La vitamine D est une vitamine liposoluble. Elle provient à 80–90% de la biosynthèse cutanée sous l’effet du rayonnement ultraviolet. Seuls 10–20% de la vitamine D proviennent d’une source exogène, via l’absorption d’aliments riches en vitamine D. A cet égard, elle se comporte plus comme une hormone que comme une vitamine.
16
AlimentsQuantitéTeneur en vitamine D (UI)
Huile de foie de morue 15 m l14 0 0
Saumon frais sauvage 100 g600–1000
Saumon d’élevage 100 g10 0 –250
Sardine, hareng, thon en boîte 100 g224–332
Champignons chiitake secs 100 g160 0
Bolets/morilles séchés 100 g13 0
Margarine 15 ml (1 cuillère à soupe)6 5 –11 0
Beurre 100 g50
J a u n e d ’œ u f 140
Yo g o u r t 100 g89
Fromage à pâte dure 100 g44
Parmesan 100 g28
Ta b l e a u 1: Aliments naturellement riches en vitamine D Enfin, l’application d’une crème solaire avec
un indice de 30 peut réduire la synthèse de
plus de 95%
5).
Alimentation
Il existe deux formes de vitamine D alimen-
taire: la vitamine D2 ou ergocalciférol syn –
thétisée par les plantes, et la vitamine D3 ou
cholécalciférol d’origine animale, dotée
d’une efficacité trois fois plus importante
que la vitamine D2. Les aliments les plus
riches en vitamine D sont des produits peu
courants dans l’alimentation quotidienne
des enfants (Tableau 1).
En ce qui concerne les produits laitiers, le
lait entier est le seul lait qui contient de la
vitamine D dans sa partie lipidique (1 L = 30
UI) du fait de la nature liposoluble de celle-
ci. A titre d’exemple, pour atteindre l’équi –
valent de 200 UI de vitamine D, un individu
devrait ingérer à la fois 1 verre de lait entier,
1 pot de yogourt, 30 à 60 g de fromage et
20 g de beurre, et par conséquent le triple
pour atteindre les 600 UI journalières re –
commandées actuellement.
Contrairement à la Suisse et aux pays euro –
péens, les USA et le Canada ont adopté une
politique d’enrichissement en vitamine D de
certains aliments comme le lait de vache
(400 UI/L), le jus d’orange (400 UI/L), la
margarine, les céréales, les yogourts et
certains fromages.
Le lait maternel, quant à lui, est pauvre en
vitamine D et dépend également du statut
vitaminique de la mère (28–70 UI/L, en
moyenne 40 UI/L). Les nourrissons allaités
Introduction
La vitamine D est une vitamine liposo –
luble. Elle provient à 80–90% de la biosyn –
thèse cutanée sous l’effet du rayonne –
ment ultraviolet.
1) Seuls 10–20% de la
vitamine D proviennent d’une source exo –
gène, via l’absorption d’aliments riches en
vitamine D. A cet égard, elle se comporte
plus comme une hormone que comme une
vitamine.
Cette synthèse cutanée dépend, notam –
ment, de la pigmentation de la peau, de
l’utilisation de crèmes solaires, de la sai –
son et de la latitude. A l’heure actuelle,
suite à l’urbanisation, à la sédentarité et
aux recommandations des sociétés de
dermatologie et d’oncologie sur l’exposi –
tion solaire, la production cutanée de vita –
mine D diminue. L’apport exogène dépend
du type d’alimentation mais aussi des
habitudes régionales (aliments enrichis en
vitamine D, compléments vitaminiques).
La connaissance de la physiologie de la
vitamine D a considérablement progressé
ces dernières années, avec la mise en évi –
dence de ses récepteurs dans la plupart
des tissus, influençant l’expression génique
d’un tiers du génome et en particulier son
implication dans la prolifération et la diffé-
rentiation cellulaire, l’apoptose et l’angio –
génèse. La vitamine D est ainsi passée du
rôle de vitamine à tropisme purement
phosphocalcique et osseux à celui d’une
hormone pléiotrope jouant un rôle global
sur la santé (anti-infectieux, anti-inflamma –
toire, anti-tumoral, protecteur cardiovascu –
laire, etc). L’intérêt pour la vitamine D a dès
lors décuplé comme en témoigne le
nombre d’articles sur le sujet.
Cet article se propose de répondre aux
questions suivantes: Quelles sont les
principales sources de vitamine D? Quels
sont les effets de la vitamine D sur le métabolisme osseux et sur la santé en
général? Comment définir une carence en
vitamine
D? Qui dépister et comment
prévenir et traiter le déficit en vitamine D? La vitamine D: une hormone
de l’os, mais encore?
Sources de la vitamine D
Synthèse cutanée
La synthèse cutanée est très variable et dé-
pend, entre autres, de l’utilisation de crèmes
solaires, de la saison, de la latitude et surtout
de la pigmentation cutanée de chacun.
Les phototypes cutanés (classification de
Fitzpatrick) permettent de classer les indi –
vidus selon la réaction de leur peau à une
exposition solaire. Ainsi, les phototypes
foncés nécessitent-ils un temps d’exposi –
tion prolongé pouvant aller jusqu’à 3 à 5
fois celui d’un phototype clair
2). Chez un
individu à la peau claire (phototype II–III),
une exposition de 10 à 15 minutes du corps
entier en été produit entre 10 et 25 000 UI
de vitamine D
3). Actuellement, on admet
comme suffisante une exposition des bras
et des jambes aux UVB, durant 5 à 30 mi –
nutes entre 10 h et 15 h, deux fois par se –
maine
4).
Le point sur la vitamine D
Aude Tonson la Tour*, Alexandra Wilhelm-Bals*, Elsa Gonzalez Nguyen Tang*,
Eric Girardin*, Genève
* Unité universitaire romande de néphrologie pédia –
trique, Genève
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
17
Elle est ensuite transportée vers le rein pour
une deuxième hydroxylation par la 1-alpha
hydroxylase qui la transforme en sa forme
active (1.25 OH vitamine D3 ou calcitriol)
(Figure 1)
7). Cette étape est stimulée par la PTH
qui potentialise la 1-alpha hydroxylase et est
inhibée par le fibroblast growth factor 23 (FGF
23) qui exerce à l’inverse une action inhibitrice
sur la 1-alpha hydroxylase (figure 2).
Action de la vitamine D
sur le métabolisme osseux
La vitamine D est un des composants ma –
jeurs du métabolisme phosphocalcique et
est impliquée dans la minéralisation os –
seuse comme dans le maintien d’une calcé-
mie et d’une phosphatémie adéquates par
son action au niveau de l’intestin, du rein et
de l’os (Figure 2).
Au niveau intestinal, la 1.25 OH vitamine D3
augmente l’absorption de calcium de 20% et
l’absorption du phosphore de 60%
8). En l’ab –
sence de vitamine D, seuls 10 à 15% du cal –
cium ingéré et environ 60% du phosphore
sont absorbés
9). Au niveau rénal, la vita –
mine D entraîne une réabsorption tubulaire
distale de calcium et tubulaire proximale du
phosphore. Au niveau de l’os, la 1.25 OH vita-
mine D3 n’a pas d’effet direct sur la minéra –
lisation, mais elle agit par le maintien d’une
calcémie et d’une phosphatémie efficaces.
Au niveau des ostéoblastes, la 1.25 OH vita-
mine D3 stimule la sécrétion de multiples
protéines spécifiques. Au niveau des ostéo –
clastes, la 1.25 OH vitamine D3 stimule la
différentiation des précurseurs myélomono –
cytaires en lignées ostéoclastiques
1). La vita –
mine D exerce également une action inhibi –
trice sur la parathormone (PTH)
10 ). A l’inverse,
la PTH augmente la production de vitamine D
active en stimulant la 1alpha-hydroxylase. Le
FGF 23, hormone hyperphosphaturiante, in –
duit une diminution de la synthèse de la
1.25 OH vitamine D3. Enfin, le 1.25 OH vita-
mine D3 stimule la synthèse du FGF 23 via
l’ostéocyte
8).
Action pléiotrope de la vitamine D:
connaissances actuelles
Au cours des dernières décennies, de nom –
breuses études ont mis en évidence les ef –
fets de la vitamine D sur nombre de patho –
logies. Ceci s’explique en partie par la
découverte de la présence de récepteurs à
la vitamine D dans la plupart des tissus, et
par sa capacité à influencer l’expression de
nombreux gènes
2).
au sein et qui ne sont pas exposés au soleil
ne reçoivent par conséquent pas suffisam
–
ment de vitamine D pour satisfaire leurs
besoins au-delà des premiers mois
6). En ce
qui concerne les préparations lactées pour
nourrissons, elles contiennent en moyenne
400 UI/L, ce qui implique qu’un nourrisson
devrait ingérer 1 litre de lait par jour pour
atteindre les 400 UI quotidiennes recomman –
dées, ce qui est rarement le cas en pratique. Métabolisme de la vitamine D
Le métabolisme de la vitamine
D tant d’ori-
gine cutanée qu’alimentaire (vitamine D2,
D3) passe par plusieurs étapes successives:
elle subit une première hydroxylation (subs –
trat dépendante) dans le foie sous l’effet de
la 25-hydroxylase permettant de convertir
le cholécalciférol en calcidiol (25 OH vita-
mine D). C’est la forme circulante de vita –
mine D qui constitue la forme de stockage.
Figure 2: Action de la vitamine D
25 OH Vitamine D3(forme circulante)
1.25 OH Vitamine D3 (forme active)
1-alpha hydroxylase
Phosphate plasm. élevé
FGF23
INTESTINSAugmentation de
l’absorption du Calcium
et du Phosphate
REINAugmentation de la
réabsorption du Calcium
et du Phosphate OSStimulation des ostéoblastes
Différentiation des préostéoclastes
en ostéoclastes
PARATHYROIDEDiminution de la PTH Phosphate plasm. bas
PTH
+
–
Figur e 1: Métabolisme de la vitamine D (adapté de: Rev Med Suisse 2011 7)) *Vitamine D3 = cholécalciférol: source animale. Vitamine D2 = ergocalciférol: source végétale.
UVB
Peau 7-déhydrocholestérol
(pro-vitamine D3)
Vitamine D3
= cholécalciférol (inactive)
25-hydroxy-vitamine D3 (inactive) = calcidiol
1.25-dihydroxy-vitamine D3 (active) = calcitriol Nourriture*
Vitamine D2
Foie
Reins
25-hydroxylase
I--hydroxylase
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
18
Sur le plan infectieux, une étude prospective
de 156 patients a montré qu’un déficit en
vitamine D chez un nouveau-né sain était
associé à un risque plus élevé de bronchio –
lite à VRS
11). De même, une substitution de
vitamine D de 1200 UI/jour de décembre à
mars permettrait de diminuer les cas de
grippe
12 ).
Dans la tuberculose, une étude in vitro a
montré que la vitamine D permettait d’acti-
ver les macrophages à synthétiser un pep –
tide antimicrobien, la cathélicidine, impliqué
dans la défense contre Mycobacterium tu –
berculosis
13 ). In vivo, l’augmentation du taux
sanguin de vitamine D à plus de 30 ng/ml
(soit 75 nmol/L) chez des patients tubercu –
leux accélérerait la négativisation des ex –
pectorations
14 ).
Un déficit précoce en vitamine D serait as-
socié à un risque augmenté d’asthme
15 ) et
chez les enfants asthmatiques, un déficit en
vitamine D serait également un facteur as –
socié à une augmentation de la fréquence
des exacerbations
16 ).
En ce qui concerne le diabète de type 1, une
méta-analyse publiée en 2008 a démontré
que la supplémentation en vitamine D dans
l’enfance offrirait une protection contre le
développement du diabète de type 1
17 ). De
même, une étude de cohorte publiée en
2001 a permis de mettre en évidence une
association entre la supplémentation en vi –
tamine D et la réduction du risque de dia –
bète de type 1
18 ).
Quant au lien entre la vitamine D et l’auto-
immunité, la prise de vitamine D semble
inversement associée au risque de survenue
de polyarthrite rhumatoïde et à l’importance
de l’activité de la maladie
19)–21) . Plusieurs
méta-analyses décrivent également une
relation inverse entre les taux de vitamine D
et les risques de cancer du colon et du
sein
2), 22) . Enfin, le déficit en vitamine D serait
associé à une augmentation des risques
cardiovasculaires et des artériopathies péri –
phériques
23)–25) .
De manière pragmatique, l’action pléiotrope
de la vitamine D reste à préciser et, pour
l’instant, la plupart des experts ainsi que
l’Institute of Medicine (www.iom.edu )
concluent que les données sont encore in –
suffisantes pour établir des recommanda –
tions en ce qui concerne les besoins en vita – chez des patients ayant des taux de vita
–
mine D inférieurs à 40–45 nmol/L
27).
Ainsi, si un taux de vitamine D supérieur à
50 nmol/L semble protéger contre le rachi –
tisme et l’ostéomalacie, des taux à 75 nmol/L
semblent potentialiser chez l’adulte et le su –
jet âgé les effets de la vitamine D sur l’os.
C’est pourquoi, actuellement, la plupart des
experts internationaux se sont accordés pour
fixer chez l’adulte et l’enfant le seuil du déficit
en vitamine D à 50 nmol/L et celui de l’insuf –
fisance en vitamine D à 75 nmol/L
28). Ces
nouveaux taux actuellement recommandés
ne sont pas consensuels et sont proposés
uniquement en considération des consé-
quences sur le métabolisme osseux ( Ta –
bleau 2).
Prévalence
Malgré la substitution, on constate une recru –
descence des cas de rachitisme, et de nom –
breuses études épidémiologiques ont mis en
évidence l’importance de la carence en vita –
mine D dans la population pédiatrique.
La prévalence exacte du déficit est difficile à
estimer dans les pays industrialisés. Seules
quelques séries de cas existent à ce sujet.
Aux USA, on estime que 48% des pré-adoles –
centes blanches vivant dans le Maine pré-
sentent un déficit en vitamine D tandis qu’à
Boston, 32% des étudiants en bonne santé
ont des valeurs de 25 OH vitamine D au des-
sous de 20 nmol/l
29). En France, une étude
lyonnaise a montré que 75% d’enfants âgés
de 11 ± 4 ans étaient carencés en vitamine D,
dont 30% avec une insuffisance et 45% avec
un déficit
30). En Suisse, la consultation des
adolescents des Hôpitaux Universitaires de
Genève a dosé la vitamine D chez 49 patients
et 48 se sont révélés déficients.
Etiologies
A l’heure actuelle, on observe une augmen –
tation du déficit en vitamine D, probable-
ment secondaire aux modifications compor-
mine
D ayant un impact sur les pathologies
autres que musculosquelettiques
2).
Le déficit en vitamine D
Définition
Le taux plasmatique de 25 OH vitamine D
est le meilleur paramètre pour définir la ré-
serve en vitamine D de l’organisme car il est
stable sur plusieurs semaines, n’est pas
régulé activement et la production de 25 OH
vitamine D dépend directement du substrat
à disposition.
La définition du déficit en vitamine D est,
par contre, sujette à controverse et a été
modifiée ces dernières années. Des valeurs
recommandées se substituent à la valeur
normale définie dans une population donnée
par la moyenne +/- 2DS.
Ces valeurs recommandées ont été récem –
ment redéfinies en tenant compte de plu –
sieurs paramètres comme l’absorption in –
testinale du calcium, l’apparition de
symptômes de rachitisme, d’ostéomalacie,
le risque de fracture et l’obtention d’un
plateau de la PTH. A noter qu’il s’agit, pour
la plupart, d’études effectuées chez l’adulte
et en particulier chez des sujets âgés ou
chez la femme ménopausée.
En effet, dans cette dernière population,
l’absorption intestinale du calcium passe de
45 à 65% lorsque les taux de 25 OH vita-
mine D sont optimisés à 75 nmol/L. Chez
l’adulte (> 60 ans), des taux de vitamine D
optimisés à 75–110 nmol/L sont bénéfiques
sur le risque de chutes et de fractures.
Chez l’enfant, peu de données sont dispo –
nibles. Selon une revue de la Cochrane data –
base de 2010, la supplémentation en vita –
mine D n’a pas d’effet sur le contenu minéral
osseux total, ni sur la densité minérale os –
seuse de la hanche et de l’avant bras chez
des patients ayant un taux de vitamine D
supérieur à 35 nmol/L
26). Toutefois, certains
auteurs signalent des cas de rachitisme
Normes 25 OH vitamine D
Déficit < 50 nmol/L
Insuffisance < 75 nmol/L
Excès > 250 nmol/L
Intoxication > 374 nmol/L
Ta b l e a u 2: Taux de vitamine D: définitions
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
19
des cas particuliers ou lorsque l’enfant
présente des déformations osseuses ou des
fractures. Il n’est pas recommandé de les
doser en cas de déficit simple en vita-
mine D. Les marqueurs osseux permettent
une interprétation dynamique de la forma –
tion et de la résorption osseuse. Cependant,
leur limitation résulte d’une variation diurne
et du fait qu’ils ne soient pas représentatifs
d’un «site» spécifique. Il est également né-
cessaire de connaitre le développement
pubertaire et la vitesse de croissance du
patient pour les interpréter. La phosphatase
alcaline osseuse est un des marqueurs os –
seux les plus utilisés. Elle est présente sur
la membrane de l’ostéoblaste et est requise
pour la minéralisation. Elle constitue un
marqueur osseux fiable et est plus spéci –
fique que la phosphatase alcaline. De nom –
breux autres biomarqueurs existent et sont
utilisés, comme le propeptide N-terminal du
procollagène de type 1 total (P1NP) et le
Beta-crosslaps (CTX, télopeptide). Des in –
tervalles de référence pédiatriques existent
pour tous ces marqueurs
31).
Le bilan urinaire peut se faire sur un spot
avec calcium, phosphates et créatinine pour
calculer un taux de réabsorption des phos –
phates (TRP) et une calciurie (rapport cal –
cium/créatinine).
La minéralométrie
L’indication à la minéralométrie chez l’enfant
a été clairement définie. Elle doit être envi –
sagée chez tout enfant présentant une ma –
ladie susceptible d’affecter le squelette et
d’augmenter le risque de fractures (ostéo –
génèse imparfaite, maladies inflammatoires,
immobilisation chronique, néoplasies, endo –
crinopathies). Elle est également indiquée
chez tout enfant sain ayant un antécédent
de fracture cliniquement significative (1
fracture d’un os long du membre inférieur
ou 2 fractures d’un os long du membre su –
périeur ou une compression vertébrale). Elle
n’est pas indiquée dans le bilan initial du
rachitisme. C’est le DEXA scan (absorptio –
métrie biphotonique) qui est actuellement
l’examen de choix
32).
L’interprétation de la minéralométrie chez
l’enfant a été longtemps débattue, du fait de
la croissance du squelette et de ce que le pic
osseux maximal n’est pas encore atteint. Des
recommandations ont été établies récem –
ment par l’ISCD (International Society for
Clinical Densitometry) et pour une bonne
tementales, sous toutes les latitudes et sur
tous les continents, avec comme consé-
quence une production endogène de vita
–
mine D devenant négligeable.
A noter que l’épidémie d’obésité vient aggra –
ver ce problème, la majorité des patients
obèses stockant leur vitamine D dans le tissu
adipeux, ce qui engendre un déficit. De plus,
quand des patients adultes sont exposés si –
multanément au soleil ou reçoivent une dose
orale de 50 000 UI de vitamine D, les patients
obèses ne sont pas capables d’augmenter
leur taux sanguin de vitamine D de plus de
50% contrairement aux autres
28).
Les autres facteurs responsables d’une hy-
povitaminose D sont répertoriés dans le
tableau 3.
Qui dépister?
Le pédiatre en cabinet devrait porter une
attention particulière aux enfants à photo –
type cutané foncé ou présentant des fac –
teurs de risques. Les premiers symptômes
cliniques du déficit en vitamine D sont peu
spécifiques, comme une faible croissance,
un retard psychomoteur, une fatigabilité, une irritabilité et un bilan devrait alors être
effectué chez ces patients.
Les examens complémentaires à
disposition et leur interprétation
Le bilan sanguin et urinaire
Pour diagnostiquer un déficit en vitamine
D il
faut doser la 25 OH vitamine D qui repré-
sente les stocks de vitamine D de l’orga-
nisme. Il n’est pas nécessaire de doser la
1.25 OH vitamine D, sauf lorsque l’on sus –
pecte un rachitisme héréditaire ou une autre
pathologie du phosphate. En effet, la 25 OH
vitamine D circule dans l’organisme à des
concentrations nettement plus élevées et a
une demi-vie beaucoup plus longue. Le bilan
sera complété par un dosage du calcium, du
phosphate et de la fonction rénale (urée,
créatinine). L’hormone parathyroïdienne
(PTH) peut également être dosée mais son
dosage n’est indiqué que si l’on suspecte une
pathologie de l’os ou du métabolisme phos –
phocalcique sous-jacente ou si les dosages
du calcium et phosphate sont pathologiques.
D’autres outils à disposition sont les mar-
queurs osseux. Ils ne seront dosés que dans
Ta b l e a u 3: Etiologies de l’hypovitaminose D
Facteurs de risque déficit en 25 OH vitamine D
Facteurs environnementaux et géographiques
Tendance à l’autolimitation de l’exposition solaire et crèmes solaires
Enfants avec peau pigmentée
Variation saisonnière
Obésité car la vitamine D, liposoluble est séquestrée dans le tissu adipeux
Enfants vivants sous des latitudes élevées
Déficit d’apport Pauvreté de l’alimentation occidentale en vitamine D
Anciens prématurés (stocks non constitués sur le dernier trimestre de la grossesse)
Enfants nés de mère déficitaire en vitamine D
Allaitement maternel exclusif
Traitement augmentant la dégradation de la vitamine D Traitement anticonvulsivant, stéroïdien ou antifongique
Diminution de la biodisponibilité Pathologies associées à une malabsorption (coeliakie, Crohn, atrésie des voies billiaires, muco –
viscidose)
Perte rénale Syndrome néphrotique
Diminution de l’hydroxylation Insuffisance hépatique
Insuffisance rénale
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
20
trouver un consensus, de même que l’étude
des effets de la variation saisonnière des
taux de vitamine D et de leur signification
clinique.
A l’heure actuelle, il n’y a toujours pas de
consensus en Suisse concernant la préven –
tion du déficit en vitamine D chez l’enfant de
plus d’un an, bien qu’il ait été démontré
qu’un déficit et une insuffisance en vita –
mine D n’étaient pas rares.
Il parait raisonnable pour le praticien de
doser la 25 OH vitamine D en cas de suspi –
cion clinique d’hypovitaminose D et de
traiter un déficit (< 50 nmol/L).
Il semble urgent de mettre au point des re -
commandations sur la valeur optimale de
vitamine D chez l’enfant et de mener une
réflexion sur l’enrichissement des aliments
en vitamine D en Suisse.
Références
1) St Arnaud R Demay MB, Vitamin D biolog y. Elsevier
Science: London 2003; 193–215.
2) Amstutz V et al, Vitamin D: update and recommen -
dations. Rev Med Suisse 2011: 7 (319); 2332,
2334–7.
3) Holick MF and TC Chen, Vitamin D deficiency: a
worldwide problem with health consequences. Am
J Clin Nutr 2008: 87 (4); 1080S–6S.
4) Holick MF, Vitamin D deficiency entire monograph.
BMJ point of care 2011; 1–19.
5) Matsuoka LY et al, Sunscreens suppress cutaneous
vitamin D3 synthesis. J Clin Endocrinol Metab 1987:
64 (6); 1165–8.
interprétation de la minéralométrie les points
suivants doivent être respectés: Le site de
mesure valable chez l’enfant est le rachis
entier ou le corps total sans la tête (TBLWH);
les résultats doivent être donnés en z-score.
Il est impératif de donner des informations
complémentaires au radiologue en cas de
croissance staturo-pondérale anormale (âge
osseux, bilan endocrinien); en cas de résultat
pathologique, la minéralométrie peut être
répétée après 12 à 18 mois
32).
Prévention et traitement
du déficit en vitamine D
Apports recommandés en vitamine D
et calcium
En 2011, l’Institute of Medicine a publié de
nouvelles recommandations sur les apports
en vitamine D et calcium dans la population
nord américaine. Les doses en vitamine D
requises pour la santé osseuse (pour un taux
de vitamine D > 50 nmol/L) sont de 400 UI/
jour pour les enfants de moins de 1 an et de
600 UI/jour pour les enfants de plus de 1 an.
Les apports en calcium sont de 700 mg/jour
pour les enfants de 1 à 3 ans, de 1000 mg/
jour pour les enfants de 4 à 8 ans et de
1300 mg/jour pour les enfants de 9 à 18 ans.
Ces recommandations ne tiennent pas
compte des apports cutanés étant donné la
grande variation d’ensoleillement suivant les
situations géographiques
33).
En Suisse, la Société Suisse de Pédiatrie
recommande d’administrer dès la deuxième semaine de vie, 300 à 500
UI/jour de vita-
mine D à tous les bébés, allaités ou non
pendant toute la première année de vie. Il
n’existe, à l’heure actuelle aucune recom –
mandation pour les enfants de plus de 1 an.
Traitement du déficit en vitamine D
En cas de déficit en vitamine D, un supplé-
ment est nécessaire sous forme de gouttes
à administrer per os une fois par jour sur
une période de 2 à 3 mois, avec pour objec –
tifs de normaliser les taux de 25 OH vita-
mine D et de reconstituer les stocks. Diffé-
rentes doses sont proposées en fonction de
l’âge de l’enfant: 1000 UI/j chez les enfants
de moins de 1mois; 1000 à 5000 UI/j chez
les enfants de 1 à 12 mois; de 5000 jusqu’à
10 000 UI/j chez les enfants de plus de 1
an
34). Ces doses seront diminuées à 400
UI/j dès la normalisation des paramètres
biologiques.
Le tableau 4 résume la liste des différentes
préparations pharmacologiques dispo –
nibles.
Conclusion
De plus en plus d’études s’accordent à dire
que la vitamine D n’est pas seulement impli –
quée dans la santé de l’os mais également
dans d’autres domaines de la santé. Les
taux optimaux de vitamine D sont toujours
sujets à controverse et de nouvelles appré-
ciations sur les effets d’une exposition mo –
dérée au soleil permettraient peut-être de
Ta b l e a u 4 : Préparations pharmacologiques de vitamine D3
Teneur posologie Substance active Excipient Remarques
Vidé-3
1 ml = 4500 Ui
Posologie: 4 gtes/j = 400 Ui Cholécalciférol
Exc.: ethanol 65%, 4 gtes: 46 mg OH Suisse
Vidé-3 streuli 1 ml = 4000 Ui
Posologie: 4 gtes/j = 400 Ui Cholécalciférol
Exc.: ethanol 49%, 4 gtes: 38.6 mg OH Suisse
Wild vit. D 30 gtes = 20
000 Ui
Posologie: 1 gte/j = 667 Ui Cholécalciférol
Exc.: oleosum, trigly à chaîne moyenne. Suisse
Vitamine D3 Streuli
solution injectable 1 ml (1 ampoule) = 300
000 UiCholécalciférol
Exc.: Trigly. à chaîne moyenne Suisse
Oléovit D3 30 gttes = 12
000 Ui
Posologie: 1 gte/j = 400Ui Cholécalciférol
Exc.: huile d’arachide Autriche
Allergisant
Vigantol 1 gte/j = 500 Ui
Cholécalciférol
Exc.: Miglyol, Trigly. à chaîne moyenne Allemagne
Zyma D 2 gtes/j = 600 Ui
Cholécalciférol
Exc.: essence orange France
Uvedose 2 ml (1 ampoule) = 100
000 UiCholécalciférol
Exc.: Butylhydroxytoluène, Saccharine, acide sorbique,
citron, Glycérides France
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
21
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Correspondance
Dr. Aude Tonson la Tour
Unité universitaire romande de néphrologie
pédiatrique
Département de l’Enfant et de l’Adolescent
Hôpital des Enfants
6 rue Willy-Donzé, 1205 Genève
Aude.TonsonLaTour@hcuge.ch
Les auteurs certifient qu’aucun soutien financier ou
autre conflit d’intérêt n’est lié à cet ar ticle.
Vol. 23 No. 4 2012
Formation continue
Informations complémentaires
Auteurs
Dr med. Aude Tonson la Tour , Médecin cadre, service de pédiatrie, Hôpital de la Tour, Genève et médecin associée, service d’urgences pédiatriques, HUG, Genève Alexandra Wilhelm-Bals , Unité romande de néphrologie pédiatrique, Hôpitaux universitaires de Genève Elsa Gonzalez Nguyen Tang Eric Girardin