Avec une prévalence de 4–5 % (chez les nouveau-nés prématurés jusqu’à 14 %), les hémangiomes infantiles (HI) ne sont pas seulement les tumeurs vasculaires les plus fréquentes, mais les tumeurs les plus fréquentes en absolu chez le nourrisson1), 2). Connaître les caractéristiques de la croissance des HI et les variantes possibles laissent est d’une importance fondamentale pour les conseils à donner aux parents, pour la planification des contrôles cliniques et le choix du moment pour une intervention thérapeutique. Les HI ne sont pas visibles à la naissance, ou alors seulement sous forme de lésion annonciatrice, ont une croissance rapide pendant la phase précoce de prolifération, surtout entre la 5ème et 8ème semaine de vie, et at 80 % de leur taille définitive déjà à l’âge de 3 mois. La phase de prolifération dure encore jusqu’à l’âge de 6–9 mois, connaît un plateau pour entrer, à partir de l’âge d’environ 2 ans, dans une phase de régression durant plusieurs années3). Malgré l’incidence très élevée des HI, au vu de leur évolution spontanément favorable, la plupart ne nécessitent pas de traitement et régressent entièrement ou ne laissent que des lésions résiduelles minimes. Le tableau 1 résume les données principales des connaissances actuelles sur les HI.
G G
Introduction
Avec une prévalence de 4–5 % ( chez les nou-
veau-nés prématurés jusqu’à 14
%)
, les hé-
mangiomes infantiles (HI) ne sont pas seule –
ment les tumeurs vasculaires les plus
fréquentes, mais les tumeurs les plus fré-
quentes en absolu chez le nourrisson
1) , 2) .
Connaître les caractéristiques de la croissance
des HI et les variantes possibles laissent est
d’une importance fondamentale pour les con
–
se
ils à donner au x par ent s , p our la plani fication
des contrôles cliniques et le choix du moment
pour une intervention thérapeutique. Les HI ne
sont pas visibles à la naissance, ou alors seu –
lement sous forme de lésion annonciatrice, ont
une croissance rapide pendant la phase pré –
coce de prolifération, surtout entre la 5
ème et 8
ème semaine de vie, et at 80 % d
e leur taille
définitive déjà à l’âge de 3 mois. La phase de
prolifération dure encore jusqu’à l’âge de 6–9
mois, connaît un plateau pour entrer, à partir
de l’âge d’environ 2 ans, dans une phase de
régression durant plusieurs années
3).
Malgré l’incidence très élevée des HI, au vu
de leur évolution spontanément favorable, la
plupart ne nécessitent pas de traitement et
régressent entièrement ou ne laissent que
des lésions résiduelles minimes. Le tableau 1
résume les données principales des connais –
sances actuelles sur les HI.
Environ 10
% d
es HI nécessitent pourtant une
attention particulière:
1.
Hé
mangiomes qui entravent des fonctions
vitales (risque d’obstruction, d’insuffisance
cardiaque par un gros volume de shunt)
2.
HI a
vec ulcération ou risque d’ulcération
3.
HI
laissant une probable lésion inesthétique
durable
3). L’indication au traitement de ces héman
–
giomes ne fait pas de doute.
L’effet et la tolérance excellents du traitement
systémique par propranolol, documentés
entre temps par deux études randomisées et
contrôlées, incitent à un élargissement de
l’indication au traitement, notamment lorsqu’
on
craint de possibles séquelles cosmé
–
tiques
4) , 5) . La décision pour ou contre le trai-
tement devient donc de plus en plus complexe
et nécessite une grande expérience du mé
–
de
cin traitant.
Le propranolol révolutionne
le traitement des hémangiomes
infantiles
La découverte fortuite, pionnière, publiée le
8 juin 2008 dans le New England Journal of
Medicine (NEJM) , de l’exceptionnelle effica-
cité du propranolol sur les HI prolifératifs,
a révolutionné le traitement des hémangio
–
mes 6). Le bétablocant non-sélectif pro pr an –
ol
ol était connu, depuis plus de 50 ans, sur-
tout en cardiologie pédiatrique pour le
traitement e.a. des tachycardies supra-ventri –
culaires et des cardiomyopathies hypertro –
phiques. L’excellente réponse des HI au trai-
tement par propranolol a été documenté pour
96–98
% d
es patients, avec des effets indési –
rables minimes et généralement transitoires
par 50 0 case r ep or t s/sér ies de patient s , deu x
études randomisées et contrôlées ainsi
qu’une méta-analyse avec plus de 1000 cas
rapportés
4) ,7) –9) . Le propr anolol est ainsi deve –
nu, en très peu de temps, le traitement de
Fiche signalétique hémangiome infantile
1. Incidence: 4– 5 % de s nouveau-nés 1), 2) .
2.
Fac
teurs de risque connus: filles, prématurés, grossesses multiples, troubles de l’unité
ut
éro-placentaire, caucasiens, âge de la mère e.a.
2), 18)
3. P athogenèse: inconnue à ce jour. Différentes théories 19), e.a.:
a) Mu
tation somatique des cellules souche des hémangiomes
b)
Hy
poxie pendant la prolifération cellulaire
c)
Th
éorie du placenta
4.
His
tologie: GLUT 1 positive
5.
Ca
ractéristiques de la croissance: croissance maximale entre la 5
ème et 8 ème se
maine de vie 15).
6.
C
lassement
20) :
a) se
lon la croissance: super ficiel, profond, mixte, «minimal growth»
b) se
lon l’extension: focal, segmentaire, multifocal
7.
Théra
pie:
a) HI c
omplexes, thérapie de 1
er choix: propranolol b) HI
superficiels, plutôt petits: év. bétabloquants topiques, réévaluation régulière
c) Lés
ions résiduelles gênantes: intervention chirurgicale et/ou laser à colorant pulsé
Tableau 1: Fiche signalétique de l’hémangiome infantile
Directives suisses pour le traitement par
propranolol des hémangiomes infantiles
Alexandra Smith a), Martin Theiler a) , b) , Dagmar Klima Lange c), Valérie Hauser d), Regula Angst e),
Michael Seeger f), Peter Esslinger f), Dietmar Cholewa g), Enrico Brönnimann h), Stéphanie
Christen-Zaech i), Anthony S. de Buys Roessingh j), Kathrin Neuhaus k), Clemens Schiestl k),
Anne-Marie Calza l), Giorgio La Scala m) und Lisa Weibel a) , b)
Au nom du Swiss Grand Round for Vascular Anomalies in Childhood (SGVAC)
Traduction: Rudolf Schlaepfer, La Chaux- de – Fonds
a)
Ab
teilung für Pädiatrische Dermatologie, Universi –
täts – Kinderspital Zürich, Steinwiesstrasse 75, CH –
8032 Zürich
b)
Der
matologische Klinik, Universitätsspital Zürich,
Gloriastrasse 31, CH -8091 Zürich
c)
Kin
derchirurgische Klinik, Ostschweizer Kinderspi –
tal, Claudiusstrasse 6, CH -9006 St. Gallen
d)
Pä
diatrische Dermatologie, Ostschweizer Kinders –
pital, Claudiusstrasse 6, CH -9006 St. Gallen
e)
Ki
nderklinik, Kantonsspital Aarau, Tellstrasse, CH-
5001 Aarau
f)
Ki
nderchirurgische Klinik, Luzerner Kantonsspital,
Kinderspital, CH – 6000 Luzern 16
g)
Kl
inik für Kinderchirurgie, INSELSPITAL, Universi –
tätspital Bern, Freiburgstrasse, CH 3010 Bern,
h)
Ab
teilung für Kinderchirurgie, Universitäts-Kin –
derspital beider Basel UKBB, Spitalstrasse 33,
CH – 4056 Basel
i)
Serv
ice de Dermatologie Pédiatrique, Centre Hos –
pitalier, Universitaire Vaudois, CH-1011 Lausanne
j)
Serv
ice de chirurgie pédiatrique, Centre Hospita –
lier Universitaire Vaudois (CHUV), CH-1011 Lau –
sanne
k)
Ze
ntrum für brandverletzte Kinder, Plastische und
Rekonstruktive Chirurgie, Universitäts-Kinderspi –
tal, Steinwiesstrasse 75, CH -8032 Zürich
l)
Serv
ice de Dermatologie et vénéréologie, Hôpi –
teaux Universitaires Genève, Rue Gabrielle-Perret-
Gentil 4, CH -1205 Genève
m)
Ce
ntre Universitaire Romand de Chirurgie Pédia –
trique, Hôpital des Enfants, HUG, 6, rue Willy
Donzé, CH -1211 Genève 14
Chères,ee hreseescol
Chèrees, scor,l
G H
Figure 1: Algorithme: traitement systémique par propranolol d’hémangiomes infantiles complexes
Algorithme: traitement systémique par propranolol d’hémangiomes infantiles complexes
Indication au traitement par propanolol
Début idéal du traitement: 4 ème–8ème semaine de vie
• HI segmentaires étendus > 5 cm (Cave PHACES, LUMBAR)
•
HI o
bstructifs (cave H. de la région de la barbe)
•
HI a
vec (risque de) ulcération
•
Lo
calisation problématique (yeux, nez, lèvres,
génital, sein)
•
Dé
figuration durable sans traitement Évaluation/Diagnostic avant traitement
Anamnèse:
• Signes d’insuf fisance cardiaque?
(D
if ficulté à téter? Transpire en tétant? Prise de poids insuf fisante?)
•
Ma
lformation cardiaque connue? Troubles du r ythme?
•
Hy
poglycémies? Maladie métabolique?
•
Mé
dicaments: Enfant? Mère si allaitement?
Anamnèse familiale:
• Malformations cardiaques? Ar ythmie? Morts subites inexpliquées?
Examen clinique:
• Fréquence cardiaque, TA, poids, auscultation, pouls fémoral
•
So
uf fle cardiaque? Ar ythmie? Signes d’insuf fisance cardiaque?
Examens complémentaires:
• Eventuel ECG (encore standard dans de nombreux centres)
•
Bi
lan élargi (tabl. 3) si HI segmentaire étendu
(PHACES, LUMBAR), gros volume de shunt, selon localisation Contre-indications:
• Bradycardie, hypotonie
•
Bl
oc AV > 2
e degré
• Ins
uffisance cardiaque
•
Ob
struction pulmonaire
•
Te
ndance à
l’hypoglycémie
•
Mé
dicaments
(cf. notes du fabricant)
•
Phéoc
hromocytome
ECG et cardiologie pédiatrique,
Autres investigations pédiatriques
Prise en charge interdisciplinaire dans un centre hospitalier pédiatrique Début du traitement
Début de traitement en milieu hospitalier
St
andard:
1
er jour: 2 doses/j de 0.5 mg/kg sous sur veillance
2ème jour: 2 doses/j de 1 mg/kg sous sur veillance
Dosage et augmentation adaptés
individuellement:
**
Syndrome PHACES, maladie card. et
pulm. associée, prématurés Facteurs de risque
St
andard:
• Âge ≤ 8 semaines (âge corrigé)
•
Po
ids ≤ 3.5 kg
•
Sy
ndrome PHACES**
• Ma ladie card. ou pulm. associée
• Te ndance à l’hypoglycémie
Début de traitement en ambulatoire/hôpital de jour
Standard:
• 1er jour: 1 dose à 0.5 mg/kg
sous surveillance
•
Po
ursuite à domicile 2 doses/j à 0.5 mg/kg
•
Dè
s 3
ème–7ème jour: 1 dose à 1 mg/kg
sous surveillance
•
En
suite à domicile 2 doses/j de 1 mg/kg
Surveillance
• TA, fréq. cardiaque: avant, 1 et 2 h après 1
ère dose
• Gl
ycémie seulement si indication spécifique Dosage
• Standard: 2 doses/j de 1 mg/kg, inter valle min. 9 h
• In dividuellement: jusqu’à 3 mg/kg/j en 3 doses,
inter valle min. 6 h
•
Do
se quotidienne toujours en 3 doses et le cas
échéant dosage et augmentation individuels si:
• Pr
ématuré jusqu’au terme calculé
• Sy
ndrome PHACES
• Ma
ladie card. et pulm. associée
Suivi
Contrôles:
après 1 mois, puis tous les 2 mois
• Poids, pouls, auscultation
•
Docu
mentation photographique
•
Ad
aptation du dosage
Durée du traitement: 6 -12 mois ( jusqu’à 18
mois) En cas de récidive, reprise du traitement oui
normal
anormal
anormal normal
oui non
Légende:
*
Co
mmentaire cf. texte
**
Ce
ntre hospitalier cf. tabl. 4
cf. box «Dosage»
Valeurs de référence –
limite inférieure/âge*:
Âge (mois)
FC TA
0
–3
10
0
65
/45
3–6
90 7
0/50
6–12
80 8
0/55
RédacticcoéactcctnAr
RédacctiotnAair
G I
ment basé sur l’évidence, avec un très haut
degré de sécurité concernant le dosage, le
suivi et les effets indésirables. Dans l’étude
multicentrique internationale de phase II/III,
randomisée et contrôlée en double aveugle
( DB CT ) déjà cité e de Léauté – L abr èze et coll.
5),
456 nour r is sons âgés de 5 semaines à 5 mois
avec un HI néces sit ant un tr aitement , ont r eçu
un placebo ou un des régimes thérapeutiques
suivants:
1 ou 3 mg/kg/jour de propranolol (Heman –
giol
®) pendant 3 ou 6 mois, en 2 doses quoti –
diennes à un intervalle de 9 heures.
La formule avec 3 mg/kg/jour pendant une
durée de 6 mois s’est avérée supérieure aux
autres
5). Les ef fet s indésir ables du tr aitement
sont, dans la plupart des cas, bénins et tran –
sitoires et n’ont que très rarement nécessité
l’interruption du traitement. Les symptômes
HI prolifératifs n’est toujours pas connu. Les
trois mécanismes suivants, qui s’imbriquent
partiellement, sont discutés
10 ) , 11) :
1.
Va
soconstriction («palissement» et «ramol –
lissement» rapides des HI)
2.
Inhib
ition de l’angiogénèse par une restric –
tion/suppression des gènes VEGF et bFGF
(arrêt de croissance)
3.
In
duction de l’apoptose des cellules endo –
théliales des capillaires (régression).
Expériences thérapeutiques –
sécurité et effets indésirables
La profusion de données de ces sept der-
nières années à propos du traitement des HI
par propranolol ainsi que les décennies d’ex-
périence des cardiologues pédiatres dans le
traitement de nourrissons avec ce médica –
ment, nous permettent aujourd’hui un traite –
premier choix pour les HI complexes. La publi
–
cation en 2015, dans l’ European Journal of
Pediatrics , des recommandations de consen –
sus européennes concernant l’indication, la
con
du
ite et le suivi du traitement par propra
–
nolol, recommandations qui représentent
aussi, dans les grandes lignes, la base des
directives suisses
8), constitue un jalon supplé-
mentaire. Depuis 2014 le propranolol est offi –
ciellement admis en Suisse par Swissmedic
pour le traitement des HI complexes, sous
forme de sirop (Hemangiol
®, Pierre Fabre).
Faisant suite à la recommandation de l’Office
fédéral des assurances sociales (OFAS) de
2015, les coûts du traitement sont pris en
charge par l’Assurance invalidité (OIC chiffre
311). L’information médicale concernant le
médicament se base sur les résultats de
l’étude multicentrique randomisée et contrô –
lée
5); nous en tenons compte dans nos r ecom –
mandations. Cet article illustre à l’aide d’un
algorithme l’application pratique des recom –
mandations de traitement, tout en prenant en
compte les conditions suisses (figure 1) .
Mode d’action
Le propranolol est indiqué pour le traitement
des HI (GLUT1 positif à l’histochimie) et n’a
pas d’effet convaincant sur d’autres anoma –
lies vasculaires (tableau 2), notamment pas
sur les hémangiomes congénitaux GLUT1-
négatif s , qui se pr ésentent déjà à la nais sance
dans leur forme définitive et connaissent
une involution soit rapide, partielle ou alors
absente ( «Rapidly, Partially, Non-Involuting
Congenital Hemangioma» , RI CH , PI CH , NI CH ) .
Le mécanisme d’action du propranolol sur les
HI avec de possibles malformations et complications associées.
Caractéristiques HI Associations possiblesDiagnostic
Hémangiome segmentaire > 5 cm Syndrome PHACES?Angio -IRM (tête, cou), US, avant thérapie!
Ophtalmologie, TSH
Syndrome LUMBAR? US abdominal + spinal, év. IRM/Angio -IRM du
bassin et de l’abdomen, cf. littérature
21)
HI multiples (nombre > 5)H émangiomes du foie?US abdominal, si négatif à év. répéter
selon l’évolution, TSH
Hémangiomes sous-cutanés étendus 1.
Vé
rifier le diagnostic, DD?
2.
Co
mplications ?
a) O
bstruction?
b) V
olume du shunt?US duplex, év. IRM
Si volume de shunt important: US, TSH
Localisation problématique:
A
Pa
upière supérieure
B.
en »
barbe » A.
A x
e optique?
Gl
aucome?
B.
«B
arbe»: cave association possible
d’
hémangiome des voies respiratoires
s
upérieures
22)
A. Ophtalmologie (urgente!!!)
B . Si symptômes (stridor, etc.): ORL
Tableau 3: HI avec de possibles malformations et complications associées
Anomalies vasculaires: classification ISSVA
Tumeurs vasculaires Malf ormations vasculaires
Bénignes:
•
Hé
mangiomes infantiles (HI)
•
Hé
mangiomes congénitaux (RICH, NICH, PICH)
•
Tu
fted angioma
•
Gr
anulome pyogénique
Localement agressifs ou borderline:
•
Hé
mangioendothéliome Kaposiforme
Malignes Simples:
•
Mal
formation capillaire
•
Mal
formation lymphatique
•
Mal
formation veineuse
•
Mal
formation artério-veineuse
Mixtes
Associées à d’autres anomalies
Tableau 2: Anomalies vasculaires: classification ISSVA
Adapté, simplifié d’après: Wassef, M. et coll. Vascular Anomalies Classification: Recommendations from the Inter –
national Society for the Study of Vascular Anomalies, Pediatrics. 2015; 136(1): e203–14
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Proff. R.Tao b
G J
La croissance des HI qui nécessitent poten-
tiellement un traitement, exige un suivi étroit.
Pour fi xer les inter valles de contrôle, la «r ègle
de Höger» a fait ses preuves
10 ):
Âge en mois = intervalle d’évaluation en se-
maines
Initiation du traitement :
où et par quel médecin?
Le traitement devrait se faire par un médecin
expérimenté dans l’appréciation d’anomalies
vasculaires et la prise en charge de nourris-
sons. De plus, le traitement devrait être mis
en route dans une institution qui est en me-
sure de traiter des complications aiguës chez
le nourrisson
8). Les patients avec d’éven-
tuelles malformations ou complications asso –
ciées à l’HI ainsi que les nourrissons avec des
maladies concomitantes ou les prématurés
devraient être pris en charge par une équipe
pluridisciplinaire dans un centre hospitalier
(tableau 4) .
Diagnostic et traitement
Avant de débuter le traitement, l’enfant sera
soigneusement examiné afin d’identifier
d’éventuelles contre-indications (figure 1). Le
cas échéant seront demandées des investiga –
tions complémentaires pédiatriques ou en
cardiologie pédiatrique. L’ECG n’est pas un
élément obligatoire de l’évaluation, bien
Les excellentes données concernant le traite
–
ment systémique par propranolol, font que
nous sommes confrontés de plus en plus
fréquemment à un collectif de patients dans
une «zone grise», c’est à dire présentant des
«HI avec p os sible at teinte cosmétique», situa –
tions qui demandent une approche critique.
Non seulement poser l’indication mais aussi
considérer les éventuels diagnostics différen –
tiels exige du médecin traitant une connais-
sance détaillée des anomalies vasculaires et
des tumeur s de la p etite enf ance ( tel r hab do –
myosarcome, fibromyosarcome, myofibrome)
(tableau 2) .
Avant d’initier un traitement par bétablo –
quants, les enfants avec un hémangiome dit
segmentaire (hémangiome en plaque, figure
3 ) doi vent êtr e inves tigués à la r e cher che d ’un
syndrome PHACES
1a ) ou d ’un sy ndrome LUM –
BAR 1b ) (tableau 3) 14 ).
Si l’indication au traitement par bétablo –
quant s est donnée, celui – ci dev r ait débuter le
plus tôt possible, idéalement entre la 4
ème et
10 ème semaine de vie. Comme déjà mention –
né
, la croissance de l’HI est la plus rapide
pendant la phase précoce de prolifération,
entre la 5
ème et 8 ème semaine 15 ). Cela permet
d’obtenir un meilleur résultat et d’éviter des
séquelles irréversibles comme l’atrophie cuta –
née, la formation de cicatrices ou de tissu
conjonctif ex
cé
dentaire (figure 4) . L’enfant
dev r ait êtr e adr es sé dans les meilleur s delais ,
idéalement à l’âge de 4–5 semaines. La télé –
dermatologie, disponible dans plusieurs
centres en Suisse, s’avère très utile dans ces
situations, puis
qu
’elle permet une évaluation
rapide des lésions
15 ). La sensibilisation des
obstétriciens et des pédiatres assurant le
suivi périnatal est importante, 65
% d
es HI se
manifestant pendant la première semaine de
vie par des lésions annonciatrices ( figure 5 )
14 ).
observés le plus fréquemment, souvent uni
–
quement pendant la phase initiale du traite –
ment, étaient entre autres: une discrète
acrocyanose, des diarrhées, des trou
bl
es du
sommeil, une irritabilité, des «bronchites»
5).
Ont aussi été notés une diminution moyenne
de la fréquence cardiaque de 3 bpm et de la
pression systolique de 3 mmHg pendant la
première heure après l’administration du
médicament
5). Tr ès r ar ement ont été obser vés
une hypoglycémie symptomatique, des brady –
cardies, une hypotension ou un bronchos –
pasme
5). Par une évaluation minutieuse avant
le traitement, un suivi adéquat et une instruc –
tion précise des parents, le risque de ces évè –
nements est réduit à un minimum (figure 1) .
La question d’éventuels effets indésirables à
long ter me, not amment d ’ef fet s cog nitif s et sur
le comportement des enfants traités, font
l’objet de discussions d’experts et de futures
études prospectives. A l’origine de ces ques –
tionnements se trouvent des réflexions théo –
riques sur la pharmacocinétique de cette
substance hautement lipophile. Labrèze et coll.
attirent explicitement l’attention sur le fait que
jusqu’ici aucun cas avec des troubles de ce
type n’a été décrit chez des enfants, alors que
le propranolol a été, ces derniers 40 ans, le
bétabloquant le plus fréquemment utilisé et le
mieux documenté à l’âge pédiatrique
13 ).
Directives suisses pour
le traitement d’hémangiomes
problématiques par propranolol
Indications et choix du bon
moment pour débuter le traitement
Pour environ 10
%
des HI l’indication au traite –
ment systémique par bétabloquants est évi –
dente ( figure 1)
8). On peut attribuer les HI
nécessitant un traitement à trois catégories 3):
1.
HI
qui entravent des fonctions vitales (risque
d’obstruction de l’axe visuel, des voies res –
piratoires, des oreilles, ou d’insuffisance
cardiaque par un gros volume de shunt)
2.
HI a
vec risque d’ulcération (figure 2)
3.
HI a
vec défiguration durable.
Tableau 4: HI pris en charge dans un centre
hospitalier.
Figure 2: Hémangiome infantile de la lèvre
inférieure avec ulcération débutante (flèche).
Figure 3: Grand hémangiome en plaque.
HI pris en charge dans
un centre hospitalier
• Hémangiomes multiples > 5 (cave hémangiomes du foie)
•
Hé
mangiomes ulcérés
•
Hé
mangiomes potentiellement obstructifs
•
Hé
mangiomes segmentaires étendus
(> 5 cm
): recherche d’un syndrome
PHA
CES, LUMBAR
•
Ma
ladies cardiaques et/ou pulmonaires
a
ssociées
•
Pr
ématurés jusqu’au terme calculé
•
Hé
mangiomes étendus avec shunt
po
tentiellement volumineux
(ca
ve insuffisance cardiaque)
1a) Posterior fossa malformation, Hemangioma of the
F ace/neck, Arterial anomalies, Coarctation of the
aorta and Cardiac defects, Eye abnormalities,
Sternal defects.
1b)
Lo
wer body hemangioma, Urogenital anomalies,
Ulceration, Myelopathy, Bony deformities, Anorec –
tal malformations, artierial anomalies, Renal ano –
malies.
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Proff. R.Tao b
G K
les hypoglycémies et les complications pul-
monaires, la transmission claire des trois
messages-clé suivants est essentielle:
1.
Adm
inistration du médicament toujours
lors d’un repas
2.
Susp
endre la médication lorsque l’enfant
mange moins, en cas de diarrhées (p.ex.
gastroentérite) ou d’un état général dimi –
nué suite à une infection hautement fébrile
3.
Su
spendre la médication en cas de bron-
chite obstructive (consultation du pédiatre
en cas de toux).
Après une interruption du traitement, celui-ci
peut être repris avec la dose préalablement
atteinte.
La remise d’une brochure d’information pour
parents, au moment où l’indication au traite –
ment est posée, s’est avérée utile au niveau
international et est recommandée
17 ).
Durée du traitement et suivi
L’étude multicentrique randomisée et cont
–
rô
lée a montré qu’après 6 mois de traitement
et suite à l’arrêt de celui- ci, jusqu’à 35
% d
es
HI ont connu une certaine aggravation et 10
%
d
es cas une prolifération nécessitant la reprise
du traitement
5). Cela correspond à notre expé –
rience clinique: il a été démontré qu’après une
durée de traitement de 12 mois le taux de re –
bond est, à 5
% ,
significativement inférieur
8).
Comme le groupe d’experts européen, nous
recommandons donc de poursuivre le traite –
ment suffisamment longtemps, si nécessaire
jusqu’à 12 mois ou, selon le type d’héman –
giome, même plus longtemps (figure 1) .
Les anomalies vasculaires cérébrales sont les
malformations extra-cutanées les plus fré
–
quemment associées au syndrome PHACES
14 ).
L’éventuelle réduction de la perfusion céré –
brale dans le cadre d’un traitement par béta-
bloquants comporte le risque d’ischémie cé –
rébrale; pour ces patients l’introduction du
traitement se fera lentement avec une adap –
tation personalisée des doses, sous surveil –
lance stricte dans un centre spécialisé.
Suivi et information des parents
Lors de l’introduction du traitement, le gold
standard de la surveillance consiste à mesu-
rer la pression artérielle et la fréquence car-
diaque avant la première dose de propranolol
ainsi qu’une et deux heures après. Lorsque
l’introduction se fait en ambulatoire, le patient
peut ensuite regagner son domicile, avec
des instructions précises pour les parents.
Quand le traitement est commencé en milieu
hospitalier, ces contrôles sont effectués après
chaque prise de médicament. Les valeurs de
référence dans l’algorithme correspondent à
la norme inférieure pour l’âge ( figure 1)
16 ).
Pendant les phases de sommeil profond, des
valeurs plus basses (surtout de la fréquence
cardiaque) sont acceptables, notamment
chez les jeunes nourrissons. Ces valeurs ne
p eu vent à notr e av is par contr e pas êtr e consi –
dérés comme limite inférieure pour le suivi
16 ).
Les contrôles de la glycémie ne sont pas né-
cessaires de routine et restent réservés à des
indications spécifiques. La famille doit être
instruite sur l’utilisation de la pipette (p.
ex.
d
osage en milligrammes et pas en millilitres
pour Hémangiol
®), l’observation des inter –
valles entre les doses ainsi que l’identification
des possibles effets indésirables. Afin d’éviter
qu’
enc
ore effectué dans certains centres
8).
Les HI qui exigent un bilan plus approfondi
sont énumérés dans le tableau 4 et devraient
être pris en charge dans un centre spécialisé.
Initiation du traitement en ambulatoire
ou en milieu hospitalier?
Le choix de débuter le traitement en ambula –
toire ou en milieu hospitalier dépend de fac –
teur s dé finis s ant les patient s à r is que accr u de
complications (hypoglycémies, apnées, effets
indésirables cardiovasculaires) ( figure 1).
L’intervalle d’une semaine avant l’augmenta –
tion de la dose, conseillé par le f abr icant , p our
l’introduction du traitement n’est pas toujours
réalisable en clinique, ainsi nous conseillons
un intervalle minimal de 2–3 jours.
Dosage
Nous adhérons à la r ecommandation du g roup e
d’experts européens qui vise une dose cible
de 2–3 mg/k g/jour
8). L’expérience clinique et
la plupart des études publiées mettent en
évidence une excellente réponse avec une
dose de 2 mg/kg/jour. Nous recommandons
donc de réserver des dosages plus élevés à
des cas particuliers (nécessité d’une réponse
urgente ou effet insuffisant avec une dose de
2 mg/kg/jour) ( figure 1). Deux doses quoti-
diennes en lieu et place des trois administrées
généralement jusqu’ici représentent un allè –
gement appréciable pour les familles et de-
vraient être visées, à moins qu’il existe une
contre-indication ( figure 1). Lorsque la dose
dépasse 2 mg/kg/jour, en présence d’une
maladie cardiaque ou pour les prématurés
jusqu’à la date calculée du terme, nous
conseillons néanmoins de répartir la dose
quotidienne sur trois prises.
Figure 4: Hémangiome référé trop tard (a): en raison de la prolifération déjà très impor –
tante de la composante superficielle, un résultat idéal (b) n’est plus possible malgré le
traitement systémique par propranolol. Figure 5: Typique lésion annonciatrice
d’hémangiome infantile.
1Prof. ffRPof.ff.Tab
1Proff. R.Tao b
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Correspondance
Dr Alexandra Smith et Dr Lisa Weibel
Abteilung für Pädiatrische Dermatologie
Universitäts-Kinderspital Zürich
Steinwiesstrasse 75
CH-8032 Zürich
lisa.weibel @ kispi.uzh.ch
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RédacticcoéactcctnAr
RédacctiotnAair
Informations complémentaires
Auteurs
Dr. med. Alexandra Smith , Pädiatrische Dermatologie, Departement Kinder- und Jugendmedizin, Kantonsspital Winterthur Dr. med. Martin Theiler , Pädiatrische Dermatologie, Zentrum Kinderhaut, Universitäts-Kinderspital Zürich Dagmar Klima Lange Valérie Hauserd Regula Angst Michael Seeger Dr. med. Peter Esslinger , Leitender Arzt, Kinderchirurgische Klinik, Kinderspital, Luzerner Kantonsspital Dietmar Cholewa Enrico Brönnimann PD Dr med. Stéphanie Christen-Zaech , Unité de dermatologie pédiatrique, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois et Université de Lausanne Anthony S. de Buys Roessingh Kathrin Neuhaus Clemens Schiestl Anne-Marie Calza Giorgio La Scala PD Dr. med. Lisa Weibel , Pädiatrische Dermatologie, Zentrum Kinderhaut, Universitäts-Kinderspital Zürich Andreas Nydegger