Ces dernières années la chirurgie ambulatoire s’est développée de façon remarquable en pédiatrie. En diminuant le temps de séparation de l’enfant d’avec la famille, elle permet de diminuer le stress associé à l’hospitalisation. Par ailleurs le développement de techniques anesthésiques modernes et la promotion des techniques analgésiques avec es anesthésiques locaux ont permis un élargissement notable des indications de la chirurgie ambulatoire chez l’enfant. Enfin il faut noter que ce type de chirurgie permet d’éviter au maximum les risques d’infection nosocomiale et réduit de façon conséquente les coût de la santé.
Fortbildung / Formation continue
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Vol. 19 No. 5 2008
Introduction
Ces dernières années la chirurgie ambulatoire
s’est développée de façon remarquable en pé
diatrie. En diminuant le temps de sépara tion
de l’enfant d’avec la famille, elle permet de
diminuer le stress associé à l’hospitalisation.
Par ailleurs le développement de techniques
anesthésiques modernes et la promotion
des techniques analgésiques avec des
anesthésiques locaux ont permis un élar
gissement notable des indications de la
chirurgie ambulatoire chez l’enfant. Enfin il
faut noter que ce type de chirurgie permet
d’éviter au maximum les risques d’infection
nosocomiale et réduit de façon consé
quente les coût de la santé. En revanche
la chirurgie ambulatoire continue de poser
deux problèmes essentiels:
1. Le mauvais contrôle de la douleur posto
pératoire, dont l’incidence varie selon
les études entre 10 à 50%.
2. Les troubles de comportement en posto
pératoire, qui sont hautement corrélés à
l’intensité de la douleur en postopéra
toire.
En effet, une douleur post opératoire mal
contrôlée, peut augmenter l’incidence des
nausées et des vomissements (40% chez
les enfants présentant une douleur vs 16%)
1),
favoriser l’apparition de troubles du som
meil (incidence de 20% chez les enfants
ayant une douleur sévère)
2) et augmenter
de manière significative l’incidence de trou
bles de comportement postopératoire
3), 4) .
C’est pourquoi la douleur postopératoire de
l’enfant représente une réelle angoisse pour
les parents. En effet, dans une enquête récen
te, les parents préfèrent, pour 25% d’entre
eux, que leur enfant soit hospitalisé.
Pour cette raison, il est très important a près
une chirurgie ambulatoire d’apprendre aux
parents à évaluer, prévenir et traiter à do
micile la douleur post opératoire de leur
enfant.
Physiopathologie
A côté des modifications comportementales
qu’une douleur aiguë peut engendrer, il faut noter que la douleur, non ou mal traitée,
peut entraîner des modifications durables
au niveau du système nerveux, puisqu’elle
peut engendrer une sensibilisation. Le but
du traitement de la douleur est de prévenir
cette sensibilisation.
Il existe deux types de sensibilisations:
●
La sensibilisation périphérique: Un
traumatisme tissulaire ou inflammation
va entraîner une sensibilisation péri
phérique avec une zone d’hyperalgésie
primaire localisée au niveau de la lésion
(du nocicepteur).
● La sensibilisation centrale: selon
l’inten sité et la durée de cette stimu
lation nociceptive, elle peut entraîner
aussi une sensibilisation centrale qui se
situe au niveau de la corne postérieure
de la moelle avec une hyperalgésie
que l’on appelle secondaire, située
en dehors de la lésion.
Les symptômes
Qu’elle soit centrale ou périphérique, les
symptômes de la sensibilisation sont:
● L’allodynie: apparition d’une douleur après
un stimulus non nociceptif (par ex, le
toucher)
● L’hyperalgésie: exacerbation d’une dou
leur pour un stimulus donné.
● La douleur spontanée: douleur sans
stimulus.
Mécanismes
● Dans la sensibilisation périphérique, la
lésion tissulaire va entraîner la libération
d’une multitude de molécules qui vont
constituer ce que l’on appelle la «soupe
inflammatoire». Celle ci va modifier le
seuil de sensibilité des nocicepteurs
périphériques: des nocicepteurs à seuil
haut qui normalement ne transmettent
pas la douleur vont commencer à trans
mettre la douleur. Au stade actuel de
nos connaissances, il semble que cette
sensibilisation périphérique disparaît
après la guérison de la lésion.
● La sensibilisation centrale survient a près
l’activation séquentielle par les aci des aminés excitateurs de récepteurs
situés sur le second neurone au niveau
de la corne postérieure de la moelle,
notamment les récepteurs N
méthyl
Daspartate (NMDA). L’activation de ces
récepteurs NMDA signe la sensibilisa
tion centrale. Les symptômes de cette
sensibilisation centrale peuvent perdu
rer au delà de la guérison de la lésion et
entraîner des douleurs chroniques ou
une sensibilité particulière à la douleur.
Le système nerveux central des bébés
et des nouveau nés est particulièrement
sensible aux stimulations nociceptives,
parce qu’il est immature et doué d’une
grande plasticité. Ainsi une douleur mal
traitée chez le petit enfant peut influ
encer sa réaction à la douleur pendant
l’enfance et même l’âge adulte. Taddio
et al.
6) l’ont bien illustré en observant
l’intensité de la douleur lors de vacci
nations de bébés âgés de 6 et 18 mois.
Ils démontrent que les bébés circoncis
sans anesthésie pendant la période
néonatale présentaient des réactions
de douleur plus intenses que les bébés
non circoncis.
Ces notions physiopathologiques nous
incitent donc à être particulièrement
vigilants dans le traitement de la douleur
chez l’enfant.
Evaluation de la douleur chez
l’enfant
Avant de la traiter, il faut d’abord pouvoir
évaluer correctement la douleur. L’évaluation
doit se faire avant traitement et après, afin
de juger de son efficacité et de la pertinence
du traitement.
Les échelles d’évaluation sont nombreuses
chez l’enfant. On distingue:
● Les échelles d’auto-évaluation: dès
que l’enfant peut les comprendre, il faut
privilégier les échelles d’auto évaluation.
La plus reconnue est l’échelle des visa
ges (VAS) revue et validée par Hicks et
al. (Figure 1)
7).
● Les échelles d’hétéro-évaluation: chez
l’enfant plus petit, ne parlant pas ou ne
comprenant pas encore les échelles, il
faut utiliser une échelle comportemen
tale. Il en existe une multitude. La plus
utilisée a longtemps été l’échelle de
CHEOPS (Children Hospital East Onta
rio Pain Scale
8), elle semble maintenant
détrônée par l’échelle de FLACC(Face,
Legs, Activity, Cry, Consolability
9), pré
sentant plusieurs avantages. Elle est
Douleur chez l’enfant après chirurgie
ambulatoire: quelle évaluation?
Quel traitement?
Chantal Mamie, Walid Habre, Genève
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plus simple d’utilisation, car comme
les VAS, elle se note sur 10. De plus,
elle introduit la notion de consolabilité,
souvent utilisée dans la prise en charge
de la douleur, mais rarement rapportée
(tableau 1).
● Evaluation en cas de douleurs répétées
ou chroniques: l’échelle des couleurs 10)
est utile pour les petits enfants présen
tant des douleurs chroniques ou récur
rentes, elle permet de suivre l’évolution
globale de la douleur. On demande à
l’enfant de localiser ses douleurs sur un
petit bonhomme et de les colorier avec
des couleurs différentes selon l’intensité
de la douleur. Pour l’enfant plus grand
avec douleurs chroniques on peut utiliser
l’échelle des mots de Bourreau (Ques
tionnaire de douleur de Saint Antoine
(QDSA))
11).
Traitement de la douleur:
Approche multimodale
Depuis plusieurs années, il y a un consensus
privilégiant l’approche multimodale pour le
traitement de la douleur
12 ). L’association de
plusieurs médicaments, agissant à des ni veaux différents, va «attaquer» la douleur sur
tous les fronts. Cela va aussi permettre de
profiter des synergies pouvant exister entre plu
sieurs classes de médicaments. On peut ainsi
diminuer les doses de chacun d’eux et théori
quement diminuer leurs effets secondaires.
Les médicaments à disposition:
On dispose d’une panoplie pharmacologique
conséquente:
● Les anesthésiques locaux, qui bloquent
la conduction et la stimulation répétée
des fibres C.
● Les molécules anti-NMDA comme la
kétamine qui empêchent l’activation des
récepteurs NMDA et l’installation de la
sensibilisation centrale.
● Les anti-inflammatoires non stéroïdi –
ens (AINS) et le paracétamol, qui blo
quent la synthèse des prostaglandines
au niveau périphérique et central.
● Les opiacés qui en se liant à leurs ré
cepteurs bloquent l’entrée du calcium
dans le 2
ème neurone.
● Les alpha-2-agonistes qui ont une affini
té spécifique pour les récepteurs alpha 2
adrénergiques, empêchant notamment la libération de noradrénaline dans la
synapse.
En pratique, les choses ne sont pas
aussi simples:
Par exemple, les anesthésiques locaux ne
sont pas efficaces en cas d’infections et
ont souvent une durée limitée. Concernant
les anti NMDA, bien que leur efficacité soit
statistiquement significative dans les études
expérimentales, les études cliniques restent
controversées. Les AINS ont certaines con
tre indications et les morphiniques peuvent
entraîner une hyperalgésie aux opiacés!
Les médicaments:
● Le paracétamol:
Mécanisme d’action: c’est un analgésique
faible qui agit au niveau central en inhibant
la Cox2 et probablement une Cox3. Il
agirait aussi par interaction avec les
fibres descendantes inhibitrices séro
toninergiques.
Pharmacocinétique: le paracétamol
passe rapidement la barrière hémato
encéphalique, puisqu’après une inges
tion orale, la concentration maximale
dans le LCR est atteinte en deux heures,
avec un effet d’épargne d’opiacés dé
montré. Une méta analyse récente a
révélé que l’association paracétamol
morphine, comparée à l’administration
de morphine seule, diminue la consom
mation d’opiacés d’environ 20%, mais
ne réduit pas pour autant l’incidence
des effets secondaires liées à la prise
de morphine
13). La demi vie du paracé
tamol est de 9,6 h chez le nouveau né,
de 4,2 h chez l’enfant et de 2,5 h chez
l’adulte. Sa biodisponibilité lorsqu’il est
administré per os ou iv est de 100%. Elle
est très variable lors d’administration
rectale, entre 25 et 98% (en moyenne
70%) dépendant du niveau d’absorption
(veines hémorroïdaires supérieures ou
inférieures) et donc d’un premier pas
sage hépatique ou non.
Contre-indications: ses contre indica
tions sont le déficit en G6PD et une
perturbation de la fonction hépatique. A
ce propos, une étude récente a démon
tré chez l’adulte sain une augmentation
transitore des amino tranférases de plus
de trois fois la norme après l’ingestion
de 4 G de paracétamol. Cela dès le 3
ème
jour de traitement et avec des taux
plasmatique de paracétamol dans la
fourchette thérapeutique
14).
Visage 0 = pas d’expression particulière ou sourire
1 = grimace occasionnelle, sourcils froncs, renferm ou dsint\
ress
2 = tressaillements menton occasionnel ou constant,
mâchoires serrées
Jambes 0 = position normale détendue
1 = mal à l’aise, bougeant sans cesse, tendu
2 = donne des coups de pied, jambes repliées
Activité 0 = couché tranquillement, position normale, bouge facilement
1 = se tortille, bouge d’un côté à l’autre, tendu
2 = arqué, rigide, mouvements désordonnés
Pleurs 0 = pas de pleurs (éveillé ou endormi)
1 = geint ou pleurniche, plainte occasionnelle
2 = pleure tout le temps ou hurle, sanglote, plaintes fréquentes
Consolabilité 0 = content et détendu
1 = rassuré par le contact occasionnel, lorsque pris dans les bras,
par les paroles, peut être distrait
2 = difficile à consoler ou réconforter
Tableau 1: Echelle de FLACC.
Figure 1: Echelle des visages
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Posologie: nous recommandons donc
la voie orale (ou iv lorsque celle ci n’est
pas possible). La dose est de 15mg/kg.
Lors de douleur postopératoire, il faut le
prescrire de manière systématique toute
les 6 h pendant 48 h, cela pour conser
ver un taux plasmatique efficace.
● Les anti-inflammatoires non stéroïdi –
ens (AINS):
Mécanisme d’action: les AINS inhibent
aussi la synthèse des prostaglandines,
mais surtout au niveau périphérique par
l’inhibition de la Cox2. Analgésique faible,
ils ont un effet d’épargne opiacés plus
important que le paracétamol, de l’ordre
de 30–40%
15 ).
Effets secondaires: leur principal incon
vénient est l’inhibition réversible de la
thromboxane A2 qui diminue la fonction
plaquettaire et augmente les saigne
ments. Ils auraient aussi un effet sur les
ostéoblastes et diminueraient la formati
on de cal après une fracture ou une ostéo
synthèse. Enfin le kétorolac ne doit pas
être administrée pendant plus de 72H en
raison du risque d’insuffisance rénale
16 ).
Pharmacocinétique: L’association AINS
morphine diminue significativement l’in
ci
dence de nausées et vomissements et de
la sédation comparée à la morphine seule.
Mac Quay a étudié en 1997 le NNT (number
needed to treat) pour diminuer de 50%
une douleur modérée à sévère sur 4–6
heures. Les 3 médicaments avec les NNT
les plus bas (environ 3) sont des AINS: le
diclofénac, le naproxène et l’ibuprofène,
la morphine arrivant juste derrière
17).
Contre- indications: les contre indications
en post opératoire sont les troubles de la
coagulation préexistants, les dissections
longues et étendues et les tonsillectomies
où le risque de saignement post opéra
toire est deux fois plus élevé (voir plus bas).
Posologie: la dose d’ ibuprofène est de 3
fois 10mg/kg/j per os de préférence. Le
naproxène: 2x10mg/kg/j. Les AINS doi
vent aussi être administrés de manière
régulière pendant 48 h, pour conserver
un taux plasmatique efficace.
● Le tramadol:
Mécanisme d’action: son effet analgé
sique passe par les voies monoaminer
giques centrales, avec une faible affinité
pour récepteur μ1. Son premier métabo
lite est μ agoniste.
E ffets secondaires: l’incidence de nau
sées vomissements est d’environ 10%,
des convulsions ont été décrites.
Pharmacocinétique: l’atteinte du pic de
concentration après absorption orale est
de moins de 30 minutes. La concentration
plasmatique reste au
dessus du taux an
algésique (100 ng/ml) pendant 67 h. La
concentration du premier métabolite est
de 30%. Chez l’adulte, sa demi vie est de
5 h et 9 h pour le métabolite, chez l’enfant
de 1 à 8 ans: ces demi vies sont respec
tivement de 3,5 et 5,8 h. Sa biodisponibi
lité après ingestion orale est satisfaisante,
environ 68%. La pharmacocinétique après
administration rectale présente peu de
variabilité, la demi vie est alors de 4,3 h.
Posologie: la dose est de 2mg/kg toutes
les 8 heures.
● La codéine
La codéine agit après déméthylation par
un enzyme du cytochrome P450, ce qui
la transforme en morphine. Cet enzyme
est codé génétiquement par le gène
CYP2D6 qui présente un polymorphisme.
Les gens porteurs du polymorphisme
«lent» peuvent pas convertir la codéine
en morphine. Williams et al. ont relevé
que 47% des enfants du London Royal
ORL Hospital présentaient un génotype
associé à une activité enzymatique di
minuée. Ils présentaient après 1,5mg/
kg de codéine des effets indésirables
plus marqués (nausées, vomissements,
sédation et constipation) après 48 heures.
La codéine, de ce fait, n’a plus d’intérêt
thérapeutique
18 ).
L’analgésie multimodale
En pratique, nous privilégions l’approche
multimodale en associant paracétamol,
AINS et tramadol (ou opiacés en cas de
douleur importante).
Spécificité de la prise en charge à do –
micile après chirurgie ambulatoire
La prise en charge de l’analgésie après chirur
gie ambulatoire nécessite une bonne com
muni cation entre le chirurgien, l’anes thésiste,
le médecin de famille et les parents de l’enfant.
En effet, le retour à domicile signifie un trans
fert de responsabilité aux parents. Il est donc
impératif de leur apprendre à évaluer et à gérer
la douleur. Il faut savoir que la douleur à domi
cile a des conséquences non négligeables.
● Augmentation de nausées vomisse ments:
après une tonsillectomie, l’inci dence de
nausées vomissements post opératoire
est de 40% chez les patients présentant
une douleur sévère, versus 16% dans le
groupe sans douleur
1).
● Augmentation des troubles du sommeil:
Kain et al 4) ont évalué les troubles du
sommeil pendant 5 jours chez des enfants
ayant subi une intervention ambulatoire,
comparé à un groupe contrôle non opéré.
Lors de la première nuit postopératoire,
50% des enfants opérés présentaient des
troubles du sommeil qui diminuaient à 15%
lors de la 5
ème nuit. Les scores de douleur
étaient significativement plus élevés parmi
les enfants avec troubles du sommeil.
● Augmentation des troubles du compor
tement postopératoires: Kotiniemi et al. 3)
ont démontré que des enfants après
tonsillectomie, avec une douleur posto
pératoire sévère, présentaient à J0 neuf
fois plus de troubles du comportement
comparé aux enfants avec une douleur
absente ou modérée; 70% des enfants
avec douleur sévère avaient des trou
bles du comportement. A la quatrième
semaine postopératoire, les enfants avec
douleurs sévères présentent encore
quatre fois plus de troubles du compor
tement que les enfants sans douleur
1).
● La douleur est considérée comme un
problème sérieux par 80% des parents
d’enfants ayant subi une tonsillectomie
19 ).
Les troubles alimentaires venant en
deuxième position (63%). Dans cette
étude, aucune instruction standardisée
n’était donnée aux parents concernant
la douleur postopératoire, ils recevaient
juste des suppositoires de paracétamol
lors de la décharge
19 ).
Attitude pratique
Il faut expliquer aux parents à quelle durée
et intensité de douleur ils doivent s’attendre
selon le type d’intervention subie. Pour cela,
ils ont besoin d’un outil d’évaluation de la
douleur à domicile. On peut facilement leur
apprendre l’échelle numérique si l’enfant
est assez grand. Sinon, il existe le ques
tionnaire «postoperative pain measure for
parents», qui a été validé en anglais chez
des enfants de 2 à 12 ans (Tableau 2)
20). Si
les réponses sont oui à plus de six ques
tions, il existe une douleur qui nécessite un
traitement. Concernant le traitement, il doit
être adéquat et les parents doivent être mis
en garde contre une prise d’analgésiques à
la demande. En fonction de l’intervention
subie, l’analgésique doit être pris régulière
ment pendant 24 à 48 h afin de conserver
un taux sanguin efficace. Pour les inciter
à cela, il faut leur expliquer les complica
tions (décrites plus haut) qu’entraînent des
33
Vol. 19 No. 5 2008 Fortbildung / Formation continue
douleurs mal traitées. Une étude récente 21)
montre que près de 50% des parents inter
rogés pensent qu’il faut éviter de donner des
analgésiques après un soin ambulatoire et
35% estime que la quantité donnée à do
micile doit être moindre que celle donnée
à l’hôpital. Dans cette étude, il existe une
différence de conception sur le traitement
de la douleur entre les pères et les mères.
Bien que leur perception de la douleur chez
leur enfant soit la même, les pères pensent
que les antalgiques sont dangereux et ne
doivent être donnés que lors d’une douleur
sévère. Tout cela doit être pris en compte
lors des entretiens avec les parents.
Un cas particulier: la tonsillectomie
La tonsillectomie s’accompagne d’une
hospitalisation de courte durée, avec des
douleurs intenses, et n’est pas la plus sim
ple à gérer sur le plan antalgique. Plusieurs
méta analyses ont examiné les saignements
postopératoires lors de traitement par AINS
après tonsillectomie
22). Toutes concluent à
une incidence comparable de saignements
postopératoires entre groupes avec ou sans
AINS, mais il y a près de quatre fois plus de
reprises opératoires pour les groupes avec
AINS. Les AINS ne doivent donc pas être
prescrits après adénotonsillectomie. Cer
tains
23) ont remplacé les AINS par une dose
de corticoïde per ou post opératoire, à la
fois pour prévenir la douleur et les nausées/
vomissements. Les résultats préliminaires
d’une étude de notre institution (Czarnetski
et coll., non publié) a mis en évidence une augmentation significative des saignements
postopératoires après corticostéroïdes, quel
le que soit la dose administrée. Ce constat a
conduit à l’arrêt de l’étude dont le but était de
déterminer un effet dose réponse.
Le traitement de la douleur après tonsillec
tomie constitue donc un challenge. Cette
intervention est très douloureuse, la douleur
dure en moyenne dix jours et interfère avec
l’alimentation. Les opiacés sont peu prisés
des ORL en raison des nausées/vomisse
ments qu’ils peuvent entraîner, les efforts
de vomissement risquant de déclencher
un saignement des loges amygdaliennes.
Ces enfants bénéficieront d’une association
paracétamol tramadol. On pratiquera une
prévention des nausées et vomissements
par l’administration per opératoire d’un sé
tron ainsi que par l’aspiration du sang étant
passé dans l’estomac, très émétisant, avant
le réveil et l’extubation de l’enfant.
Conclusions
La décision du retour à domicile d’un enfant
ayant bénéficié d’une chirurgie ambulatoire
doit obéir à un certain nombre de conditions:
● S’assurer que l’environnement familial
est adéquat
● S’assurer que les messages sur l’antalgie
ont été bien compris par les parents
(information détaillée, claire)
● S’assurer que l’apprentissage de la ges
tion de la douleur a été bien assimilée
● S’assurer que l’information sur les médi
caments, leurs indications et leurs effets
secondaires a été bien retenue
● S’assurer de la disponibilité des médicam
ents nécessaires avant de quitter l’hôpital
● Donner aux parents les coordonnées
des personnes ressources à contacter
en cas de probléme.
En revanche, il ne faut pas hésiter à garder à
l’hôpital tout enfant ayant subi une chirurgie
délabrante présentant une prise en charge
antalgique plus compliquée.
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Correspondance:
Dr Chantal Mamie
Unité d’anesthésie pédiatrique
Hôpitaux Universitaires de Genève
1211 Genève 4
chantal.mamie@hcuge.ch
Tableau 2: Evaluation de la douleur à domic-
ile par le PPMP
Un score > 6 représente une douleur
cliniquement significative
1. Whine or complain more than usual
2. Cry more easily
3. Play less than usual
4. Not do the things s/he normally
does
5. Act more worried than usual
6. Act more quiet than usual
7. Have less energy than usual
8. Refuse to eat
9. Eat less than usual
10. Hold the sore part of his/her body
11. Try not to bump the sore part of
his/her body
12. Groan or moan more than usual
13. Look more flushed than usual
14. Want to be close to you more
15. Take meds when normally refuses
Informations complémentaires
Traducteur:
Auteurs
Dr. med. Chantal Mamie , Unité d’anesthésie pédiatrique, Hôpitaux Universitaires de Genève