La plupart des médecins assistants se sentent insuffisamment préparés, même peu de temps avant la fin de leur formation postgraduée, à effectuer et interpréter correctement l’examen gynécologique d’enfants et adolescentes, bien que cela fasse partie de leur curriculum de formation. Cet article vise à améliorer les compétences pratiques en gynécologie de l’enfant des pédiatres. Dans la première partie nous décrivons le déroulement de cet examen, dans la deuxième partie suivront les constatations les plus fréquentes aux différents âges et leur approche à l’aide d’exemples pratiques.
25
Figure 1: Organe génital féminin – esquisse avec termes. Source: Hürlimann R.Figure 2 :
Variantes anatomiques de l’hymen.
Source: Fontana S.
Introduction
L a p lupar t des m é de cins as sis t ant s s e s entent
insuffisamment préparés, même peu de
temps avant la fin de leur formation postgra –
duée, à effectuer et interpréter correctement
l’examen gynécologique d’enfants et adoles –
centes, bien que cela fasse partie de leur
curriculum de formation. Cet article vise à
améliorer les compétences pratiques en gy –
nécologie de l’enfant des pédiatres. Dans la
première partie nous décrivons le déroule –
ment de cet examen, dans la deu x ième par tie
suivront les constatations les plus fréquentes
aux différents âges et leur approche à l’aide
d’exemples pratiques.
I. Technique d’examen
Généralités
L’organe génital féminin et les pathologies
r elati ves sont empr eint s , aus si à notr e ép o que
« sexualisée », de gêne ; pour réussir, l’examen
gynécologique suppose donc de la part du
Examen gynécologique de l’enfant:
quand, comment, pourquoi ?
Sonja Fontana, Renate Hürlimann, Zurich
Traduction : Rudolf Schlaepfer, La Chaux- de – Fonds
médecin un haut degré de compréhension
pour les circonstances 1). Le mé decin doit f air e
preuve vis à vis de la patiente et de ses pa –
rents de savoir faire et d’empathie adaptée à
l’âge, il doit avoir le temps, le calme et la pa –
tience nécessaires
2).
Déroulement
L’exploration gynécologique sera toujours
précédée d’une anamnèse et d’un examen
pédiatrique général, incluant les stades de
Tanner. Une approche empathique permet
presque toujours de créer une relation de
confiance et d’effectuer ensuite les examens
nécessaires. L’entretien préalable est par ail –
leurs une excellente occasion de prévention,
en soulevant p. ex. des questions concernant
• le développement pubertaire
• l’hygiène
• les situations de risque (p. ex. atteintes à
l’intégrité sexuelle)
• et pour la détection précoce de variantes
de la norme et de pathologies.
Il est absolument nécessaire de connaître les
termes corrects et de pouvoir expliquer les
différentes structures anatomiques dans la
région génitale (fig. 1) .
On expliquera toujours au préalable l’examen
gynécologique à la patiente et à la personne
l’accompagnant : il ne s’agit pas d’un examen
au moyen d’instruments comme pour la
femme adulte. Rien que cette remarque per –
met déjà de réduire les craintes. Il est impor –
tant de préciser que l’hymen ne sera pas
blessé par l’examen. Une photographie ou un dessin peut s’avérer utile, de nombreuses
personnes pensant encore que l’hymen
couvre ou obstrue complètement l’introït
« vierge » (fig. 2)
.
L’objectif de l’examen est d’éviter tout trau –
matisme. Pour une enfant peureuse l’examen
ne sera parfois possible que lors d’une
consultation ultérieure. Les examens sous
nar cose ne sont que r ar ement né ces s air es , le
plus souvent lors de lésions traumatiques
(chute à califourchon, écartement), lors de
suspicion de corps étranger ou de tumeur, de
saignements d’origine inconnue. À la clinique
pédiatrique de Zurich nous utilisons la séda –
tion-analgésie par gaz hilarant, ce qui permet
d’éviter la plupart des narcoses.
Inspection
L’inspection est la première étape de l’exa –
men gynécologique. La petite fille est cou –
chée sur le dos en position de la grenouille, la
fille plus âgée sur le fauteuil gynécologique
avec repose-jambes. Les nourrissons et pe –
tites filles peuvent aussi aisément être exami –
né es dans les br as de la p er sonne l ’accompa –
gnant (fig. 3) .
prépuce
grandes lèvres petites lèvres
méat externe de l’urètre
ligaments péri-urétraux vagin
hymen
fosse naviculaire
commissure postérieure périnée
Résumé
L’examen des organes génitaux est une
partie intégrante du status du nouveau-né
féminin et devrait se faire une fois aussi lor s
des examens préventifs ou lorsqu’une ques –
tion spécifique se pose. Il consiste typique –
ment en une inspection par traction et sé –
paration, un examen au moyen
d’instruments étant rarement nécessaire.
La connaissance des particularités anato –
miques et endocriniennes des différents
stades de développement de la fille est une
condition indispensable de l’examen gyné –
cologique en pédiatrie. Ce n’est qu’ainsi
qu’on pourra interpréter correctement les
constatations relevées et faire la différence
entre variante de la norme et pathologie.
Une formation spécifique incluant la
connaissance de l’anatomie féminine et des
pathologies les plus fréquentes éviteront
des diagnostics, des traitements et des in –
quiétudes parentales inutiles.
hymen annulaire hymen semi – lunaire hymen microper foré
atrésie hyménale hymen septal hymen criblé
25 OrgarrneOrérrgitl
25 Orga5neé5nganitlefmn–é5s5qateutesvtncrngetgeutesvru5st.étng
26
Figure 4: Méthode par traction: prudemment
en direction de l’examinateur et vers le péri –
née. Source: Hürlimann R.
Figure 5: Diagnostic de pertes blanches.
Source: Hürlimann R.
Figure 6 : Fluor néonatal et mise en évidence
du vestibule vaginal par traction. Source:
Hürlimann R.
Nous conseillons d’examiner l’adolescente
sans la présence de la personne l’accompa –
g nant car cela donne l ’o ccasion de par ler ave c
la patiente seule (sexualité, contraception,
infections sexuellement transmissibles). Par
la suite, lors de l’examen gynécologique et
notamment si l’examinateur est de sexe mas –
culin, nous recommandons, pour des raisons
médicolégales, la présence d’une deuxième
personne professionnelle (assistante médi –
cale).
Une bonne source de lumière est indispen –
sable. Le colposcope ou une loupe facilitent
l’interprétation clinique.
La position genoux-coudes peut s’avérer utile
car elle permet une bonne visualisation du
vagin distal (p. ex. lors de suspicion de corps
étranger). Dans cette position l’hymen se
déplie sous l ’ef fet de la g r av ité et les contour s
se laissent mieux inspecter.
Remarque: nous proposons toujours à l’en –
fant un miroir avec lequel il peut suivre l’exa –
men. Cela aide la patiente à se sentir un élé –
ment actif de l’examen, ne la distrait pas
seulement mais contribue aussi à comprendre
les explications. Traction et séparation
Les méthodes par séparation (écartement
latéral à la hauteur de la jonction entre
grandes lèvres et périnée) et sur tout de trac
–
tion (en tenant les deux grandes lèvres entre
pouce et index et en tirant légèrement en di –
rection de l’examinateur et du périnée) per –
mettent une inspection optimale du vestibule
avec clitoris, méat urétral, hymen, partie anté –
rieure du vagin, fosse naviculaire et commis –
sure postérieure (fig. 1 et 4). L’inspection se
concentr er a sur la pr ésence de p oils pubiens ,
l’aspect de la peau au niveau de la vulve, la
taille et la forme du clitoris et du prépuce, le
smegma interlabial, les signes d’œstrogénisa –
tion du vagin et de l’hymen, la configuration
de l’hymen, ainsi que le périnée et la région
anale et périanale.
Remarque: faire tousser la patiente si les
bords de l’hymen sont collés; par l’augmenta –
tion de la pression intra-abdominale l’introït
s’ouvre et le vagin devient mieux visible.
Prélèvement de sécrétions vaginales
Lors de pertes vaginales on procèdera en
général à une analyse microbiologique (pré –
paration native et culture). Chez l’enfant le
prélèvement se fait en position dorsale. Nous
utilisons avec succès un cathéter pour aspi –
ration à double chambre pour nouveau-nés
(fig. 5) . On l’introduit prudemment dans le
vagin, en distrayant l’enfant, sans toucher
l’hymen ou d’autres structures de la vulve. Le
prélèvement par frottis au moyen d’un coton-
tige humidifié avec du NaCl n’est permis
qu’après l’œstrogénisation, étant sinon dou –
loureux. Les frottis de la vulve sont affectés
d’un haut degré de contamination et utiles
seulement lors de questions spécifiques (her –
pès génital, ulcère de Lipschütz). Vaginoscopie
La vaginoscopie (examen du vagin proximal
et du col utérin) est indiquée en présence de
pertes vaginales persistantes d’origine indé
–
terminée, comme on les rencontre en pré –
sence de corps étrangers, de saignements
vaginaux ou de suspicion de tumeur. La vagi –
noscopie est possible chez l’enfant réveillée
qui coopère bien, éventuellement elle sera
effectuée sous sédation au protoxyde d’azote.
II. Constatations fréquentes
Nouveau-né / nourrisson
Contrairement à l’organe génital masculin,
après la naissance on ne prête pas ou peu
d’attention à l’organe génital féminin. Sous
l’influence des hormones maternelles les or –
ganes génitaux sont œstrogénisés, l’hymen
étant bulbeux et les petites et grandes lèvres
proéminentes. Pendant les 10 premiers jours
1-2 % des fillet tes p eu vent même pr ésenter un
saignement physiologique par privation. Les
deux premiers examens préventifs (après la
naissance et à l’âge de 1 ou 2 mois) offrent
une excellente possibilité pour expliquer aux
parents l’anatomie féminine et les mesures
d’hygiène. Une attention particulière sera
portée à l’hymen, rendu particulièrement bien
Figure 3:
Examen gynécologique de la fillette,
dans les br as de la p er sonne l ’accompag nant .
Source: Fontana S.
25 OrgarrneOrérrgitl
25 Orga5neé5nganitlefmn–é5s5qateutesvtncrngetgeutesvru5st.étng
27
Circoncision féminine (Female Genital Mutilation, FGM): d’actualité en Suisse aussi !
Avec les parents originaires des pays concernés (cf. ci-dessous) le sujet de la cir concision
féminine doit être abordé prudemment et ils doivent être informés sur la législation suisse.
La circoncision féminine est considérée une grave atteinte à l’intégrité corporelle.
L’inspection génitale avec les explications de l’anatomie féminine et le fait d’aborder la
FGM sans stigmatiser, montre aux parents la sensibilisation de l’examinateur à cette tra –
dition désastreuse.
Brochure d’information pour les parents en plusieurs langues: www.migesplus.ch
Information pour la prévention de la circoncision féminine destinée au personnel médical :
www.caritas.ch
Source du graphique: www.excision.ch
visible par l’œstrogénisation. Le terme vient
de Hymen ou Hyménée, le dieu grec du ma –
riage. Le « mythe de la virginité » est largement
répandu dans la population
3). L’hymen n’est
pas une membrane fermée, à moins qu’il ne
s’agisse d’une atrésie hyménale.
Remarque: cherchez, lors de l’examen du
nouveau – né, les per tes blanches dues à l ’œs –
trogénisation : en présence d’une leucorrhée
on peut partir du principe qu’il y a un vagin et
qu’il est ouvert (fig. 6) !
Un hymen fermé nécessite des investigations.
L a cause la plus f r é quente ( f r é quence 1:10 0 0
filles) est l’atrésie hyménale, suivie par l’agé –
nésie de l’utérus et du vagin dans le cadre du
syndrome MRKH (Maier-Rokitansky-Küster-
Hauser, 1: 50 0 0 ) . Le sy ndr ome MRK H es t r ar e
mais en Suis se nais sent tout de même chaque
année 8 filles avec une atrésie vaginale.
L a pr ésence d ’une hy p er trophie du clitor is ou
d’un sinus urogénital évoque la possibilité
d’un Disorder of Sex Development DSD (p. ex.
syndrome adrénogénital, XY-DSD). Des inves –
tigations endocrines immédiates s’imposent.
L’introït peut aussi être obstrué par un hémi –
vagin proéminent, rempli de mucus, dans le
cadre d’un syndrome OHVIRA (Obstructed
Hemivagina with Ipsilateral Renal Anomaly)
(fig. 7) . Lorsqu’on diagnostique une agénésie
rénale unilatérale, il est donc important, chez
la fille, de rechercher par échographie un
dédoublement des organes génitaux internes. Remarque:
chez une fille avec une agénésie
rénale connue, exclure par échographie un
éventuel hémivagin obstrué dans le contexte
d’un syndrome OHVIRA, afin qu’elle ne se
présente pas à la puberté avec un hémi-hé –
matocolpos douloureux !
Avec les familles originaires des pays en ques –
tion, la première consultation préventive offre
l’occasion d’aborder la question de la circon –
cision féminine (voir encadré).
Période de latence
La période de latence (dès l’âge de 2 ans) est
caractérisée par l’absence d’œstrogènes. La
muqueuse est par conséquent mince, atro –
phique avec des capillaires bien visibles et
très sensible au toucher. C’est la raison pour
laquelle les irritations, inflammations et infec –
tions bactériennes des organes génitaux sont
fréquentes pendant cette période. Il faut être
particulièrement attentif à ne pas toucher
l’hymen à cet âge, tout contact étant doulou –
reux. La présence d’une personne de
confiance donne un sentiment de sécurité à
l’enfant. Une approche joueuse (p.ex. à l’aide
d’une peluche) peut s’avérer précieuse. Le fait de donner à la patiente le sentiment de
contrôler la situation (dans le sens qu’elle
peut dire « stop » à tout moment) réduit ulté
–
rieurement ses craintes et son malaise.
Pendant la phase de latence une inspection
par séparation et traction est suffisante dans
la grande majorité des cas. L’examen du vagin
de du col utérin se limite à la suspicion de
corps étranger, aux saignements vaginaux
p er sis t ant s ou au x p er tes vaginales ne r ép on –
dant pas au traitement. L’examen à l’aide d’un
otoscope n’est pas adéquat et n’apporte pas
d’informations pertinentes.
L’examen rectal peut livrer des informations
complémentaires utiles lorsqu’on suspecte un
corps étranger. Il est souvent possible de
palper un corps étranger par voie rectale et
de le déplacer ensuite avec le doigt, chez un
enfant coopérant, en direction de l’introït
vaginal.
Il n’est pas rare qu’un hymen microperforé
mime une atrésie hyménale. Une technique
d’examen correcte (traction suffisante, faire
tousser, éventuellement exploration avec la
Figure 7:
Syndrome OHVIRA: Obstructed
Hemivagina and Ipsilateral Renal Agenesia.
Source: Fontana S.
25 OrgarrneOrérrgitl
25 Orga5neé5nganitlefmn–é5s5qateutesvtncrngetgeutesvru5st.étng
28
Figure 8: Sy né chie des b or ds v ul vair es. Sour –
ce: Hürlimann R.
Figure 9 : Straddle injury. Source : Fontana S.
Figure 10 : Prolapsus urétral. Source : Hürli –
mann R.
sonde gastrique la plus fine) permet pourtant
de mettre en évidence l’introït.
Cas cliniques
« Ma fille n’a pas de vagin »
La consultation eut lieu le jour même, après
un appel téléphonique de la maman remontée
au cabinet: « Ma fille n’a pas de vagin ! ». Elle
l’aurait remarqué en baignant sa fille de deux
ans et tout de suite recherché sur internet,
est- ce qu’il faudra lui transplanter un utérus?
Lors de l’examen gynécologique on constate
rapidement ce que la mère entend : les bords
de la vulve sont collés depuis la commissure
postérieure presque complètement jusqu’au
prépuce du clitoris (fig. 8) .
La fillette a des langes, il n’y a pas eu d’infec –
tions urinaires à ce jour. Après avoir expliqué
que ces adhérences sont fréquemment
constatées par hasard et ne nécessitent au –
cun traitement aussi longtemps que la fille a
des langes, une maman visiblement soulagée
quitte le cabinet.
Les adhérences labiales sont fréquentes pen –
dant la phase de latence, surtout à l’âge de 2
à 4 ans. À l’origine de l’adhérence se trouve
une ir r it ation des b or ds de la v ul ve, on voit une
fine ligne translucide. Cette synéchie pendant
la petite enfance est généralement asympto
–
matique. Bien que fréquemment mentionné
dans la littérature, il n’y a pas d’infections ou
rétentions urinaires. Des symptômes appa
–
raissent lorsque la fillette se rend aux toi –
lettes : quelques gouttes d’urine mouillent ré –
gulièrement les culottes après la miction.
Le traitement consiste à appliquer sur la sy –
né chie, en é car t ant tr ès pr udemment , à l ’aide
d’un coton-tige l’équivalent d’une tête
d’épingle d’une crème contenant des œstro –
gènes. En appliquant quotidiennement et correctement, l’adhérence se détache dans
les 4-6 semaines. Nous conseillons de pour
–
suivre l’application de la crème à base d’œs –
trogènes pendant encore 2 semaines sur les
bords de la vulve, et ensuite d’une simple
crème grasse afin de prévenir que les adhé –
rences se reforment. La séparation méca –
nique des adhérences est obsolète : elle est
souvent traumatisante et occasionne un re –
collement cicatriciel.
Chute depuis un banc
La patiente âgée de 6 ans arrive aux ur –
gences : en grimpant sur un banc public elle a
glissé et est tombée les jambes écartées sur
le dossier. Elle saigne dans la région génitale,
la fillette a mal et elle a peur.
Après lui avoir donné un analgésique, on peut
examiner la fillette en position de la grenouille.
On constate une blessure dans la région de la
fosse naviculaire, profonde, qui saigne et né
–
cessite des points de suture. Une deuxième
petite blessure se trouve sur la partie inté
–
rieure de la petite lèvre droite. Le méat urétral
et l’hymen ne sont pas blessés. Après l’anal
–
gésie la fille peut uriner. La blessure est sutu –
rée narcose avec du matériel résorbable.
Après prescription d’analgésiques et de bains
de siège nettoyants et regraissants la fillette
r entr e à domicile ; lor s du contr ôle 3 semaines
plus tard la blessure a guéri pratiquement
sans laisser de traces (fig. 9) .
Lors de chutes à califourchon (straddle injury)
l’enfant tombe en général sur une barre en
grimpant ou en faisant du vélo ou par glisse –
ment sur un bord tranchant (meuble, bord de
piscine, rampe, tour de grimpe). Cela cause
typiquement des contusions ou blessures des
organes génitaux externes (grandes et petites
lèvres) et du périnée. Les structures internes
comme le vestibule vaginal, l ’hy men et l ’ur ètr e
sont protégés par les grandes lèvres et plus
rarement touchés. Lors de lésions génitales qui saignent, la consultation médicale se fait
presque toujours immédiatement, l’anamnèse
est cohérente (l’enfant peut souvent rensei
–
gner elle-même) et l’accident a été observé,
ce qui n’est pas le cas lors d’un abus sexuel.
Saignements « vaginaux » et suspicion
d’atteinte à l’intégrité sexuelle
Une fillette de 7 ans nous est adressée avec
une hémorragie vaginale importante. Cette
fillette de couleur vit dans une institution. Le
responsable a remarqué les saignements
alors qu’elle rentrait de la place de jeu (elle
aur ait f ait long temps de la balançoir e et aus si
du tob og gan ) . Toute l ’é quip e est r emontée, on
soupçonne un abus sexuel.
La fillette ne se plaint pas de douleurs et est
en bon état général, les culottes sont ensan –
glantées. À l’inspection on constate une pro –
trusion circulaire hémorragique du méat
urétral. La traction permet de bien visualiser
l’introït vaginal, les contours de l’hymen sont
intacts, sans lésion aiguë. On pose le diagnos –
tic de prolapsus urétral.
Le prolapsus urétral apparaît typiquement
chez les filles de couleur. La fréquence est de
1:3000, le pic se situe entre 5 et 8 ans. Les
fillettes se présentent avec des culottes en –
sanglantées, généralement sans dysurie.
L’étiologie n’est pas claire ; on évoque une
mobilité urétrale accrue par une mauvaise
connexion entre les couches musculaires de
l ’ur ètr e et l ’aug ment ation de la pr es sion intr a –
abdominale.
Le traitement consiste en bains de siège as –
tringents ou éventuellement une crème à
base d’œstrogènes. La résection chirurgicale
n’est que rarement nécessaire.
D’autres étiologies possibles de saignements
sont des polypes ou kystes urétraux ou des
25 OrgarrneOrérrgitl
25 Orga5neé5nganitlefmn–é5s5qateutesvtncrngetgeutesvru5st.étng
29
DD des saignements génitaux pendant
la phase de latence
• l’origine du sang n’est pas vaginale
mais urétrale (p. ex. cystite hémorra –
gique) ou anale (p. ex. constipation
avec fissure anale, gastroentérite)
• blessure par écartement, chute à
califourchon
• corps étranger
• infections (p. ex. streptocoque A)
• lichen scléreux de la vulve
• prolapsus urétral
• polypes et kystes
• tumeurs (rare !)
• atteinte à l’intégrité sexuelle
• syndrome de Münchhausen par
procuration (rare !)
Tout saignement génital d’origine incon –
nue nécessite une consultation par un
médecin expérimenté en gynécologie
pédiatrique.
Abus sexuel
La prévalence de l’abus sexuel avec con
–
tact physique est de 20 % ! 4)
Dans plus de 90 -95% de contacts péniens
ou digit au x dans la région génit ale les con
–
statations cliniques sont sans particularité :
les blessures guérissent vite et les at
–
touchements ne laissent pas de traces vi –
sibles.
Pour des raisons médico-légales (préser
–
vation des preuves : sperme et ADN de
l’auteur) lors d’un événement récent la
consultation chez un médecin expérimenté
en médecine légale devrait avoir lieu le
plus rapidement possible (<72 h) . Ces
médecins collaborent avec des équipes de
protection de l’enfant pluridisciplinaires,
examinent et documentent au moyen d’un
colposcope selon les recommandations
internationales et se ser vent de la classifi
-
cation d’Adams 5) pour interpréter leurs
constatations.
Figure 11: Lichen scléreux. Source : Hürli -
mann R.
kystes para-urétraux. Ils sont néanmoins très
rares, ils n’ont pas l’aspect circulaire et œdé -
matié.
Sang dans les culottes
Une maman se présente avec sa fille de trois
ans, elle a découvert du sang dans sa culotte.
En l’examinant le pédiatre constate des suffu -
sions hémorragiques suspectes dans la région
anogénitale. Suspectant une situation d’abus
dans le cadre familial, il adresse la fillette à la
consultation gynécologique. La petite fille se
laisse examiner sans difficultés dans les bras
de sa maman. La traction et la séparation
mettent en évidence une dépigmentation en
forme de sablier de la vulve et périanale. La
peau a un aspect parcheminé, elle est mince
et f r agile, asp ect encor e mieu x v isible avec le
colposcope qu’à l’œil nu. Il y a de multiples
traces de grattage et des suffusions hémor -
ragiques. La gynécologue pédiatre pose le
diagnostic d’un coup d’œil : il s’agit du lichen
scléreux génital.
Le lichen scléreux est la cause la plus fré -
quente de saignements anogénitaux à l’âge
pédiatrique. Il s’agit d’une atrophie cutanée
auto-immune, avec suffusions hémorra -
giques, dépigmentation de la vulve et de la
peau périanale, occasionnant du prurit. Ces
manifestations sont accentuées par l’absence
d’œstrogènes pendant la phase de latence. De petits traumatismes (vélo, cheval) occa
-
sionnent des hémorragies et des fissures. Le
vestibule et l’hymen ne sont pas atteints !
Souvent est associé un lichen périanal avec
des fissures, défécation douloureuse et
constipation. Le traitement consiste en appli -
cation topique de stéroïdes et relipidation, en
cas de récidive ou chronicité aussi application
de tacrolimus.
Adolescence
Les questions concernant la puberté (normale
vs t ar di ve/pr é co ce ) , l ’hy p er plasie des p etites
lèvres, le muguet vaginal, le prurit lié à des
problèmes d’hygiène, les troubles menstruels
ou le souhait de contraception sont des rai -
sons fréquentes de consultation à cet âge.
Lors de la première consultation un examen
gynécologique n’est en général pas néces - saire, même s’il s’agit d’une première pres-
cription d’un anti-ovulatoire, à moins que
l’adolescente ne sache pas comment intro -
duire un tampon, ce qui requiert l’exclusion
d’un hymen criblé ou microperforé ( fig. 2). Le
temps prévu servira surtout à l’anamnèse et
aux conseils, notamment en l’encourageant à
utiliser le préservatif, à une information sur
les maladies sexuellement transmises et le
vaccin HPV.
Les petites lèvres grandissent sous l’influence
des œstrogènes. Suite à l’épilation des parties
intimes elles deviennent aussi mieux visibles.
D’après les idéaux de beauté actuels on sou -
haite des petites lèvres discrètes et les réduc -
tions chirurgicales augmentent chez nous
aussi. Ces interventions comportent pourtant
le risque de guérison imparfaite, avec forma -
tion de cicatr ices as so cié es à des tr oubles de
la sensibilité et des fonctions sexuelles. Par
un entretien empreint de confiance on aborde
la grande variabilité de l’aspect des petites
lèvres et l’acceptation du propre corps, et on
déconseille dans un premier temps l’interven -
tion chirurgicale.
Remarque: ne pas oublier les seins ! Les
adolescentes ont souvent des soucis et des
questionnements à propos de leurs seins, il
faut aborder ouvertement le sujet.
L’examen gynécologique et les problèmes
fréquents de l’adolescente ne sont pas la
priorité de cet article et sont bien décrits ail -
leurs
6), 7) .
Références
1) Emans SJ, Laufer MR. Pediatric and Adolescent
Gynecology. 6. Edition Philadelphia; Lippincott
Williams Kluwer 2012
2) Oppelt PG, Dörr H. Kinder- und Jugendgynäkologie.
1. Auflage, Georg Thieme Verlag Stuttgar t 2015
3) Costa M. Mythos Jungfräulichkeit. Pädiatrie 06/13
4) Optimusstudie: www.optimusstudy.org
5) Adams JA et al. Updated Guidelines for the Medical
Assessment and Care of Children Who May Have
Been Sexually Abused. J Pediatr Adolesc Gynecol
2016
6) Baltzer F. Praktische Adoleszentenmedizin. 1. Au -
flage, Verlag Hans Huber, Hogrefe AG Bern 2009
7) Hürlimann R. Adoleszentengynäkologie in
der Praxis. Praxis 2013; 102(18): 1123 -28
Correspondance
Dr. med. Sonja Fontana
Kinderspital Zürich
Steinwiesstrasse 75
8032 Zürich
sonja.fontana @ kispi.uzh.ch
Les auteurs certifient qu'aucun soutien financier ou
autre conflit d'intérêt n'est lié à cet ar ticle.
25 OrgarrneOrérrgitl
25 Orga5neé5nganitlefmn–é5s5qateutesvtncrngetgeutesvru5st.étng
Informations complémentaires
Correspondance:
Auteurs
S. Fontana R. Hürlimann