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Infections cutanées bactériennes et virales chez l’enfant

Les maladies infectieuses de la peau sont nombreuses...

Introduction

Les maladies infectieuses de la peau sont nombreuses. Dans cet article, nous aborderons les infections bactériennes et virales qui sont couramment rencontrées chez l’enfant (à l’exception des verrues et des molluscum contagiosum), les infections rares mais sévères ainsi que celles constatées au retour de voyage ou en lien avec la migration. Seules les infections avec une atteinte cutanée dont l’agent causal peut être isolé au niveau de la lésion sont décrites, ce qui exclut les exanthèmes para-infectieux.

Infections cutanées bactériennes généralement localisées

Les infections cutanées bactériennes1)2) correspondent souvent à des atteintes localisées. Dans certaines circonstances, l’évolution peut cependant être grave. Cela dépend de la virulence de la bactérie (ex : Staphylococcus aureus (SA) producteur de toxine comme la leucocidine de Panton et Valentine), de l’état immunitaire du patient et de la prise concomitante de médicaments comme les anti-inflammatoires ou les immunosuppresseurs. L’infection peut également avoir une évolution plus sévère si elle est une complication d’une pathologie sous-jacente comme la varicelle par exemple. Un frottis avec culture des lésions cutanées peut confirmer le diagnostic. L’antibiogramme est précieux pour orienter le traitement.

L’impétigo est une infection à SA, rarement à Streptocoques ß-hémolytiques du groupe A (SGA). Il se présente initialement sous forme de vésicules, de pustules ou parfois de bulles (impétigo bulleux), puis apparaissent des croûtes ayant un aspect «mélicérique» (fig. 1) ou des érosions. Les lésions peuvent confluer et prendre un aspect circiné. Les sites les plus fréquemment atteints sont: le visage (principalement en péribuccal, péri-nasal, le menton, la zone rétro-auriculaire) ainsi que la zone des langes.

L’ecthyma est un impétigo creusant, habituellement localisé aux membres inférieurs. Sa guérison laisse des cicatrices. Les SGA sont les germes les plus fréquemment impliqués puis les SA.

L’ecthyma gangréneux3) est plus rare. Il provoque des ulcérations nécrotiques. Il est surtout associé à un contexte de septicémie à Pseudomonas aeruginosa (PA) chez des patients immunodéprimés avec neutropénie. Le pronostic est réservé. L’ecthyma gangréneux peut également toucher la zone des langes chez les enfants en bonne santé habituelle, après une antibiothérapie ou une neutropénie passagère secondaire à une infection sous-jacente (fig. 2). Dans ces cas, il n’y a pas de septicémie et le pronostic est bon.

Le périonyxis et la paronychie aiguë touchent les parties molles autour de l’ongle et débutent souvent à la matrice de l’ongle. Ils se présentent avec une rougeur et un œdème suivi d’une collection de pus. Cette lésion est douloureuse. Une lymphangite, des adénopathies et de la fièvre peuvent être présents. Les germes les plus fréquents sont SA, parfois SGA, plus rarement herpès simplex virus (HSV) ou encore dans les formes chroniques: candida.

La dactylite bulleuse4) touche la pulpe de la phalange distale d’un ou plusieurs doigts. Une bulle ou pustule se forment sur une base érythémateuse. Une infection ORL est associée dans la moitié des cas. La cause la plus fréquente est une infection à SGA, ou moins souvent à SGB ou à SA

La folliculite se traduit par de petites papulo-pustules centrées par un poil. C’est une infection superficielle. Si celle-ci pénètre plus profondément on parle d’un furoncle, si plusieurs furoncles confluent d’un carboncle et en cas de lésions multiples et/ou récidivantes d’une furonculose. Le SA est l’agent causal, parfois des souches de SA sont résistantes à la méticilline (MRSA), il sagit le plus souvent de souches communautaires plus rarement en Suisse de MRSA hospitaliers. Le PA est une cause rare, survenant surtout après un bain en jacuzzi. Dans ce cas, la folliculite se manifeste par des lésions multiples souvent chez plusieurs personnes en même temps. Dans le diagnostic différentiel, le Malassezia furfur peut également provoquer une inflammation des follicules de la partie proximale du corps qui sont souvent prurigineuses. Cette éruption peut être confondue avec une acné.

L’abcès cutané est assez similaire. Il se présente sous forme d’un nodule ou masse érythémateuse, chaude, suivi d’une suppuration centrale. Il est généralement douloureux à la palpation. Le drainage du pus peut survenir spontanément ou après une incision.

Le «pseudomonas hot foot syndrome» est une autre éruption rencontrée après une visite d’attractions aquatiques contaminées par du PA. Dans les deux jours suivant l’exposition, il y a une apparition de douleurs intenses au niveau des plantes suivies d’un œdème, d’un érythème diffus et de nodules rouge-violacés.  Les zones de pression des pieds, plus rarement aux mains sont extrêmement sensibles au moindre contact et très algiques. Un état fébrile et une détérioration de l’état général peuvent parfois être observés. L’histologie montre un infiltrat neutrophilique dermique péri-vasculaire et péri-annexiel s’étendant dans l’hypoderme, parfois centré autour des glandes eccrines.

L’érysipèle et la cellulite sont des dermohypodermites bacteriennes respectivement superficielle et profonde. Elles se manifestent par un érythème de la peau, généralement douloureux, le plus souvent localisé aux membres ou au visage. Un œdème y est fréquemment associé. La fièvre peut être présente ou non.

L’anite streptococcique5), à ne pas confondre avec une dermite irritative des couches, est une forme particulière de cellulite périanale de l’enfant. Un érythème avec délimitation nette est typique et parfois associé à des fissures et hémorragies. La vulve ou le pénis peuvent être atteints également. Elle est causée par les SGA, mais les SA peuvent cependant produire des lésions semblables.

Dans la fasciite nécrosante (FN), l’infection débute en profondeur ce qui provoque une douleur intense, dans un premier temps avec des signes cutanés minimes, suivi d’un érythème cutané rapidement progressif. Des bulles hémorragiques apparaissent et progressent vite vers la nécrose. Un crépitement peut être palpé. Une fièvre élevée et des signes de septicémie sont habituellement présents mais peuvent manquer. Des lactates et une créatinine-kinase élevés ainsi qu’une thrombocytopénie et une protéine C réactive supérieure à 7 fois la normale sont des éléments en faveur d’une FN plutôt qu’une cellulite6). Rare chez l’enfant, il s’agit presque toujours d’une complication de la varicelle. Les germes impliqués sont le SGA, mais également d’autres bactéries telles que Clostridium perfringens ou plus rarement Vibrio vulnificus (exposition aquatique), ou Bacteroides fragilis. Il s’agit d’une urgence qui va nécessiter une prise en charge pluridisciplinaire avec pédiatres et chirurgiens. Le débridement des lésions est prioritaire. Une CT (ou IRM) en urgence peut aider dans le diagnostic, mais ne peut retarder la prise en charge chirurgicale de cette pathologie potentiellement létale (tableau 1).  

Des Staphylocoques ou Streptocoques sécréteurs de toxines peuvent provoquer des complications touchant la peau. Le Staphylococcal Scalded Skin Syndrome est dû à des SA porteurs de toxines exfoliatives provoquant un décollement de la couche cornée de la peau, notamment chez le nouveau-né avec une infection apparaissant autour du cordon. Des exotoxines des Streptocoques peuvent être responsable de la scarlatine. Celles des Streptocoques ou Staphylocoques entraînent un syndrome de choc toxique. N’oublions pas que certains SGA peuvent sécréter une protéine M hautement néphrogène1).  Il est donc conseillé de rechercher une proteinurie 10 jours après l’infection.

Le traitement des infections bactériennes peut être topique pour les infections limitées, mais nécessite une antibiothérapie par voie orale ou voie veineuse dans les infections sévères ou si les toxines jouent un rôle pathogène (tableau 1) 1)2). Il est important de tenir compte des résistances aux antibiotiques utilisés couramment, l’antibiogramme est donc crucial. Une incision avec drainage est également conseillée pour les panaris, furoncles et abcès, ainsi qu’un débridement qui reste la prise en charge prioritaire des fasciites nécrosantes.

Figure 1
Impétigo contagieux à S aureus dans la phase croûteuse
Figure 2
Ecthyma gangraeneux dû au P aeruginosa après une infection respiratoire traitée par antibiotiques

Tableau 1: Traitement d’infections cutanées bactériennes selon SwissPedDose et 1)2)7)8)9)10)

Infections cutanées bactériennes avec atteinte systémique

La borréliose de Lyme est une infection à spirochète du type borrelia burgdorferi 7). La transmission aux humains se fait par piqûre de tiques. Un contact de 16h est habituellement nécessaire pour que la bactérie soit transmise. La proportion de tiques infectées est très variable selon les régions. La maladie se déroule en trois phases7). La phase primaire correspond à une infection initiale, localisée autour du point de piqûre, apparaissant dans les 3 à 30 jours. Elle se caractérise par l’érythème migrant. Chez les petits enfants, il siège souvent à la tête et au cou, chez les plus grands aux membres inférieurs ou à la partie inférieure du tronc. Il s’agit d’un érythème avec une bordure active qui s’étend de façon centrifuge et qui peut atteindre plus de 20 cm de diamètre, tandis que souvent le centre s’éclaircit avec une petite tache rouge centrale. Le diagnostic est clinique car les immunoglobulines M (IgM) apparaissent au plutôt après 2 à 3 semaines. La phase secondaire se manifeste quelques semaines à mois après l’inoculation. A ce stade, une dissémination hématogène suivie d’une fixation bactérienne dans certains tissus se produit. Dans la peau, cela se manifeste par le lymphocytome borrélien, observé dans 15% des maladies de Lyme non traitées en Europe. Il se présente comme un nodule ou une plaque rouge, brunâtre à violacé, arrondi et ferme souvent localisé aux lobes de l’oreille ou aux mamelons (fig. 3). L’histologie montre un infiltrat de lymphocytes B et plasmocytes polyclonales formant des centres germinatifs, dans le derme superficiel et profond. Les spirochètes peuvent être détectés dans les biopsies si nécessaire. La sérologie (anticorps borréliens) peut confirmer le diagnostic bien que la sensibilité ne soit que d’environ 80 %. De multiples lésions d’érythème migrant, des troubles neurologiques, des arthrites ou une endocardite se voient aussi dans cette phase. La phase tertiaire se manifeste 6 mois à deux ans après l’infection. La manifestation dermatologique acrodermatite chronique atrophiante est exceptionnelle chez l’enfant. Dans cette phase, les symptômes neurologiques et/ou articulaires sont souvent présents. Le traitement recommandé dans les différentes phases est donné dans le tableau 1.

La syphilis, une infection à spirochète du type treponema pallidum, est rare chez l’enfant. C’est surtout la forme congénitale par transmission transplacentaire qu’il ne faut pas omettre8). Les signes muco-cutanés typiques se présentent dans les 2 premières années de vie. Il s’agit de macules rosées sur les paumes et les plantes, qui peuvent devenir bulleuses puis desquamer. Les plaques érythémateuses des lèvres, gencives et du palais qui cicatrisent sont moins fréquentes. On observe également des condyloma lata, des plaques péri-orales ou péri-annales verruqueuses blanches. Une rhinorrhée, des lésions oculaires (chorio-rétinite, glaucome, cataracte), une hépatite, une hépatosplénomégalie et une thrombocytopénie ainsi que des lésions osseuses et plus tardivement dentaires sont souvent associés. Le diagnostic se base sur un examen sanguin chez la maman et l’enfant par des IgM spécifiques et confirmé par deux tests, un non tréponémique (RPR) et un tréponémique (TPPA). Le traitement recommandé est donné dans le tableau 1.

Figure 3
Lymphocytome borrélien du mamelon gauche

Infections cutanées bactériennes du voyageur ou migrant

La migration et les voyages exotiques doivent nous faire évoquer dans le diagnostic différentiel des infections inhabituelles dans notre région9)10).

La lèpre9) est une infection par Mycobacterium (M) leprae. Elle peut être observée chez des enfants venant de régions endémiques. La présentation clinique est variable et dépend aussi de l’immunité du sujet. Dans les formes lépromateuses, des plaques ou nodules infiltrées sont présents. Des formes avec atrophie de l’épiderme et infiltration sous-jacente, des macules hypopigmentées dysesthésiques ou encore des plaques annulaires sont d’autres présentations possibles.

La tuberculose (TBC)9) due à M tuberculosis peut se manifester comme une tuberculose primaire de la peau avec des nodules qui s’ulcèrent facilement accompagnés de lymphadénopathies. La TBC secondaire peut se présenter sous forme de scrofuloderma. Il est le résultat d’une dissémination cutanée d’une lymphadenite sous-jacente qui forme des nodules adhérents en profondeur avec écoulement de matériel caséeux. Une autre présentation est le lupus vulgaire causé par la dissémination de l’infection ou par re-inoculation. Il se manifeste par des plaques rouges ou brunâtres composées de différents nodules avec une atrophie centrale. Des plaques verruqueuses et des lésions péri-orificielles sont également observées. Le diagnostic est confirmé par la biopsie d’une lésion cutanée qui montre des granulomes épithéloides et parfois le bacille par une coloration à la fluoresceine auramine ou rhodamine. Une culture ou PCR de peau peut identifier M tuberculosis. Des examens sanguins (IGRA) ou intradermiques (tuberculine) ainsi qu’une radiographie du thorax sont nécessaires.                                                                                                                                                                         

Les mycobactéries atypiques9) sont des infections qui sont aussi souvent des maladies d’importation, bien que certains, comme le M marinum, scrofulaceum et avium, soient ubiquitaires. Le premier provoque des nodules douloureux qui peuvent être verruqueux, uniques ou multiples de distribution sporotrichoïde. L’infection est acquise en se baignant dans l’eau douce ou salée, ou par contact avec des poissons contaminés dans des aquariums. Le M scrofulaceum et le M avium sont responsables, typiquement chez les enfants, d’une lymphadénite parfois fistulisante. Elle se localise souvent en région sous-mandibulaire ou pré-auriculaire. Des infections par M fortuitum et chelonae ont été décrites chez des enfants s’étant fait percer les oreilles ou chez les adolescents qui s’étaient laisser placer des tatouages. Le M ulcerans est endémique dans les eaux tropicales et touche surtout les enfants et adolescents. Des nodules non douloureux aux membres se forment, deviennent nécrotiques et s’ulcèrent (ulcère de Buruli). L’infection peut se disséminer vers d’autres organes. Le diagnostic est confirmé par biopsie et culture comme pour la tuberculose, bien que les conditions de culture soient différentes. Le laboratoire de microbiologie doit être informé de la suspicion d’infection par M atypique.

La diphtérie10) est encore endémique dans les régions tropicales d’Afrique subsaharienne, d’Inde et d’Indonésie. Le vaccin protège contre les complications liées aux toxines, mais n’empêche pas une infection cutanée par auto-inoculation ou surinfection d’une plaie existante. Celle-ci se manifeste comme une ou plusieurs ulcérations douloureuses, œdématiées, érythémateuses, avec un décollement épidermique péri-lésionnel (fig. 4) et parfois un exsudat grisâtre (pseudomembrane) pareil à ce qu’on peut voir en regard des amygdales dans les formes non-cutanées. Des papules hyperkératosiques grisâtres, ressemblant à des piqûres d’insectes mais sans guérison spontanée y sont souvent associées. Une infection respiratoire (20 – 40 % des cas), et des symptômes neurologiques (3 – 5 %) peuvent être présents. Le diagnostic se fait sur la base d’une culture bactérienne de la plaie et d’un frottis de gorge. La recherche de toxines est essentielle. Si la toxine est présente, l’organisation pour la surveillance des maladies doit être prévenue. Jusqu’à exclusion, le patient et ses proches doivent être mis en quarantaine.

Parmi les maladies bactériennes traitées dans cet article, les suivantes sont à déclaration obligatoire en Suisse: syphilis, tuberculose et diphtérie.

Figure 4
Ulcères causés par Corynebacterium diphtheriae

Infections cutanées virales fréquentes

Au cours de l’enfance presque tout le monde s’infecte avec au moins un des 8 types de virus Herpes. Une caractéristique typique de ces virus est qu’ils entrent dans un état de latence après l’infection : état depuis lequel ils peuvent être réactivés et provoquer de nouvelles lésions cutanées. Le diagnostic se base sur le tableau clinique et est confirmé par la culture ou l’analyse par PCR. Dans les primo-infections la détection de la séroconversion des anticorps est aussi possible.

La primo-infection à herpès simplex virus (HSV-1)11) a presque toujours lieu avant l’âge de 5 ans. Le tableau clinique peut être d’intensité très variable : pauci-symptomatique ou réalisant au maximum une gingivo-stomatite aiguë accompagnée de fièvre. Chez le bébé principalement, il y a un risque de déshydratation nécessitant une perfusion en hôpital si l’enfant refuse l’alimentation suite à une dysphagie en rapport avec des ulcérations diffuses des gencives, du palais et des amygdales. Les lésions peuvent déborder sur les lèvres et le menton et être associées à des adénopathies sensibles. L’évolution spontanée se fait vers la guérison en 10 à 15 jours. Celle-ci peut être raccourcie par un traitement d’aciclovir par voie veineuse.

La réactivation du HSV ce manifeste par des macules érythémateuses parsemées de petites vésicules formant vite des croûtes (fig. 5a). Des brûlures annoncent souvent un nouvel épisode. La récurrence de plus que 6 épisodes par année peut motiver un traitement prophylactique secondaire. L’immunosuppression favorise non seulement les récurrences mais également des lésions extensives et une atteinte viscérale (foie, poumon, tube digestif), motivant une prophylaxie primaire et secondaire chez ces patients.

Un panaris herpétique (fig. 5b) se présente avec une ou plusieurs vésicules de la pulpe du doigt accompagnées de picotements ou brûlures.

L’eczéma herpeticum est une surinfection diffuse d’un eczéma atopique par le HSV. Le tableau est souvent grave nécessitant une hospitalisation et pouvant se compliquer d’une surinfection bactérienne.

L’herpès génital peut survenir chez les adolescents sexuellement actifs. Il est habituellement provoqué par l’HSV-2, cependant l’HSV-1 est de plus en plus rapporté. L’infection se manifeste par des sensations de picotements et de brûlures génitales. Ceci est suivi de vésicules qui se forment sur fond érythémateux, s’ulcèrent et se recouvrent d’un exsudat jaunâtre.

L’herpès néonatal12) est transmis au moment de l’accouchement. Il s’agit d’une urgence néonatale, nécessitant des prélèvements cutané et muqueux, une PCR dans le sang et une PL avec PCR dans le LCR. La présentation clinique se divise en: un tiers d’infection SEM (skin, eyes, mucosa), un tiers sous la forme d’un sepsis avec des lésions viscérales diffuses, hépatiques ou autres et un tiers de méningo-encéphalite herpétique. Les deux dernières formes entraînent une morbidité, voire une mortalité élevées, notamment si elles ne sont pas rapidement traitées par aciclovir IV.

Une transmission verticale qui survient avant la 28ème semaine de grossesse est rare mais peut être la cause d’une fœtopathie sévère.

L’infection à varicella zoster virus (VZV) est très contagieuse, avec une contamination possible par les gouttelettes en suspension dans l’air ou, occasionnellement, après un contact direct avec des lésions infectieuses13). L’infection primaire provoque la varicelle qui touche plus de 90% des enfants avant l’âge scolaire. Des poussées successives de macules rouges avec vésicules centrales, puis pustules et croûtes se produisent, débutant sur le cuir chevelu et se propageant de manière caudale. Ceci donne un tableau clinique polymorphe. Les érosions des muqueuses sont courantes. Une fièvre et une altération de l’état général peuvent précéder ou accompagner le début de l’éruption cutanée. La complication la plus courante chez l’enfant est la surinfection bactérienne des vésicules, par le SA ou le SGA accompagné d’une seconde poussée de fièvre. Dès l’adolescence, les pneumopathies et encéphalites sont des complications à craindre, bien que rares chez l’enfant. En Suisse, il est conseillé de vacciner tous les enfants entre 11 et 15 ans qui n’ont pas encore eu la varicelle.

Une varicelle durant les deux premiers trimestres de la grossesse présente un faible risque de varicelle congénitale. Le nouveau-né peut présenter des bulles ou plus fréquemment une aplasie et des cicatrices le long d’un dermatome (décrit comme un « motif en zigzag »). Des lésions cérébrales et oculaires ainsi qu’une hypoplasie des membres sont également observées. Comme le risque de lésions fœtales est faible, seul un suivi échographique rapproché, débutant 5 semaines après l’éruption de varicelle chez la mère, est recommandé.

Si la varicelle survient chez la mère dans les cinq jours avant, jusqu’à deux jours après l’accouchement, le risque de varicelle néonatale14) est extrêmement élevé, en raison de l’absence d’anticorps maternels. Des lésions cutanées hémorragiques ulcéreuses graves associées à une pneumopathie, une insuffisance hépatique, une encéphalite et des problèmes de coagulation sont observés. Non traité, le taux de mortalité atteint 31%. Un traitement urgent est nécessaire, avec isolement dans une unité de soins intensifs néonatale et traitement par de l’aciclovir et des imunoglobulines spécifiques (Varitect®).

Le zona (fig 6) est la réactivation de la varicelle13), survenant moins souvent chez l’enfant que chez l’adulte. Les enfants qui ont eu la varicelle au cours de la première année de vie ou ayant reçu le vaccin vivant atténué sont plus à risque. Le zona se présente généralement avec des vésicules groupées sur une base érythémateuse suivant un ou plusieurs dermatomes, évoluant ensuite en pustules et se terminant par la formation de croûtes. Des investigations plus approfondies s’imposent seulement si plusieurs dermatomes sont atteints, si les épisodes sont récidivants ou si le patient a d’autres symptômes évocateurs d’une immunodéficience. Les dysesthésies et les complications neurologiques sont moins fréquentes chez l’enfant comparé à l’adulte. Le syndrome auriculo-temporal et la paralysie faciale ont été décrits dans ce contexte.

Parmi les ulcères génitaux aigus, les causes infectieuses sont rares. Elles sont dues à une primo-infection par les virus Ebstein Barr, Cytomegalo, Influenza ou encore par des bactéries de type Mycoplasma ou PA. Il faut surtout penser à des causes infectieuses chez les fillettes non actives sexuellement, et s’il s’agit d’un premier épisode accompagné de fièvre, fatigue et une pharyngite. Chez la jeune fille, il faut penser à rechercher une infection sexuellement transmissible, notamment une infection à HSV ou un chancre syphilitique. Les causes non infectieuses sont plus fréquentes, telles que les maladies auto-immunes ou inflammatoires, la maladie de Behçet ou des immunodéficiences15).

La maladie pieds, mains, bouche16), une infection à entérovirus, s’observe chaque année sous forme de petites épidémies. Les vésicules de la muqueuse buccale, linguale et des paumes et plantes sont typiques. Elles peuvent parfois toucher les fesses ou les organes génitaux. L’évolution est habituellement bénigne et de courte durée. Les enfants ont une odynophagie, et peuvent refuser de manger. La fièvre est fréquente. La plupart des cas sont dus aux virus Coxsackie A 16, l’echovirus 71 ou d’autres entérovirus. Récemment aux USA et en Europe une éruption atypique due au virus Coxsackie A6 a été décrite16). Elle se présentait par un important état fébrile accompagné de lésions papulo-vésiculeuses évoluant en lésions vésico-bulleuses et en bulles distribuées sur l’ensemble du corps. D’autres présentations ont été décrites comme une éruption similaire au syndrome de Gianotti Crosti, des lésions pétéchiales et purpuriques avec une localisation en gants et chaussettes ou encore, chez les patients avec une dermatite atopique, une éruption ressemblant un eczéma herpéticum, nommé par analogie un eczéma coxsackium (fig. 7).

Le tableau 2 résume les traitements proposés dans ces infections cutanées virales11)12)14)17).

Figure 5
Infections par Herpes simplex virus
5a: Herpès labial, 5b: Panaris herpétique
Figure 6
Zona par réactivation d’une infection par Herpes Zoster virus
Figure 7
Eczéma coxsackium

Tableau 2: Traitements d’infections cutanées virales.

Conclusion

Les maladies bactériennes et virales cutanées sont fréquentes chez l’enfant. Les maladies importées d’autres pays se voient de plus en plus et il est important d’y penser. Il est conseillé de toujours confirmer l’infection par des cultures ou une PCR, y compris pour les infections banales comme les folliculites, maladie pieds-mains-bouche etc., surtout en cas de présentation atypique ou récidivante. Pour les infections bactériennes, un antibiogramme est important, vu que les résistances augmentent, mais aussi parce que des germes inhabituels sont parfois isolés. Les urgences infectieuses sont rares. Cependant, les fasciites nécrosantes, les infections avec des souches produisant des toxines ou encore la varicelle ou l’herpès néonatal, nécessitent un diagnostic et un traitement précoce. Certains enfants, surtout les immunodéprimés, sont à risque d’une évolution grave avec dissémination de l’infection.

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Informations complémentaires

Correspondance:
Conflit d'intérêts:
Les auteurs n’ont déclaré aucun lien financier ou personnel en rapport avec cet article.
Auteurs
Dr med.  Marie-Anne Morren Unité de dermatologie pédiatrique, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois et Université de Lausanne

Dr med.  Sarah Ventéjou Unité de dermatologie pédiatrique, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois et Université de Lausanne

PD Dr med.  Sandra Asner Unité d’infectiologie pédiatrique et vaccinologie, Service de Pédiatrie, Département Femme-Mère-Enfant, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, Centre Médical de Vidy, VidyMed, Lausanne

PD Dr med.  Stéphanie Christen-Zaech Unité de dermatologie pédiatrique, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois et Université de Lausanne