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Soins d’urgence en pédiatrie – nouveaux horizons

Répondre au nombre de patients continuellement grandissant d’un service d’urgences pour enfants et adolescents est devenu un défi de taille à tous les niveaux.

Introduction

Répondre au nombre de patients continuellement grandissant d’un service d’urgences pour enfants et adolescents est devenu un défi de taille à tous les niveaux. Pour pouvoir offrir, à l’avenir aussi, une prise en charge optimale et des traitements de haut niveau, on devra créer et imaginer de nouveaux rôles de soins innovants. Ils auront leur champ d’action à l’interface entre les domaines des soins et médical. Nous abordons dans cet article quelques aspects en relation avec de tels nouveaux modèles de prise en charge.

Prémisses

La santé publique se voit confrontée à des questions de financement, au manque de ressources humaines et à l’augmentation des coûts. Déjà en 2012 le rapport de la  Conférence suisse des directrices et directeurs de la santé (CDS) 1) formule les problèmes suivants:

  1. Vieillissement de la population
  2. Demande croissante de prestations médicales (médecine de famille) et de soins
  3. Attentes croissantes des patients
  4. Pénurie prévisible de médecins de premier recours et d’infirmiers/infirmières
  5. Inégalités géographiques de la répartition des prestataires de soins.

Ces interrogations se situent dans le contexte des exigences légales, qui demandent (Art. 32, LAMal) 2) que les prestations des établissements hospitaliers soient efficaces, appropriées et économiques. L’efficacité, l’adéquation et l’économicité des prestations sont contrôlées périodiquement.

Financement/indemnisation

Les nouveaux systèmes de financement, p.ex. DRG (diagnosis related groups) 3), engendrent un transfert partiel des prestations du milieu hospitalier vers l’ambulatoire. La révision partielle Tarmed de l’indemnisation des coûts ambulatoires en 2018 4), par laquelle les indemnisations de certaines prestations ont une fois de plus été revues à la baisse, crée des obstacles supplémentaires. Ces changements représentent un défi majeur pour toutes les personnes concernées par le processus de traitement et nécessitent, avec le nombre croissant de patients dans le secteur ambulatoire (p.ex. dans les services d’urgence pédiatriques, fig. 1), la création de nouveaux modèles de prise en charge.
Le système tarifaire Tarmed actuel n’est pas en accord avec une prise en charge médicale intégrée par les hôpitaux. Les prestations ambulatoires doivent toujours et encore être prescrites par un médecin pour être indemnisées par les assurances maladie.
La question du financement d’activités de soins indépendantes n’est donc toujours pas clarifiée en Suisse. Un regard au delà des frontières montre une tendance claire: en Suisse existe à ce propos un important besoin de rattrapage.

La PEMS réunit depuis décembre 2017 les pédiatres urgentistes et les infirmières et infirmiers urgentistes. La collaboration interprofessionnelle est un objectif primordial de la PEMS, afin de défendre les intérêts de la médecine d’urgence pédiatrique et maîtriser les obstacles futurs.

Fig. 1: Développement du nombre de patients au NZKJ 2013-2018

Pénurie de professionnels – nouvelles filières professionnelles

La pénurie de personnes qualifiées est évidente dans les deux professions, personnel soignant et médecins, et il faut envisager que la problématique s’accentuera encore à l’avenir. Les raisons principales pour la pénurie de médecins sont la limitation de la formation (numerus clausus) et la féminisation de la médecine avec un nombre croissant de femmes quittant la profession ou travaillant à temps partiel. Dans le domaine des soins nous formons également insuffisamment de personnes; la «durée de séjour» dans la profession a aussi diminué.
Toutes ces raisons exigent de nouveaux champs et rôles professionnels, notamment des advanced nurse practitioners (ANP), nurse practitioners (NP) et expert-e-s cliniques.  Un article à ce propos a été publié par Giger et De Geest en 2008 5) dans le Bulletin des Médecins Suisses. Apparaît la nécessité de nouveaux rôles dont l’activité se trouve à l’interface entre domaine médical et des soins. Des expériences notamment dans les pays anglo-saxons montrent que de telles offres innovantes sont attrayantes tant sur le plan économique que professionnel.
La situation s’est accentuée au courant des dernières années et les points 2-5 mentionnés plus haut sont nettement perceptibles, sept ans après leur publication1), aussi dans le Centre d’urgences pour enfants et adolescents de l’Hôpital de l’Île (NZKJ).

Projet pilote

Pour cette raison à l’Hôpital cantonal de Winterthour a été crée en 2016, dans le cadre d’un projet pilote, la nouvelle fonction d’«expert-e clinique en soins». Une infirmière expérimentée et formée spécifiquement collabore avec le médecin et est directement impliquée dans la prise en charge ambulatoire du patient.
La  formation spécifique permet à ces infirmières et infirmiers d’assumer de manière indépendante des tâches médicalement clairement définies, délimitées et standardisées (p.ex. soins de plaies, pose de plâtres, gestion de la douleur, etc.), dans le cadre d’une prise en charge globale du patient. Les infirmiers/infirmières disposent en plus de connaissances étendues dans les domaines de la prévention et du conseil, complétant ainsi une prise en charge globale.
Le projet pilote à l’Hôpital cantonal de Winterthour a entièrement satisfait les attentes et a été intégré, voire élargi, dans la pratique quotidienne.

Entre temps la Haute école en sciences appliquées de Zurich (ZHAW) a conçu une formation postgraduée, le CAS «expert-e clinique».

Centre d’urgences pour enfants et adolescents de l’Hôpital de l’Île (NZKJ)

L’avantage de cette nouvelle fonction au Centre des urgences pédiatriques se situe à plusieurs niveaux. D’une part il s’agit de soulager l’équipe de soins et médicale, d’autre part pour les infirmières/infirmiers s’ouvrent, après cette formation postgraduée, de nouvelles perspectives professionnelles. En même temps est développée une offre novatrice pour les patients, qui s’oriente à leurs besoins et influence positivement leur vécu hospitalier. Les aspects économiques ne représentent pas la motivation principale, néanmoins les prestations des expert-e-s cliniques seront plus économiques que les prestations médicales. Pour ces raisons, les directions médicale et des soins du NZKJ ont décidé l’année passée d’élaborer les bases pour l’implémentation de la nouvelle fonction «expert-e clinique» et d’adapter cette fonction aux besoins du service d’urgences pédiatriques.

Au NZKJ est prévu le profil des exigences suivant pour l’expert-e clinique (EC):

  • l’EC dispose d’au moins 5 ans d’expérience en soins pédiatriques d’urgence dans une clinique universitaire
  • l’EC a réussi la formation post-diplôme de 2 ans en soins d’urgence
  • l’EC a réussi le CAS expert-e clinique à la ZHAW
  • l’EC a d’excellentes compétences communicatives et professionnelles
  • l’EC a suivi l’atelier interne en communication du NZKJ

Avec ce profil on s’assure que les futurs EC disposent des compétences requises. L’étroite collaboration avec l’équipe médicale garantit des interventions basées sur l’évidence et tient donc compte des exigences légales.

État actuel

En février 2019 le premier candidat a débuté la formation postgraduée à la ZHAW. Les points forts en 2020 seront l’implémentation de la nouvelle fonction dans le quotidien clinique et l’évaluation du projet.

Perspectives

Une coopération entre le ZHAW et le NZKJ est prévue, avec le but d’intégrer les principaux thèmes pédiatriques dans les CAS. 

Références

  1. Schweizerische Konferenz der kantonalen Gesundheitsdirektorinnen und -direktoren (2012). Neue Versorgungsmodelle für die medizinische Grundversorgung. https://www.gdk-cds.ch/fileadmin/docs/public/gdk/aktuelles/mmtlg/bt_versmod_pub_20120402_d.pdf (Stand 10.2.2019)
  2. Schweizerische Eidgenossenschaft, Bundesamt für Gesundheit (2018). Bundesgesetz über die Krankenversicherung. https://www.admin.ch/opc/de/classified-compilation/19940073/index.html
  3. Swiss DRG.https://www.swissdrg.org/de/ueber-uns/organisation/entwicklungsprozess (Stand 7.3.2019)
  4. Schweizerische Eidgenossenschaft, Bundesamt für Gesundheit (2018). Tarifsystem Tarmed. https://www.bag.admin.ch/bag/de/home/versicherungen/krankenversicherung/krankenversicherung-leistungen-tarife/Aerztliche-Leistungen-in-der-Krankenversicherung/Tarifsystem-Tarmed.html (Stand 15.7.2018)
  5. Giger M., De Geest S. Neue Versorgungsmodelle und Kompetenzen sind gefragt. Schweizerische Ärztezeitung. 2008;89:1839-43

Informations complémentaires

Traducteur:
Rudolf Schlaepfer
Correspondance:
Conflit d'intérêts:
L’auteur n’a déclaré aucun lien financier ou personnel en rapport avec cet article.
Auteurs
Leitung Pflegedienst  Franziska Hermann Marina Notfallzentrum für Kinder und Jugendliche, Inselspital Bern