti fique élevé, mo deste
(différence moyenne standardisée (DMS\b
entre groupes de contrôle et d’intervention
entre 0.02 et 0.51, selon le groupe, figure 3
Ces enfants ne doivent pas être diagnostiqués
de TDAH.
L’étape la plus difficile du diagnostic clinique
de TDAH est l’intégration des constatations
et observations en un tableau synthétique,
décrivant au mieux la réalité de l’enfant. Les
recommandations de prise en charge sont
trop peu opérationnelles et donc peu utiles.
Les constats ne sont pas simplement addi
–
tionnés, mais l’examinateur construit une
syn
th
èse de ses observations en incluant les
expériences tirées de cas précédents.
On considère, outre les modèles d’explication
subjectifs des parents, aussi la souffrance
de l ’enfant qui résulte de l ’image de soi néga
–
ti
ve, de l’isolement social et de l’expérience
d’échec chronique. L’analyse complète exige
aussi, dans le cas particulier, de s’interroger
si le diagnostic est dans l’intérêt de l’enfant
et quels avantages (p.
ex.
accès à des sou-
tiens spécifiques, financement, soulagement
du sen
ti
ment de culpabilité des parents\b et
risques (p.
ex
. stigmatisation, erreur diagnos –
tique\b comporte la classification du trouble.
Mesures
L’indication à des mesures et traitements
spécifiques dépend moins de la présence et
de l’ampleur des troubles décrits dans le
DSM – 5 ou ICD -10 que de la souf france ef fec –
tive de l’enfant. Ce qui signifie que le seuil
d’intervention dépend fortement des attentes
et conditions cadre de l’entourage. Dans un
premier temps devraient donc toujours être
mis en œuvre des interventions centrées sur
l’entourage. Pour cela un diagnostic formel
n’est pas nécessaire.
Interventions centrées
sur l’entourage
En règle générale il faut approcher l’entourage
au mieux aux particularités individuelles de
l’enfant et ne pas simplement éliminer les
symptômes dérangeants. Le modèle des pé –
dopsychiatres Alexander Thomas et Stella
Chess décrit que les enfants développent
des troubles du développement notamment
lorsque leurs besoins, capacités et particula –
rités ne sont pas en adéquation avec les
comportements et les attentes de leur entou –
rage
27\b.
La prémisse pour une concordance est que
parents, enseignants et autres professionnels
connaissent ce que l’enfant sait bien faire,
quelles sont ses forces et quels ses besoins
et où se trouvent ses déficits. L’adaptation de
Comportement
Examen Anamnèse
Test de
performanceMotricité
Jeu libre
Agitation motrice
Distractibilité
Impulsivité
Manque de tolérance
à la frustration
Troubles du contact,
de l’attachement
Absence de coopération
Manque d’assurance/
anxiéte
Département de pédiatrie du développement
Clinique pédiatrique de Zurich
( 0 = absent; + = discret; ++ = marqué ; +++ = très marqué\b
A = Anamnèse ; B = Text de per formance psychologique ; C = Neuromotricité, clinique ; D = Jeu libre Approche en cas de suspicion de TDA- H
Évaluation du comportement pendant l’examen et évaluation psychopathologique
Nom ………… Prénom ………… Date de naissance …………. Date de l’examen …………
A
ge …….
Figure 5: Observation du comportement pendant l’examen (avec l’aimable autorisation de
Caroline Benz, Département pédiatrie du développement, Clinique pédiatrique de Zurich)
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Prof. PRTaPR. Rbi
H M
24) Döpfner M, Lehmkuhl G, Steinhausen H-C. Auf-
me rksamkeitsdefizit-Hyperaktivitätsstörungen.
Kinderdiagnostiksystem (KIDS). Göttingen: Hogre –
fe, 2006.
25)
Jen
ni O, Benz C, Latal B. Wenn die kindliche Ent –
wicklung nicht im Gleichschritt verläuft – Kinder
mit Entwicklungsauffälligkeiten besser verstehen.
Pädiatrie up2date 2011; 2: 199–228.
26)
Bod
enmann G. Lehrbuch Klinische Paar- und Fami –
lienpsychologie. Bern: Verlag Hans Huber, 2013.
27)
Che
ss S, Thomas A. Origins and Evolution of Beha –
vior Disorders. New York: Brunner/Mazel, 1984.
28)
Eva
ns SW, Owens JS, Bunford N. Evidence -based
psychosocial treatments for children and adole –
scents with attention-deficit/hyperactivity disor –
der. J Clin Child Adolesc Psychol 2014; 43: 527–551.
29)
Son
uga- Barke EJ, Brandeis D, Cortese S, et al.
Nonpharmacological interventions for ADHD: sys –
tematic review and meta-analyses of randomized
controlled trials of dietary and psychological treat –
ments. Am J Psychiatr y 2013; 170: 275–289.
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Correspondance
Prof. Dr. med. Oskar Jenni,
Abteilung Entwicklungspädiatrie
Universitäts-Kinderspital Zürich
Steinwiesstrasse 75
8032 Zürich
oskar.jenni @ kispi.uzh.ch
L’auteur certifie qu’aucun soutien financier ou
autre conflit d’intérêt n’est lié à cet article.
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est posé après un examen extensif de l’enfant
et une exploration minutieuse de l’entourage.
Il f aut not amment pr endr e en compte la sou f –
france de l’enfant. Le cas clinique individuel
nécessite une évaluation approfondie de la
question si le diagnostic est effectivement
dans l’intérêt de l’enfant et quels avantages
et inconvénients lui apporte la classification
de son trouble.
Remerciements
Je remercie les collègues du Département pédiatrie du
développement de la Clinique pédiatrique de Zurich
pour leurs précieux commentaires.
Cet article est paru dans un format open access dans
le mensuel Kinderheilkunde, 10.1007/s00112-015-
0030 – 6, avril 2016, vol. 164, édition 4, 1–7, publié on –
line le 29 janvier 2016.
Open Access This article is distributed under the terms of the Crea –
tive Commons Attribution 4.0 International License
which permits unrestricted use, distribution, and re –
production in any medium, provided you give appro –
priate credit to the original author(s) and the source,
provide a link to the Creative Commons license, and
indicate if changes were made.
( http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/ )
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Informations complémentaires
Auteurs
Prof. Dr. med. Oskar Jenni , Abteilung Entwicklungspädiatrie, Universitäts-Kinderspital Zürich, Steinwiesstrasse 75, 8032 Zürich Andreas Nydegger