Objectifs : la pandémie de la Covid-19 a eu de nombreuses répercussions sur les populations. Au travers de cette étude, nous cherchons à comprendre quelles sont les connaissances concernant le virus Sars-CoV2 ainsi que son impact dans la population migrante pédiatrique de Genève et leur famille. Nous étudierons également les répercussions sur l’accès aux soins et les difficultés perçues par les familles pendant cette période.
Méthodes : nous avons recruté 28 familles suivies à la consultation pédiatrique santé- migrants des hôpitaux universitaires de Genève et leurs avons fait passer un questionnaire en fin de consultation. Nous avons inclus uniquement les familles qui étaient arrivées à Genève au plus tard en janvier 2020.
Résultats : nos résultats montrent que seulement 11% de la populations interrogées a renoncé à des soins à cause de la pandémie de la Covid-19. 63% des parents questionnés ne se sont pas sentis plus isolés que d’habitude pendant cette période de crise. 50% des parents ont rencontré des difficultés à s’occuper de leurs enfants pendant la fermeture de l’école et 2/3 n’ont pas réussi à les aider avec l’école à la maison. 78% des enfants et des parents ont bien compris comment le virus se transmet, 96% des enfants et 94% des parents recrutés connaissent les gestes de protection.
Conclusion : cette étude met en évidence la fonction centrale de l’école dans la vie des familles interrogées, tant dans l’apprentissage, dans l’occupation du temps, que dans l’aide apportée aux parents dans l’éducation. Nous avons également découvert que la majorité des enfants et des parents questionnés avaient une bonne compréhension de la situation, quels étaient les risques et comment s’en protéger. Cependant, les enfants avaient une meilleure connaissance que leurs parents. Enfin, nous avons constaté que la population migrante souvent décrite comme stigmatisée n’avait pas renoncé à des soins pendant la pandémie.
Mémoire de master en médecine
Perceptions et répercussions de la
crise de la Covid -19 sur les familles
requérantes d’asile à Genève
Yaëlle Aeschimann, étudiante en médecine, UNIGE
Directrice : Noémie Wagner, médecin adjointe, Unité des maladies infectieuses
pédiatriques HUG
Juin 2022
1
Table des matières
Abstract …………………………………………………………………………………………………………. 2
Introduction …………………………………………………………………………………………………….. 2
Méthode ………………………………………………………………………………………………………… 4
Résultats ……………………………………………………………………………………………………….. 5
Discussion ……………………………………………………………………………………………………… 9
Justificatif et limitations …………………………………………………………………………………… 10
Conclusion …………………………………………………………………………………………………… 10
Bibliographie …………………………………………………………………………………………………. 11
Annexe 1 ……………………………………………………………………………………………………… 12
Annexe 2 ……………………………………………………………………………………………………… 13
2
Abstract :
Objectifs : la pandémie de la Covid- 19 a eu de nombreuses répercussions sur les
populations. Au travers de cette étude, nous cherchons à comprendre quelles sont les
connaissances concernant le virus Sars -CoV2 ainsi que son impact dans la population
migrante pédiatrique de Genève et leur famille. Nous étudierons également les répercussions
sur l’accès aux soins et les difficultés perçues par les familles pendant cette période.
Méthodes : nous avons recruté 28 familles suivies à la consultation pédiatrique santé-
migrants des hôpitaux universitaires de Genève et leurs avons fait passer un questionnaire en
fin de consultation. Nous avons inclus uni quement les familles qui étaient arrivées à Genève
au plus tard en janvier 2020.
Résultats : nos résultats montrent que seulement 11% de la populations interrogées a
renoncé à des soins à cause de la pandémie de la Covid -19. 63% des parents questionnés ne
se sont pas sentis plus isolés que d’habitude pendant cette période de crise. 50% des parents
ont rencontré des difficultés à s’occuper de leurs enfants pendant la fermeture de l’école et 2/3
n’ont pas réussi à les aider avec l’école à la maison. 78% des enfants et des parents ont bien
compris comment le virus se transmet, 96% des enfants et 94% des parents recrutés
connaissent les gestes de protection.
Conclusion : cette étude met en évidence la fonction centrale de l’école dans la vie de s
familles interrogées, tant dans l’apprentissage, dans l’occupation du temps, que dans l’aide
apportée aux parents dans l’éducation. Nous avons également découvert que la majorité des
enfants et des parents questionnés avaient une bonne compréhension de l a situation, quels
étaient les risques et comment s’en protéger. Cependant, les enfants avaient une meilleure
connaissance que leurs parents. Enfin, nous avons constaté que la population migrante
souvent décrite comme stigmatisée n’avait pas renoncé à des soins pendant la pandémie.
Introduction :
L’année 2020 a été marquée par la pandémie de la Covid- 19 et ses conséquences non
seulement sur la santé mais aussi économiques et sociales.
Les personnes déjà affectées par des conditions de vie précaires (problèmes financiers,
situations professionnelles instables, permis de séjour en attente, logement inadaptés, …) ont
été tout particulièrement touché dans leur qualité de vie.
Parmi ces populations fragiles, il y a les migrants et les réfugiés, particulièrement
vulnérables. Ils représentent environ une personne sur 7 dans le monde (1). Souvent
stigmatisées par ceux même qui les accueillent, ils ont été parfois accusés de répandre la
Covid (2). Au vu des conditions difficiles dans lesquelles ils s e trouvent, ces populations ont
été très touchées par la contamination du virus. Les logements communautaires et la
promiscuité augmentent le risque de transmission. La précarité économique rend le respect
de certaines mesures plus difficiles comme éviter les transports publics ou sortir de chez soi
(1). La population migrante exerce souvent des emplois où il n’est pas possible d’effectuer du
télétravail, comme l’entretien ou la maintenance (3), ce qui les expose d’avantage au virus.
Bien que ce soit une population plus jeune en moyenne que la population indigène, le taux
de mortalité chez les immigrés a été plus élevé au printemps 2020 qu’à la même période en
2019 (3). Les familles de sans -abris avec enfants présentent plus de maladies telles que
l’asthme, des maladies respiratoires ou infectieuses, de la malnutrition ou de l’obésité (4). De
plus, le manque de moyens financiers, la peur du renvoi dans son pays d’origine, la barrière
3
de la langue et le manque de couverture par une assurance maladie, peuvent prétériter l’accès
aux soins (1,3,5).
D’autre part, la pandémie a un fort impact psychologique. On constate une augmentation
des émotions négatives dans la population. Une étude menée aux Etats -Unis rapporte que
45% des adultes américains voient leur santé mentale impactée négativement, dû au stress
et à l’inquiétude face à la Covid- 19 (6). Les principaux symptômes décrits sont l’anxiété, la
dépression, les attaques de panique, la peur de la contagion, la consommation d’alcool ai nsi
que les problèmes de sommeil (6). Une étude menée par le programme santé et migration de
l’Organisation Mondiale de la Santé a montré que la santé mentale des migrants est aussi en
péjoration depuis le début de la crise. Une explosion des symptômes décrits précédemment a
été constatée, auxquels s’ajoute un sentiment très fort de solitude (1). Ces différents
symptômes ressentis pourraient avoir un effet délétère sur le système immunitaire, le rendant
moins performant, augmentant l’inflammati on et aggravant la vulnérabilité face à la maladie
(7).
Les enfants et adolescents sont souvent les oubliés de la pandémie car ils sont moins
sévèrement atteints par la maladie. Cependant, ils en subissent intensément les
conséquences. En effet, UNICEF s’ attend à voir dans les pays en développement un
basculement de 142 millions d’enfants en plus dans la pauvreté, menant à un total de 725
millions d’enfants dans le monde (8). Selon l’OCDE, 1 enfant sur 7 vivant dans ses pays
membres grandit dans la pauvret é (4), et 1 enfant sur 5 n’est soit pas né dans le pays où il
réside, soit un de ses parents est immigré. Parmi ces familles -là, près de la moitié des enfants
vivent sous le seuil de pauvreté, un nombre deux fois plus élevé que chez les familles natives
(4). Dans les pays européens de l’OCDE, un tiers des immigrés ne connaissent que très peu
la langue. L’école à la maison, conséquence du confinement, ne peut être gérée par des
parents ne comprenant pas la langue (4). La fermeture des écoles a impacté 1,6 milliards
d’enfants, dont 1/3 n’a pas été capable du tout de suivre l’école à la maison (8). Les difficultés
d’accès à l’éducation étaient présentes avant la crise, mais le fossé a considérablement
augmenté.
L’accès à l’information est primordial durant la pandémie actuelle. Les enfants ayant accès
à l’information facilement ont tendance à moins présenter de symptômes tels que l’anxiété, la
dépression ou de syndrome de stress posttraumatique (9). Pour beaucoup d’enfants, l’école
n’est pas seulement un lieu d’apprentissage. C’est également un accès à la nourriture ou à
des services de soutiens psychologiques. Aux Etats -Unis, en 2014, il a été estimé qu’environ
13% des jeunes ont reçu des soins psychologiques à l’école, que ce soit avec un clinicien sur
place ou parce qu’ils font partie de programmes spéciaux pour cause de problèmes émotionnel
ou de comportement (10). Bien que certaines écoles aient mis en place des téléconsultations
psychologiques, peu d’enfants bénéficient d’un espace de tranquillité à la maison pour pouvoir
parler ou se confier (10).
Ces périodes sans écoles ont entraîné une diminution de l’activité physique des enfants,
une augmentation du temps passé devant les écrans, un sommeil irrégulier et une diététique
moins appropriée (11). Plus dommageable encore, on note durant le confinement une
augmentation de la violence à la maison, des abus, et une incapacité de pouvoir chercher de
l’aide, les services de prévention ayant été fermés (8). De plus, l’isolement de membres de la
famille testés positifs a créé des séparations de longue durée entre les enfants et leurs parents.
Ces séparations peuvent mener au développement de problèmes psychologiques chez
l’enfant ou l’adolescent (12).
En outre, le touché est essentiel au bon développement cognitif et émotionnel, à
l’attachement, aux relation s avec autrui et même à la régulation physiologique de réponse au
stress. Les relations virtuelles mises en place à cause des mesures de distanciation physique
ne contribuent pas au développement harmonieux des individus (11).
4
Le confinement a également coupé les populations du contact avec la nature, qui permet
de développer une bonne santé mentale et physique, une maturation cognitive, une
amélioration de la communication et des compétences sociales et l’augmentation du self –
control (11). Le manque d’exposition au soleil et des taux de vitamine D bas sont associés à
des problèmes de santé publique tels que les maladies cardiovasculaires, les syndromes
métaboliques, l’hypertension, le diabète, l’autisme, etc. (11).
La crise de la Covid-19 a par ailleurs mis à mal les programmes de prévention et les
structures de santé. Par exemple, la vaccination des enfants sauve 2 à 3 millions de vies
chaque année, mais en 2020, 14 millions d’enfants n’ont pas reçu leurs vaccins (8).
Les migrants et les réfugiées de par leur situation cumulent au quotidien plusieurs facteurs
de vulnérabilité, et la pandémie a aggravé leur situation. Dans ce contexte si particulier, nous
souhaiterions étudier les répercussions de cette crise sanitaire sur les difficultés d’accès aux
soins, l’impact psychosocial ainsi que les connaissances sur le virus des familles suivies à la
consultation santé- migrants pédiatrique des HUG.
Méthode :
Pour faire cette étude constituée de deux questionnaires, nous avons recru té des
patients suivis à la consultation santé -migrants pédiatrique des HUG. Lorsque la famille
donnait son accord au médecin, nous pouvions remplir le questionnaire avec eux en fin de
consultation en présence d’un interprète.
Le premier questionnaire (annexe 1), destiné aux parents, évalue les difficultés d’accès
aux soins rencontrés pendant le temps de la pandémie, son impact psychologique ainsi que
leur connaissance globale concernant le virus Sars -CoV2.
Le deuxième questionnaire (annexe 2), était distr ibué aux enfants de plus de 5 ans qui
acceptaient de répondre. Les questions portent sur les mêmes thématiques que celui des
parents, hormis les difficultés d’accès aux soins.
Cette étude a été acceptée par la commission cantonale d’éthique de la recherche de
Genève, project -ID 2021 -00777.
Pour la revue de littérature, nous avons recherché les études faites sur les conséquences
de la crise de la Covid -19 sur les populations migrantes et pédiatriques en utilisant les moteurs
de recherches suivant : pubmed, medline ainsi que google, avec les mots clés : psychological
impact, mental health, coronavirus, Covid- 19, socio-economic implication, quality of life,
wellness, emotionnal stress, children.
Pour les résultats, nous avons utilisé excel comme systèm e de traitement des données et
nous les avons analysés de façon descriptive.
5
7% 4% 18%
7%
4%
4%
7%
30%
19%
Afghanistan
Erythrée
Syrie
Mongolie
Arménie
Iraq
Turquie
Philippines
Somalie
4% Appartement
22% CHC
hospice général
4%
4% foyer 66%
caravannes sans
frontières
Résultats :
Le questionnaire a été rempli par 27 parents ainsi que 16 enfants, âgés de 5 à 14 ans,
entre octobre 2021 et janvier 2022. La plupart des familles étaient d’origine afghane,
érythréenne ou syrienne, mais nous en avons également rencontré venant de la Mongolie, de
l’Arménie, de l’Iraq, de la Turquie, des Philippines et de la Somalie (figure 1).
Les familles vivent à Genève depuis 2 à 11 ans, et 70% des participants sont arrivés il
y a 5 ans ou moins. Leur statut est variable : détenteur d’un permis de séjour (permis B), d’un
permis d’établissement (permis C) ou d’une admission à titre provisoire (permis F), demandeur
d’asile ou sans papier (figure 2).
La majorité des familles sont logées dans des appartements, quelques -unes vivent en
foyer, et certaines dans des centres d’hébergement collectif (CHC), à l’hospice général ou
alors avec Caravanes Sans Frontières (figure 3).
Figure 1 : pays d’origine
Figure 2 : statut
Figure 3 : lieu de vie
4% 4%
18% Demande d’asile
44% Sans papier
Permis B
Permis C
Permis F
30%
6
Accès aux soins :
Ces questions étaient posées aux parents uniquement. Seulement 11% des familles
ont renoncé à des soins (aller à l’hôpital, chez le médecin ou autre) en raison de la situation
liée à la pandémie. Sur les 63% des participants qui ont présenté des symptômes typiques de
la Covid -19 (fièvre, toux, rhume), 88% se sont fait tester. 85% des parents savaient que les
tests nasopharyngés étaient pris en charge par la confédération lorsqu’on présentait des
symptômes.
PARENTS
accès aux soins
oui non
symptômes 63% 37%
si oui, testé ? 88% 12%
test gratuit 85% 15%
renoncé à des soins 11% 89%
impact psychologique
mauvais souvenirs 48% 52%
peur attraper virus 50% 50%
moins pareil un peu beaucoup
sentiment isolement 0% 63% 22% 15%
ENFANTS
impact psychologique oui non
mauvais souvenirs 13% 88%
manque école 63% 38%
peur pour la famille 50% 50%
moins pareil un peu beaucoup
peur 6% 56% 31% 6%
sentiment isolement 6% 56% 25% 13%
école assistante sociale media famille
explications 75% 13% 6% 6%
Tableau 1 : résultats concernant l’accès aux soins et l’impact psychologique
7
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Impact psychologique sur les parents :
63% des parents ne se sont pas sentis plus isolés que d’habitude pendant la période
de la pandémie. 50% disent avoir craint d’attraper le virus, et cette situation remémore de
mauvais souvenirs chez 48% des parents, alors qu’on retrouve ce sentiment chez seulement
13% des enfants.
Globalement, les parents ne racontent pas avoir vécu des difficultés pendant cette période.
Cependant, 50% ont eu du mal à s’occuper de leurs enfants depuis le début de la pandémie.
De plus, 66% de ceux qui avaient des enfants en âge scolaire n’ont pas été en mesure de les
aider pour les apprentissages lorsque l’école a fermé ses portes entre mars et mai 2020.
Figure 4 : Pourcentage de parents ayant rencontré des difficultés dans différents domaines
Impact psychologique sur les enfants :
63% des enfants en âge scolaire étaient tristes de la fermeture de l’école pendant la
première vague de la Covid- 19. Environ un quart des enfants ont ressenti plus de peur et
d’isolement qu’avant la crise, alors que la majorité (56%) d’entre eux n’ont pas senti de
différence.
La grande majorité des enfants (75%) ont reçu les explications concernant le virus – sa
transmission et comment s’en protéger – par leurs enseignants à l’école, quelques -uns par leur
assistante sociale et une très faible minorité par la famille ou les médias.
8
Connaissances du virus : Est-ce que je peux attraper le virus :
En faisant un clin ? vrai / faux / je ne sais pas
En parlant au téléphone ? vrai / faux / je ne sais pas
Par la nourriture ? vrai / faux / je ne sais pas
En buvant dans le même verre ? vrai / faux / je ne sais pas
Si j’attrape le virus :
Je peux tousser ? vrai / faux / je ne sais pas
Je peux avoir la fièvre ? vrai / faux / je ne sais pas
Je perds mes cheveux ? vrai / faux / je ne sais pas
Je me protège du virus
En me lavant les mains ? vrai / faux / je ne sais pas
En restant loin des personnes avec qui je parle ? vrai / faux /
je ne sais pas
En toussant dans mon coude ? vrai / faux / je ne sais pas
100%
80%
60%
40%
20%
0%
parents enfants
Connaissance du virus :
Les questions liées à la connaissance du virus étaient similaires chez les parents et les
enfants (figure 5). Globalement, on retrouve dans les familles une bonne compréhension du
virus : sa propagation, ses symptômes et les moyens pour s’en protéger. En effet, 78% des
enfants et des parents ont bien compris comment le virus se transmet, avec un moins grand
consensus sur la question concernant la transmission du virus par la nourriture.
Figure 5 : questions concernant la connaissance du virus
Figure 6 : pourcentage de réponses justes concernant la connaissance du virus Sars -CoV2 chez les enfants et parents
Aux questions posées : la Covid peut -elle provoquer de la fièvre, faire tousser, faire
perdre ses cheveux, 80% des parents et 92 % des enfants ont répondu correctement (figure
6). 15% des parents contre seulement 6% des enfants pensent qu’on peut perdre ses cheveux
en tombant malade. 100% des enfants savent que la fièvre est l’un des symptômes classiques
contre 93% des parents. Les gestes de protection étaient bien compris par 94% des parents
et 96% des enfants, avec une compréhension à 100% de la part des enfants sur la protection
par le lavage des mains et tousser dans le coude.
9
Discussion :
La crise de la Covid a généré plusieurs périodes de confinement. Comme le montre
une étude réalisée en Suisse : le sentiment d’isolement a été en nette augmentati on dans la
population pendant ces périodes d’isolation sociale obligatoire (13). Cependant, nos résultats
montrent que la population migrante étudiée n’a majoritairement pas ressenti d’augmentation
de son sentiment d’isolement pendant toute cette période. En effet, 63% des parents déclarent
ne pas s’être senti plus isolé que d’habitude. C’est une tendance qu’on retrouve aussi chez
les enfants. On peut se demander si l’impact de la pandémie a été plus faible car il s’agit d’une
population déjà souvent isolée.
Durant cette période de pandémie, les structures de soins ont observé dans le monde
entier une diminution du nombre de consultation (14). Une revue sur le sujet décrit notamment
que les populations stigmatisées à la base ou de niveau soci o-économique plus bas sont
particulièrement touchées (14). Ce constat ne se vérifie pas dans notre échantillon genevois.
Nos résultats montrent que l’école joue un rôle central dans la vie des enfants parmi
les familles étudiées. Premièrement, la majorité des enfants en âge scolaire questionnés
déclarent que l’école leur a manqué pendant la période de confinement du printemps 2020.
L’école est un lieu de socialisation majeur. Pour la population migrante, c’est un outil essentiel
pour créer des liens et s’intégrer en apprenant la langue du pays. Les enfants que nous avons
rencontrés parlaient souvent bien mieux le français que leurs parents.
Deuxièmement, l’école représente un moyen de garde des enfants et permet aux parents
de préserver du temps pour les activités. Ainsi, la moitié des parents qui avaient des enfants
en âge scolaire lors de la fermeture des écoles déclarent avoir rencontré des difficultés pour
s’en occuper pendant des journées entières.
De plus, 2/3 des parents n’ont pas réussi à aider leurs enfants avec les devoirs à la maison.
En effet, l’ensemble des familles interrogées ne parlent pas le français à la maison et les
parents en comprenaient juste quelques mots. Ainsi, il est difficile d’aider son enfant avec ses
devoirs lorsque la langue d’explication n’est pas comprise. Pour quelques familles
questionnées, les enfants plus âgées de la fratrie aidaient leurs petits frères ou petites sœurs.
Enfin, le rôle éducationnel de l’école est bien représenté dans cette situation. La grande
majorité des enfants déclarent avoir reçu les explications concernant le coronavirus, la
protection, etc. par leurs professeurs à l’école. Ce rôle est bien représenté lorsqu’on compare
les résultats sur la connaissance du virus. En effet, pour la majorité des questions, les enfants
répondent plus justement que leurs parents. Ils sont particulièrement au clair quand il s’agit de
répondre aux questions : le virus peut -il se transmettre en faisant un câlin ? peut -il provoquer
de la toux ? peut -on s’en protéger en se lavant les mains ? Ces différences parents -enfants
montrent que ces derniers ont acquis leurs connaissances or du milieu familial. On peut
également remarquer que le plan de protection est mieux compris par les enfants que par leurs
parents dans notre échantillon.
10
Justificatif et limitations :
La pédiatrie est un domaine qui m’intéresse depuis toujours et je pense m’engager
dans cette voie là pour mon internat. Au moment du choix du thème pour le travail de master,
il m’a été proposé plusieurs sujets en pédiatrie. Mon choix s’est porté sur ce sujet pour
plusieurs raisons : c’était une belle occasion d’aller à la rencontre de ces populations et pouvoir
discuter et partager avec les migrants en profitant d’un interprète ; je souhaitais pouvoir faire
une étude dans sa totalité ; on était en pleine pandémie et ça m’a donné envie de travailler sur
ce sujet.
Malgré les efforts déployés pour provoquer des échanges avec la population migrante, le
temps que nous avions à disposition ne nous a pas permis de rencontrer autant de familles
que prévu ce qui diminue la puissance de notre étude. En effet, nous étions dépendants des
horair es de la consultation santé- migrant, de la volonté des familles, de la disponibilité d’un
traducteur et bien souvent, les enfants suivis en consultations étaient trop jeunes pour
répondre au questionnaire donc nous ne parlions qu’avec les parents.
Conclusion :
Cette étude avait pour but de définir quelle est la compréhension et la répercussion de
la pandémie de la Covid sur les enfants migrants de Genève et leurs familles. En questionnant
27 parents ainsi que 16 enfants, le rôle de l’école apparait comme primordial dans la vie des
enfants interrogés ainsi que l’aide que cette dernière apporte aux parents tant dans l’éducation
que dans l’occupation des enfants pendant une grande partie de la journée.
De plus, nous avons constaté que les informations concernant la Covid, ses symptômes
et les moyens de s’en protéger étaient bien transmis aux populations migrantes étudiées, la
connaissance du virus était donc assez bonne. Bien que ce soient des populations assez
stigmatisées et isolées, la pandémie ne les a pas empêchés de consulter une structure de
soins s’ils en avaient besoin.
11
Bibliographie :
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http://www.oecd.org/coronavirus/policy -responses/combatting -covid -19 -s -effect -on -children -2e1f3b2f/
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10. Golberstein E, Wen H, Miller BF. Coronavirus Disease 2019 (COVID -19) and Mental Health for Children and
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11. de Figueiredo CS, Sandre PC, Portugal LCL, Mázala- de-Oliveira T, da Silva Chagas L, Raony Í, et al. COVID -19 pandemic
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12. Singh S, Roy D, Sinha K, Parveen S, Sharma G, Joshi G. Impact of COVID -19 and lockdown on mental health of
children and adolescents: A narrative review with recommendations. Psychiatry Res. 1 nov 2020;293:113429.
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14. Pujolar G, Oliver -Anglès A, Vargas I, Vázquez ML. Changes in Access to Health Services during the COVID -19
Pandemic: A Scoping Review. Int J Environ Res Public Health. 3 févr 2022;19(3):1749.
12
Annexe 1
Date de la rencontre :
Langue parlée :
Pays d’origine :
Date d’arrivée à Genève :
Lieu de vie :
Statut :
Accès à la santé :
Numéro de la visite
– Avez -vous eu des symptômes comme le rhume, la toux, fièvre pendant cette année ?
oui/non
o Si oui, êtes -vous allés vous faire tester ? oui / non
o Si non, qu’est -ce qu’il vous en a empêché ?
– Savez -vous que le dépistage Covid-19 est gratuit ?
oui / non
– Avez -vous renoncé à des soins (autre que le COVID) depuis le début de l’épidémie ?
oui / non
Impact psychologique :
– Depuis le début de la pandémie, vous êtes -vous senti isolé ?
moins que d’habitude / la même chose que d’habitude / un peu plus que d’habitude / beaucoup plus que
d’habitude
– Avez -vous eu peur d’attraper le virus ? oui / non
– Est -ce que la situation vous a rappelé de mauvais souvenirs ? oui / non
– Avez -vous traversé des difficultés ?
o Psychologique (angoisse, dépression) ? oui / non
o au niveau financier ?
oui / non
o pour les fournitures alimentaires ?
oui / non
o pour occuper vos enfants ?
oui / non
o pour aider vos enfants pour l’école à la maison ?
oui / non
Connaissances du virus :
– Est -ce que je peux attraper le virus :
o En faisant un câlin ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En parlant au téléphone ? vrai / faux / je ne sais pas
o
Par la nourriture ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En buvant dans le même verre ? vrai / faux / je ne sais pas
– Si j’attrape le virus :
o Je peux tousser ? vrai / faux / je ne sais pas
o
Je peux avoir la fièvre ? vrai / faux / je ne sais pas
o
Je perds mes cheveux ? vrai / faux / je ne sais pas
– Je me protège du virus
o En me lavant les mains ? vrai / faux / je ne sais pas
o En restant loin des personnes avec qui je parle ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En toussant dans mon coude ? vrai / faux / je ne sais pas
13
Annexe 2
Date de la rencontre :
Age de l’enfant :
Pays d’origine :
Langue parlée :
Date d’arrivée à Genève :
Lieu de vie :
Impact psychologique :
Numéro de la visite
– Depuis le début de la pandémie, est -ce que tu t’es senti isolé ?
moins que d’habitude / la même chose que d’habitude / un peu plus que d’habitude / beaucoup plus que
d’habitude
– Est -ce que tu as eu peur ?
moins que d’habitude / la même chose que d’habitude / un peu plus que d’habitude / beaucoup plus que
d’habitude
– Est -ce que l’école t’a manqué ? oui/non
– Est -ce que la situation t’a rappelé de mauvais souvenirs ? oui/non
– Est -ce que tes frères et sœurs, tes parents ont peur ? oui/non
Connaissances du virus :
– Qui t’a expliqué ce que c’était et à quoi il fallait faire attention ?
famille/amis/maitresse/média
– Est -ce que je peux attraper le virus :
o En faisant un câlin à mon copain/ma copine ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En parlant au téléphone ? vrai / faux / je ne sais pas
o Par la nourriture ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En jouant au même jeu ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En buvant dans le même verre à la cantine ? vrai / faux / je ne sais pas
– Si j’attrape le virus :
o Je peux tousser ? vrai / faux / je ne sais pas
o
Je peux avoir la fièvre ? vrai / faux / je ne sais pas
o
Je perds mes cheveux ? vrai / faux / je ne sais pas
– Je me protège du virus
o En me lavant les mains ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En restant loin des copains ? vrai / faux / je ne sais pas
o
En toussant dans mon coude ? vrai / faux / je ne sais pas
Informations complémentaires
Correspondance:
Auteurs
Madame Yaëlle Aeschimann , étudiante en médecine, Université de Genève, Genève Dr. med. Noémie Wagner , Médecin adjointe, Unité des maladies infectieuses pédiatriques HUG, Genève