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L’iode chez le nourrisson et l’enfant en Suisse

Alimentation

L’iode est un élément important de notre alimentation, nécessaire à la synthèse des hormones thyroïdiennes thyroxine (T4) et triiodothyronine (T3).

Introduction

L’iode est un élément important de notre alimentation, nécessaire à la synthèse des hormones thyroïdiennes thyroxine (T4) et triiodothyronine (T3). La teneur en iode de la nourriture dépend fortement de la concentration d’iode dans le sol. Les sols suisses étant pauvres en iode, presque tous les aliments ne contiennent que très peu d’iode. Dans le passé des carences modérées à sévères en iode étaient donc courantes en Suisse.

La supplémentation du sel alimentaire avec de l’iode est, du point de vue santé publique, la stratégie la plus efficace pour prévenir la carence iodique et garantir une alimentation en iode adéquate de la population1). Le sel alimentaire iodé à titre préventif a été introduit en Suisse déjà en 1922. Depuis 1952 il est disponible dans tout le pays2). Cette stratégie presque centenaire visant la prévention de la carence en iode se voit actuellement confrontée à de nouveaux défis, les habitudes alimentaires ayant changé. Dans cet article sont résumés les progrès concernant l’alimentation en iode des nourrissons et enfants ainsi que la situation actuelle concernant l’alimentation en iode de la population suisse.

Conséquences de la carence en iode

Une thyroïde agrandie (goitre) est le symptôme classique de la carence en iode; il s’agit de l’adaptation physiologique à un déficit chronique. Un déficit sévère peut compromettre la production de T4 et T3 et occasionner des pathologies thyroïdiennes ainsi que d’autres problèmes de santé3). Un apport adéquat en iode est particulièrement important pendant la grossesse, la période d’allaitement et la petite enfance, le déficit en iode pouvant perturber le développement3,4).

La corrélation entre absorption d’iode et fonction thyroïdienne prend la forme d’un U: des troubles sont observés tant suite à un apport insuffisant qu’excessif d’iode. La synthèse des hormones thyroïdiennes est régulée de sorte à garantir des concentrations suffisantes malgré le fait que l’absorption d’iode change d’un jour à l’autre. Enfants et adultes stockent l’iode dans la thyroïde et cette réserve est utilisée lors de périodes avec une absorption moindre. Les nourrissons ont – comparé aux enfants plus âgés et aux adultes – une production d’hormones thyroïdiennes plus élevée par kg de poids corporel, et donc aussi des besoins en iode plus importants. La réserve en iode du nouveau-né ne suffit que quelques jours, un apport constant en iode par le lait maternel (ou l’alimentation de complément) est donc indispensable.

Le risque de troubles de la fonction thyroïdienne et de ses conséquences dépend du degré et de la durée de la carence en iode. Lorsque l’apport en iode est très bas pendant une longue période, l’absorption dans la thyroïde ainsi que le rapport T3/T4 et la transformation de T4 en T3 au niveau cellulaire s’intensifient. Le déficit sévère en iode s’accompagne d’une concentration élevée de thyroglobuline (Tg) et de thyréostimuline (TSH) ainsi que d’un T4 bas, alors que la T3 reste souvent normale. Dans les populations touchées par une carence importante en iode on constate une prévalence élevée de goitre et d’hypothyroïdie clinique. En présence d’une carence en iode modérée, la TSH peut être légèrement élevée et maintenir, en tant que mécanisme d’adaptation, un taux sérique de T4 normal ou peu abaissé.

En présence d’une carence légère en iode le taux de Tg augmente, alors que la TSH et le T4 restent dans les limites de la norme. Un déficit léger en iode est néanmoins reconnu comme étant un facteur de risque pour des maladies de la thyroïde à l’âge adulte. Il n’existe par contre que peu d’études examinant le lien entre une carence légère en iode et des pathologies thyroïdiennes dans des populations pédiatriques.

Une carence en iode peut se manifester chez le fœtus déjà pendant la grossesse ou chez le nourrisson après la naissance3,4). Les conséquences sur le développement cérébral peuvent donc être combinées, pré- et postnatales. Une carence sévère en iode pendant la grossesse, induisant une hypothyroïdie fœtale, peut occasionner des troubles neurologiques et cognitifs avec un QI massivement abaissé dans le sens d’un crétinisme4), autrefois endémique en Suisse2).

Les conséquences d’une carence légère en iode sur le cerveau et le développement de l’enfant ne sont pas claires4). Une étude randomisée et contrôlée récente, analysant les effets de la substitution d’un déficit en iode modéré pendant la grossesse, n’a pas révélé d’avantages à long terme sur le développement cognitif de nourrissons et enfants, mesuré avec des tests de développement standard à l’âge de 1,2 et 5-6 ans5). Une hypothyroïdie peut altérer le développement du cervelet, du langage et des capacités langagières aussi après la naissance, les données disponibles sont néanmoins rares. Des études interventionnelles mentionnent une relation entre carence en iode et les fonctions cognitives à l’âge pré- et scolaire, mais là aussi les données sont maigres3).

Recommandations pour l’apport quotidien en iode

L’apport quotidien en iode recommandé par l’OMS est présenté dans le tableau 11). La quantité en iode actuellement recommandée pour les nourrissons pendant les premiers 6 mois de vie n’est pas bien documentée. Pour cette raison nous avons effectué récemment une étude dose-effet, randomisée en double-aveugle, avec des nourrissons de 2-5 mois en Suisse, avec le but de définir l’absorption, la rétention et l’élimination d’iode en fonction de différents dosages6). Notre étude montre que les nourrissons nécessitent une quantité moyenne d’iode de 72 µg/jour (10.6 µg/kg/jour) pour atteindre un statut en iode adéquat. Nous proposons donc pour les nourrissons de 0 à 6 mois une valeur de référence de 72 µg/jour (EAR, estimated average requirement). Cette quantité est inférieure aux recommandations actuelles de l’OMS.

Tableau 1: Recommandations de l’OMS concernant l’apport quotidien en iode1)

Les recommandations concernant le choix des aliments pour garantir un apport suffisant en iode sont listés dans le Box 17) ci-dessous.

Adultes et enfants

Pour garantir un apport suffisant en iode, il faut des produits fabriqués avec du sel iodé. Les astuces suivantes peuvent contribuer à améliorer l’apport en iode:

  • Consommer quotidiennement 3 portions de lait ou de produits laitiers (1 portion correspond pour l’adulte à 2 dl de lait, 150-200 g de yoghourt, fromage blanc ou cottage, 30 g de fromage à pâte dure ou 60 g à pâte molle).
  • Utiliser du sel de cuisine ou de table iodés.
  • Acheter des aliments transformés, bouillons, produits de boulangerie ou pâtisserie ainsi que carnés préparés avec du sel iodé. Les aliments contenant du sel iodé portent la mention «sel de table/sel de cuisine/sel iodé. Au restaurant, dans les cantines ou chez le boulanger ou le boucher, on peut se renseigner.
  • Consommation régulière de poissons de mer.

Recommandations pour nourrissons et enfants en bas âge

  • Pour les enfants allaités la condition essentielle est une alimentation en iode suffisante de la mère. Le nourrisson entièrement allaité ne peut se procurer l’iode nécessaire à sa propre synthèse hormonale que par le lait maternel.
  • Pour les nourrissons non allaités l’alimentation en iode se fait par les préparations pour nourrissons. En Suisse ces produits sont enrichis en iode selon l’Ordonnance du DFI sur les denrées alimentaires destinées aux personnes ayant des besoins nutritionnels particuliers.
  • Après l’introduction des compléments alimentaires, le nourrisson reçoit toujours du lait maternel et/ou des préparations pour nourrisson. Il est recommandé d’avoir recours à des compléments alimentaires riches en iode (p.ex. poissons ou œufs).
  • Après le 1er anniversaire préparer les repas avec du sel iodé.

Box 1: Recommandations de l’OSAV concernant l’apport en iode7)

Biomarqueurs du statut en iode

Taux d’iode dans l’urine et dans le lait maternel

Le statut iodique de la population est déterminé en première ligne par des études épidémiologiques, par le dosage du taux d’iode dans l’urine1). Environ 90% du iode absorbé avec la nourriture est éliminé dans les 24 heures dans l’urine; le taux urinaire reflète donc l’absorption actuelle. Une carence en iode chez des enfants de 6-12 ans ou des adultes est définie par un taux urinaire médian de <100 µg/l (pour les femmes enceintes <150 µg/l)1). Les mêmes valeurs limite sont utilisées pour les nourrissons1) mais les nourrissons ont un volume urinaire moindre et cette valeur OMS est probablement trop basse et sous-estime donc la carence en iode à cet âge.

Le taux urinaire d’iode est soumis à une importante variabilité intra- et interindividuelle, notamment en raison des grandes fluctuations de l’apport iodique nutritionnel et de la consommation de liquides8). Le taux d’iode mesuré dans l’urine ne devrait donc pas être utilisé pour apprécier le statut en iode individuel, à moins de pouvoir récolter régulièrement des échantillons pendant au moins 10 jours.

Le taux d’iode dans le lait maternel est un indicateur fiable du statut iodique des femmes qui allaitent, bien que ce marqueur soit lui-aussi fortement dépendant de l’apport en iode9). Comme pour l’urine, le taux d’iode dans le lait maternel est approprié pour des études épidémiologiques mais pas pour connaître le statut en iode individuel.

Taux de thyréoglobuline (Tg)

La Tg est une protéine synthétisée par les cellules folliculaires de la thyroïde et où a lieu la synthèse de T4 et de T3. En présence d’une absorption d’iode suffisante, le taux sanguin de Tg est bas, pour augmenter si l’activité de la thyroïde s’intensifie suite à une carence ou un apport excessif d’iode10). La Tg réagit rapidement à un déficit en iode et est donc un biomarqueur fiable du statut en iode d’une population. Il peut être utilisé en complément du taux urinaire1). On peut doser la Tg dans le plasma ou dans du sang entier séché sur papier filtre (dried blood spot, DBS). En raison de la quantité minimale de sang nécessaire et de sa simplicité, la technique par papier filtre est idéale pour le prélèvement chez le nourrisson.

Statut en iode actuel de la population en Suisse

Dans le passé la Suisse était touchée par des déficits en iode modérés à sévères; dans certaines régions presque tous les enfants avaient un goitre2). Le sel iodé a été introduit pour la première fois en 1922 pour éviter une carence2). La quantité de iode ajoutée au sel a été par la suite progressivement augmentée, de 3.75 à 7.5 mg/kg en 1962, à 15 mg/kg en 1980 et à 20 mg/kg en 1998. La supplémentation en iode du sel a été réalisée par les Salines Suisses, le seul producteur de sel en Suisse. Le goitre dû à la carence en iode a ainsi été éliminé dans notre pays.

Pendant la dernière décennie on a observé néanmoins une diminution de l’apport en iode chez l’adulte, notamment chez les femmes enceintes et allaitantes, ainsi que chez les nourrissons11). En janvier 2014 la quantité d’iode dans le sel a donc été augmentée encore une fois, de 20 à 25 mg/kg. En Suisse la supplémentation en iode est volontaire, c’est à dire qu’on obtient du sel de cuisine iodé ou non iodé. La législation autorise une supplémentation de 20 à 40 mg/kg).

En Suisse le statut en iode et les effets du sel iodé sont contrôlés tous les 5 ans par des études nationales transversales représentatives. Le statut en iode des enfants de 6-12 ans a été évalué en 1999, 2004, 2009, 2015 par le dosage du taux urinaire12). Les 4 études ont révélé un apport en iode suffisant chez les enfants en âge scolaire (Figure 1)1). Le statut en iode ne dépend pas de l’âge, par contre celui des garçons tend à être meilleur que celui des filles20). L’étude estime que malgré un apport en iode globalement suffisant, 10% des enfants ont un apport insuffisant (en dessous de l’EAR). Un apport trop élevé, dépassant la limite tolérable supérieure, n’a pas été observé.

Les résultats de l’étude la plus récente indiquent une légère amélioration de l’apport en iode des enfants en âge scolaire comparé aux trois études nationales précédentes (Figure 1)12). La concentration médiane dans l’urine a augmenté de 120 µg/l (95% Cl: 116, 124 µg/l, n=916) en 2009 à 137 µg/l (95% Cl: 131, 143 µg/l, n=729) en 2015. Cette augmentation peut être attribuée en partie à la teneur plus élevée du sel de cuisine en iode, passée de 20 mg/kg à 25 mg/kg.

Figure 1. Concentration urinaire d’iode des enfants en âge scolaire (6-12 ans) en Suisse de 1999 à 201512). La zone grisée représente l’apport optimal en iode selon les valeurs limite de l’OMS pour la concentration d’iode dans l’urine1). Les valeurs marquées par une lettre en exposant montrent des différences statistiquement significatives (p<0.001).

Pendant la même période aucun changement n’a été observé chez les adultes ou les femmes enceintes12). La concentration médiane de l’iode dans l’urine dans ces populations restait basse, se situant autour des valeurs limite de l’OMS, ce qui évoque une alimentation en iode limite voire insuffisante (Figure 2). La situation est comparable à la plupart des pays européens (www.ign.org). Une nouvelle étude nationale auprès d’enfants en âge scolaire aurait dû débuter en avril 2020, mais a été reportée en raison de la pandémie SARS-Cov-2.

Figure 2. Concentration urinaire d’iode de femmes en âge de procréer et enceintes en 201512). La zone grisée représente l’apport optimal en iode selon les valeurs limite de l’OMS pour la concentration d’iode dans l’urine1)

Utilisation de sel de cuisine iodé

Le sel de cuisine iodé est la source principale d’iode en Suisse12). L’apport en iode et en sodium montre une corrélation positive. La quantité d’iode ajoutée au sel de cuisine (25 mg/kg) se situe dans la fourchette de 20-40 mg/kg recommandée par l’OMS. Les données d’autres pays montrent que 25 mg d’iode par kg de sel de cuisine suffisent pour couvrir les besoins en iode alimentaire, à condition d’utiliser 90% de sel de cuisine iodé13). En Suisse la concentration moyenne d’iode dans l’urine d’enfants et de femmes n’atteint pourtant que la moitié de celle dans les pays avec iodation obligatoire du sel de cuisine. Cela suggère une utilisation incomplète de sel de cuisine iodé en Suisse.

La plupart des ménages suisses (>80%) utilise du sel iodé, l’industrie alimentaire par contre prépare de nombreux produits aussi avec du sel non iodé. Une grande partie de l’apport quotidien en sel étant issu de produits alimentaires transformés (70-80%), on peut craindre que la population suisse soit à nouveau touchée par une carence en iode. On ne dispose pas de données concernant l’utilisation de sel de cuisine iodé par l’industrie alimentaire en Suisse. Les chiffres de vente montrent néanmoins qu’en 2018 a été vendu seulement 60% du sel de cuisine iodé (communication personnelle de Salines Suisses SA, 2019).

L’iodation universelle obligatoire est l’objectif souhaité1), la mise en œuvre représente pourtant un défi. Les législations et réglementations nationales concernant la iodation du sel de cuisine varient énormément, il n’existe pas non plus de directives communes pour l’UE. De nombreux producteurs d’aliments transformés préfèrent utiliser du sel non iodé pour faciliter p.ex. l’importation et l’exportation de leurs produits.

La consommation quotidienne de sel d’un adulte en Suisse est d’environ 9 g et se situe donc nettement en-dessus des recommandations nationales (3.75 g/j) et internationales (5g/j). L’apport quotidien estimé en sodium des enfants de 6-12 ans est de 2.4 g/j, ce qui correspond à une consommation de 6.1 g/jour de sel12). Cette valeur aussi dépasse nettement la quantité de sel recommandée (1.9-2.75 g/j) (http://www.sge-ssn.ch/fr/). La stratégie alimentaire suisse 2017-2024 recommande une réduction globale de la consommation de sel. En utilisant exclusivement du sel iodé, l’alimentation en iode ne serait pas compromise en Suisse par cette réduction. Il est donc important d’augmenter l’utilisation de sel iodé pour la fabrication de produits alimentaires et d’adapter éventuellement la teneur en iode du sel de cuisine.

Lait et produits laitiers – source importante d’iode pour les enfants

Le lait de vache et les produits laitiers contiennent du iode en fonction de la nourriture du bétail et de la transformation du lait. Ils représentent une source importante d’iode en Suisse notamment pour les enfants14). La consommation quotidienne d’un verre de lait (0.3 l, avec un taux moyen d’iode de 87 µg/l) apporterait 25 µg d’iode, c’est à dire un quart de l’apport quotidien recommandé pour les enfants1). Le lait de vache et les produits laitiers peuvent donc compenser partiellement la couverture insuffisante par le sel iodé. Il est important de mentionner que le lait produit biologiquement contient moins d’iode que le lait conventionnel. Les produits de remplacement du lait comme les boissons à base d’avoine, riz ou amandes ne contiennent pas d’iode. Les groupes de population ne consommant pas de lait ni aucun produit laitier, p.ex. dans le cadre d’une alimentation végétalienne, ont souvent un apport faible en iode et donc un risque accru d’une carence en iode. Une autre source d’iode sont les œufs. Les poissons et fruits de mer contiennent également des quantités relativement importantes d’iode, mais contribuent en général peu à l’apport global d’iode en Suisse, leur consommation étant limitée.

Statut en iode des nourrissons

Le statut en iode des nourrissons exclusivement allaités dépend de la concentration d’iode dans le lait maternel. La glande mammaire accumule et sécrète l’iode ingéré très rapidement dans le lait par le transporteur spécifique de l’iode (Na+/I-Symporter, NIS). La concentration d’iode dans le lait maternel dépend essentiellement de l’alimentation en iode de la mère.

Lorsque l’apport en sel iodé et donc en iode est adéquat, la concentration moyenne dans le lait maternel se situe entre 120 et 180 µg/l, ce qui correspond à un apport moyen pour le nourrisson de 95-140 µg/j et à une concentration urinaire d’iode de 200-400 µg/l13). En Suisse les études nationales ont constaté une concentration médiane d’iode dans le lait maternel (50 µg/l) et dans l’urine des nourrissons (70-100 µg/l) basses, ce qui suggère un apport insuffisant de 40-50 µg/j11). Des valeurs comparables basses sont rapportées par d’autres pays européens. Les préparations pour nourrissons initiales et de suite, utilisées en remplacement du lait maternel, doivent contenir une supplémentation en iode de 15-29 µg/100 kcal. Pour un nourrisson non allaité de 2 mois cela correspond à un apport quotidien de 85-165 µg/j.

À l’âge de 4-6 mois on introduit des aliments complémentaires15). Les compléments faits maison, p.ex. purées de céréales, de fruits ou de légumes, ne contiennent en général que peu d’iode. Les recommandations pédiatriques incitent à ne pas saler les compléments alimentaires pendant la première année de vie et de n’introduire le lait de vache non dilué qu’après l’âge de 12 mois15). L’apport en iode peut donc être insuffisant à cet âge, notamment si la quantité de lait maternel est limitée ou si la concentration d’iode dans le lait maternel est basse. Une étude nationale mentionne un apport en iode bas chez les nourrissons de 6-12 mois en Suisse11). Seulement 57% des nourrissons étaient allaités au delà de l’âge de 6 mois, à 12 mois ils n’étaient que 18%. Les recommandations pédiatriques de limiter l’apport en sel pendant la première année de vie sont bien suivies. Les aliments enrichis en iode peuvent jouer un rôle central dans l’alimentation en iode des nourrissons. Les fabricants sont libres d’ajouter de l’iode aux compléments alimentaires. La teneur en iode des laits de suite pour nourrissons de 6-12 mois est par contre régie par la loi. La concentration mesurée ne correspond pourtant pas toujours à la composition déclarée11). On peut encourager la consommation de lait et de produits laitiers en tant que bonne source d’iode après l’âge de 12 mois.

Résumé

La stratégie consistant à ioder le sel de cuisine, efficace et pratiquée depuis des années, est encore et toujours essentielle pour garantir un apport suffisant d’iode en Suisse. Néanmoins l’utilisation de sel iodé pour la fabrication de produits alimentaires est insuffisante et doit être améliorée. Le lait et les produits laitiers sont une source importante d’iode. En Suisse les enfants en âge scolaire bénéficient d’un apport en iode suffisant, alors qu’il n’est qu’à la limite pour les femmes en âge de procréer, enceintes ou qui allaitent. La concentration en iode du lait maternel est basse, les nourrissons allaités encourent donc un risque élevé de carence en iode.

Références

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En raison de la limitation du nombre de références, toutes les déclarations ne sont pas référencées. Une liste détaillée de références est disponible auprès de l’auteure.

Informations complémentaires

Traducteur:
Rudolf Schlaepfer
Correspondance:
Conflit d'intérêts:
Les auteurs n'ont déclaré aucun lien financier ou personnel en rapport avec cet article.
Auteurs
Dr.  Maria Andersson Abteilung Gastroenterologie und Ernährung, Universitätskinderspital Zürich - Eleonorenstiftung

Prof. Dr. med.  Christian P. Braegger Abteilung Gastroenterologie und Ernährung, Universitäts-Kinderspital Zürich - Eleonorenstiftung